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Quelles lignes directrices de gestion dans la fonction publique hospitalière en 2021 ?

Publié le 29 octobre 2020 à 9h32 - par

L’évaluation professionnelle des agents hospitaliers va connaître deux mutations importantes en 2021.

Quelles lignes directrices de gestion dans la fonction publique hospitalière en 2021 ?

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Loi de transformation de la fonction publique
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D’une part, l’entretien professionnel sera la seule modalité d’appréciation de la valeur professionnelle des agents hospitaliers. D’autre part, à partir du 1er janvier 2021, les lignes directrices de gestion (LDG), établies pour au moins cinq ans, serviront d’orientation pour chaque établissement public sanitaire, social et médico-social avant de prendre une décision individuelle de recrutement, de mobilité, d’avancement et de promotion des agents hospitaliers. Leur élaboration nécessite d’évaluer le présent pour déterminer le futur au sein de chaque établissement.

La loi du 6 août 2019 crée les lignes directrices de gestion (LDG) pour répondre aux trois objectifs suivants : définir de façon transparente les critères qui détermineront les décisions de mobilité, d’avancement et de promotion des agents ; responsabiliser l’administration et renforcer les garanties dont disposent les fonctionnaires quant à l’examen des décisions affectant leur carrière. Ladite loi a modifié le rôle des commissions administratives paritaires (CAP), en supprimant leurs compétences en matière de mutation et de mobilité à compter du 1er janvier 2020 et en matière d’avancement et de promotion dès le 1er janvier 2021 pour les trois versants de la fonction publique. Le décret du 29 novembre 2019 a précisé les nouvelles dispositions afférentes aux compétences des CAP1, ainsi que celles relatives au champ d’application des LDG dans la fonction publique hospitalière en vue de l’élaboration des décisions individuelles prises au titre de l’année 2021. Les LDG seront un outil de gestion prévisionnelle des ressources humaines spécifique à chaque établissement sanitaire, social et médico-social (1). Leur édification nécessite un dialogue en interne (2).

1. Les LDG, un outil de gestion prévisionnelle des ressources humaines spécifique à chaque établissement

Les LDG visent à définir des profils d’agents à recruter, à promouvoir et à valoriser au sein d’un établissement hospitalier pour définir des effectifs sur plusieurs années.

Premièrement, les LDG remplissent le précédent rôle qu’avaient les CAP en matière de promotion et d’avancement, de mobilité et de recrutement avant la loi du 6 août 2019. Elles ont d’une part, pour but de fixer en matière de promotion et de valorisation des parcours : « les orientations et les critères généraux à prendre en compte pour les promotions de corps et de grade réalisées par la voie du choix »2 et « les mesures favorisant l’évolution professionnelle des agents et leur accès à des responsabilités supérieures »3. En matière de recrutement, les LDG visent, d’autre part, à : « favoriser, notamment, l’adaptation des compétences aux évolutions des missions et des métiers, la diversité des profils et des parcours professionnels et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes »4. Enfin, en ce qui concerne les corps et emplois des personnels de direction et des directeurs de soins, les LDG visent « à encourager la mobilité »5.

Deuxièmement, en matière de promotion et de valorisation des parcours des agents, les LDG ont pour objectif de : « préciser les modalités de prise en compte de la valeur professionnelle et des acquis de l’expérience professionnelle des agents, notamment à travers la diversité du parcours et des fonctions exercées, les formations suivies, les conditions particulières d’exercice, attestant de l’engagement professionnel, de la capacité d’adaptation et, le cas échéant, de l’aptitude à l’encadrement d’équipes »6. Elles visent également à « assurer l’égalité entre les femmes et les hommes dans les procédures de promotion en tenant compte de la part respective des femmes et des hommes dans les corps et grades concernés »7.

Enfin, les LDG s’inscrivent dans une stratégie pluriannuelle de pilotage des ressources humaines8. Ainsi, elles seront établies pour au moins cinq ans. Elles pourront faire l’objet, en tout ou partie, d’une révision durant cette période9.

L’élaboration des LDG nécessite un vrai dialogue en impliquant l’ensemble des services, ainsi que l’ensemble des partenaires sociaux.

