Interview de Bruno Cohen-Bacrie : la gestion de la crise sanitaire sur le territoire de Mayotte

Publié le 2 avril 2020 à 10h00 - par

Bruno Cohen-Bacrie, directeur de la communication au Conseil départemental de Mayotte, répond à nos questions et nous livre son expertise face à la gestion de la crise sanitaire liée à la propagation du Covid-19 sur le territoire de Mayotte.

Interview de Bruno Cohen-Bacrie : la gestion de la crise sanitaire sur le territoire de Mayotte
Copyright © Crédit photo Conseil départemental de Mayotte

Cet article fait partie du dossier :

Covid-19 : des acteurs publics face à la crise sanitaire
Covid-19 : des acteurs publics face à la crise sanitaire
Voir le dossier

Pouvez-vous nous dresser un panorama de l’île de Mayotte et ses principaux enjeux face à la crise sanitaire actuelle ?

Interview de Bruno Cohen-Bacrie : gestion crise sanitaire sur le territoire de Mayotte

Bruno Cohen-Bacrie

Les difficultés observées en métropole pour faire face à cette crise inédite sont bien entendu les mêmes à Mayotte, dans un contexte où les consignes et recommandations (gestes barrières, fermeture des commerces, confinement) sont nationales et concernent aussi les Outre-mer. À Mayotte, nous n’étions au 1er avril qu’au stade 2 et l’Agence Régionale de Santé (dirigée par Dominique Voynet) s’attache à agir, en lien avec l’État, sur les liaisons aériennes, vecteurs prioritaires de la contagion aujourd’hui.

Dans le contexte sanitaire propre à Mayotte, où il est difficile de demander à des habitants très pauvres de rester confinés dans quelques mètres carrés, tout l’enjeu en termes de communication est d’essayer de toucher toutes les populations. Par exemple, les premiers spots diffusés dans la barge qui transporte les habitants de Grande-terre et de Petite terre, l’ont été en français et en shimahorais pour essayer de toucher tout le monde. Le Grand Cadi nous a aidés à sensibiliser la population très majoritairement musulmane, à la fermeture des mosquées et écoles coraniques, à la nécessité de prier chez soi. Il y a des adaptations culturelles à prévoir, même si dans l’ensemble les consignes sont plutôt suivies.

Quelles sont les premières urgences que vous avez eues à gérer pour faire face à la crise du coronavirus, eu égard à la particularité de vos collectivités et de votre territoire ?

De ce point de vue, nous avons été logés à la même enseigne qu’en France hexagonale car les consignes se sont appliquées de la même manière ici et dans les Outre-mer alors qu’il n’y avait pas une conscience encore forte de la gravité du Covid-19, lequel se cumulait à une épidémie de dingue virulente. Il y a eu, de la part de la direction des services départementaux, une très grande vigilance à appliquer toutes les consignes de prudence, notamment la protection des agents conjuguée au maintien des services dits essentiels (PMI… importantes dans un département où leur rôle est crucial). Nous avons essayé de bien distinguer la communication interne (plus de 3 000 agents, pas tous dotés de messagerie) et celle adressée à la population, en recherchant une synergie entre les deux registres. Nous avons été confrontés à la difficulté nationale d’approvisionnement en masques et en gel hydro-alcoolique, ce qui ne facilite pas le message en direction des agents mobilisés.

Comment la continuité des services a-t-elle été assurée au niveau du département de Mayotte ?

Il y a eu plusieurs phases – avant et après le confinement – mais le Conseil départemental a très vite adopté un plan de continuité des activités (PCA) en distinguant les services qui devaient être mobilisés et ceux qui étaient moins en première ligne. Le Conseil départemental s’est attaché à contribuer, dans la mesure de ses compétences, à préserver les services indispensables : réouverture des PMI pour assurer des consultations importantes, en particulier les primo-vaccins ; adaptation du service de transports par barge compte tenu de la limitation des déplacements… Mais c’est aussi l’organisation administrative (direction générale, RH, finances, logistique…) qu’il faut assurer pour faire face à une telle crise inédite.

Quelles actions avez-vous mis en place en matière de communication pour accompagner la population de Mayotte et faire face à cette crise sanitaire ?

Nous avons encore peu de recul, mais nous avons eu recours à toute la gamme des outils pour toucher les publics : mails et notes pour les agents (problématique complexe du travail et de l’information à distance quand une majorité d’agents est confinée), communiqués réguliers pour la population, vidéo du président du Conseil départemental sur le réseau social du Conseil départemental, relais régulier des consignes des autorités sanitaires et étatiques… Nous avons proposé des portraits d’agents départementaux pour montrer que derrière cette continuité, il y a des hommes et des femmes… On voit bien tout l’intérêt, dans ce type de crise, de s’appuyer sur des outils cumulatifs ou complémentaires pour toucher le grand public, dans un contexte où les émetteurs sont multiples (mairies, autorités de santé, Préfet…). Dans l’ensemble, cela se fait harmonieusement, il y a un objectif, un combat commun qui n’autorise pas les atermoiements…

Propos recueillis par Marylou Rodella

Téléchargez gratuitement notre fiche
« Covid-19 : communiquer localement face à une crise sanitaire »

Covid-19 : communiquer localement face à une crise sanitaire

Dans la gestion de crise, la communication occupe une large place. La stratégie de communication consiste à informer sur la situation, et à préserver toute crédibilité dans la gestion de cette crise. Cette fiche rassemble des conseils – adaptables – dans ce domaine.

Téléchargez gratuitement notre fiche sur « Communiquer localement face à une crise sanitaire » qui vous est offerte par les Éditions WEKA.


On vous accompagne

Retrouvez les dernières fiches sur la thématique « Ressources humaines »

Voir toutes les ressources numériques Ressources humaines