Hélène Guillet : « Il faut tirer les enseignements à froid de notre pilotage et de notre gestion pour mettre au point un dispositif transposable et modélisable »

Publié le 6 mai 2020 à 9h03 - par

Hélène Guillet vient de quitter ses fonctions de Directrice Générale des Services de la ville de Vertou pour occuper celles de DG du centre de gestion de Loire Atlantique. Face à la gestion de la crise sanitaire liée à la propagation du Covid-19, elle répond à nos questions et nous fait part de son expérience à Vertou.

Hélène Guillet : "Il faut tirer les enseignements à froid de notre pilotage et de notre gestion pour mettre au point un dispositif transposable et modélisable"
© Crédit photo Denise Machinaud

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Quelles sont les premières urgences que vous avez eues à gérer devant la crise du coronavirus, eu égard à votre type de collectivité et au territoire ? Quels sont les services publics essentiels que vous avez maintenus ?

Hélène Guillet, DG du centre de gestion de Loire Atlantique

Hélène Guillet

La première urgence a été de mettre en place un dispositif de pilotage et de gestion de la crise rigoureux avec 4 objectifs : garantir des analyses de situation et des prises de décision fluides et précises dans des délais ultracourts, établir notre « doctrine » de sécurité sanitaire et la poser comme cadrage global, maintenir le pilotage managérial à l’échelle de l’ensemble des 350 collaborateurs et accompagner le tout d’un dispositif de communication adapté. Tout cela sur fond d’élections municipales avec tout le brouillage institutionnel que nous connaissons.

Nous nous sommes adaptés en pas à pas, au rythme des décisions nationales et des ordonnances. Et nous nous sommes immédiatement conformés au principe de confinement maximum. Nous avons donc limité les présences au strict indispensable : l’accueil des enfants de soignants, l’État civil, la police municipale, la propreté des locaux occupés par les accueils, l’aide alimentaire, les accompagnements sociaux, le soutien aux personnes âgées avec le déclenchement d’un plan spécifique. Et nous avons imposé des roulements de présence qui tiennent compte des contraintes d’ordre privé mais aussi, le cas échéant, des angoisses individuelles légitimes. Ainsi, au plus fort de la crise, les présences physiques ont été limitées à une petite trentaine de personnes sur les 350 à 400 personnes normalement en activité. Cela ne veut pas dire que les autres fonctions aient été toutes mises en sommeil. Par exemple, l’ensemble des services supports ont été virtualisés (courriers entrant/sortant, communication, achats, paiements des factures, etc.), l’accueil téléphonique bien entendu maintenu, l’accueil physique de l’ensemble de la collectivité centralisé à l’Hôtel de ville avec des horaires réduits. Nous avons aussi limité les entretiens extérieurs au strict indispensable (espaces verts, cimetières…). Nous avons très rapidement stoppé l’ensemble de nos interventions techniques et suspendu les marchés alimentaires.

Comment avez vous adapté votre pilotage et votre communication ?

Nos organes de pilotage et de gestion de la crise ont mobilisé l’essentiel de leur temps à la veille puis à la digestion juridique et technique des décisions nationales et à leur mise en œuvre immédiate. Nous avons aussi consacré beaucoup d’attention à la protection de la population, des élus, et des agents en nous assurant de la cohérence de nos mises en œuvre. Enfin, un temps important a aussi consisté en l’attention managériale et la communication associée : parmi les faits les plus marquants, nous sommes parvenus à garder le contact quasi quotidien avec chacun des 350 agents. Nous avons élaboré des bulletins d’info paraissant jusqu’à 2 fois par jour au plus fort de la crise, mis en place une boite mail spécifique Covid, ainsi qu’une cellule d’accompagnement psychologique sans limite d’intervention.

À ce stade dans quels domaines considérez-vous que votre organisation était prête à réagir au mieux et ce qu’il faudrait améliorer, voire créer ?

Je ne crois pas que nous étions prêts, mais qui l’était ? En revanche, je constate que la puissance d’expertise des équipes, la confiance interne horizontale, verticale et transversale ainsi que la performance de nos collectifs de travail ont révélé notre capacité d’adaptation dans des temps records et nous ont permis de piloter et gérer cette crise de la manière la plus « confortable » qui soit. Nous n’avons pas cédé à la panique, nous n’avons pas été emportés par la pression et nous sommes restés alignés. Nous sommes épuisés, la crise n’est pas achevée : il est indispensable de garder la tête froide et de ne pas relâcher l’attention ni la tension…

Je n’assurerai pas le pilotage de cette suite à Vertou puisque les circonstances prévues depuis plusieurs mois, me conduisent à changer de fonction au moment de la fin de confinement. Nous avons engagé avant mon départ un retour sur expérience (REX) à chaud avec l’ensemble de l’encadrement, qui sera suivi dès que cela sera possible du REX avec les agents. L’idée est bien de tirer les enseignements à froid de notre pilotage et de notre gestion pour mettre au point un dispositif transposable et modélisable.

Et je compte, dans mes nouvelles fonctions, que nous puissions nous inscrire dans une ligne similaire, en élargissant ce REX à l’externe. Car je suis persuadée que nous aurons à affronter de nouveaux pics de crise : qu’il s’agisse de celle-ci ou de quelque autre que ce soit.

Je garde l’espoir que nous pourrons aussi développer de nouveaux modèles de fonctionnement durables permettant, à terme, d’éviter de nouvelles catastrophes de ce type… mais ceci est une autre histoire.

Propos recueillis par Hugues Perinel


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