2. Un nécessaire dialogue dans chaque établissement pour l’édification des LDG

Premièrement, l’élaboration des LDG renforce le rôle du chef d’établissement. Il les établit au sein de l’établissement. Ces LDG peuvent comporter des orientations qui sont propres à certaines missions, certaines structures internes ou certains corps ou ensemble de corps. Ces LDG peuvent également prendre en compte les besoins en ressources humaines de l’établissement concerné liés notamment à la démographie des professionnels et aux spécificités du territoire10. En revanche, les LDG concernant les corps et emplois des personnels de direction et des directeurs des soins sont établies par le directeur général du Centre national de gestion. Ces dernières peuvent prendre en compte les besoins en ressources humaines de ces corps et emplois liés notamment à l’évolution de l’organisation et des missions des établissements publics sanitaires, sociaux et médico-sociaux11. Le comité consultatif national est consulté sur les projets de LDG, ainsi que sur leur révision12.

Deuxièmement, le comité social de l’établissement, remplaçant les comités techniques (CT), qui devra être mis en place en 2022 à l’issue des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique, sera consulté sur les projets de lignes directrices de gestion préparées par le chef d’établissement, ainsi que sur leur révision13. Il y a un vide juridique car les textes prévoient que les LDG devront être élaborées pour le 1er janvier 2021 au sein de chaque établissement par son chef. Seuls les CT devront donner un avis sur les premières LDG, en revanche, il n’y a aucune obligation de consulter les CHSCT. Cela peut être un point de crispation dans le dialogue social.

Enfin, le dialogue dans l’ensemble des services sera d’autant plus nécessaire car les LDG seront rendues accessibles aux agents par voie numérique et, le cas échéant, par tout autre moyen14. Elles seront opposables à l’administration, notamment en cas de recours devant le juge administratif.

La suppression de l’avis de la CAP sur le compte-rendu d’entretien individuel peut générer de la suspicion de la part des agents et peut créer du contentieux. La CAP pouvait jouer un rôle de conciliation. En effet, dès le 1er janvier 2021, les lignes de gestion seront désormais opposables à toute décision individuelle en matière de recrutement, de mobilité, d’avancement et de promotion des agents. Les LDG nécessiteront d’être subtiles pour définir une méthode afin d’identifier les critères du mérite, de former les cadres évaluateurs à ces critères et d’évaluer régulièrement ces critères d’appréciation de la valeur professionnelle des agents. L’enjeu est d’harmoniser les pratiques et de créer un climat apaisé au sein des services de chaque établissement.

Dominique Volut, Avocat au barreau de Paris, Docteur en droit public


1. Art. 34 à 37 du décret n° 2019-1265 du 29 novembre 2019 relatif aux lignes directrices de gestion et à l’évolution des attributions des commissions administratives paritaires. Les CAP sont compétentes pour des décisions individuelles défavorables.

2. Art. 27-I du décret n° 2019-1265.

3. Ibidem.

4. Art. 27-III du décret n° 2019-1265.

5. Art. 27-IV du décret n° 2019-1265.

6. Art. 27-II du décret n° 2019-1265.

7. Ibidem.

8. Art. 26 du décret n° 2019-1265 : « La stratégie pluriannuelle de pilotage des ressources humaines définit les enjeux et les objectifs de la politique de ressources humaines à conduire au sein de l’établissement, compte tenu des missions qui lui sont confiées, notamment dans le cadre de la mise en œuvre du projet médical et soignant et de son insertion territoriale et des politiques publiques qu’il met en œuvre. La stratégie pluriannuelle peut porter sur l’accompagnement du développement des coopérations professionnelles, la diversification des modes d’exercice et l’évolution des organisations de travail Pour les corps et emplois des personnels de direction et des directeurs des soins, cette stratégie tient compte des politiques publiques mises en œuvre et de la situation des effectifs, des métiers et des compétences. »

9. Art. 23 du décret n° 2019-1265.

10 Art. 22-I du décret n° 2019-1265.

11 Art. 22-II du décret n° 2019-1265.

12 Art. 24 du décret n° 2019-1265.

13 Ibidem.

14 Art. 25 du décret n° 2019-1265.

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