Acheter judicieusement ou de manière responsable et durable
Il convient de renforcer la fonction achat pour mieux répondre aux enjeux environnementaux. Le renforcement de la fonction achat, au travers d’une meilleure lisibilité et attractivité de ses fonctions est nécessaire pour mettre en œuvre les objectifs des politiques environnementales en France. L’ensemble des pays de l’OCDE utilisent de plus en plus les marchés publics comme un outil stratégique pour contribuer à la réalisation d’objectifs de politiques publiques tels que le développement durable et en particulier la protection de l’environnement et la lutte contre le changement climatique. La poursuite de ces objectifs doit cependant être évaluée au regard des principes fondateurs des marchés publics qui sont l’acquisition de biens et services nécessaires à l’exécution de la mission des pouvoirs publics en temps opportun, au moindre coût et avec efficience. La tâche confiée aux acheteurs publics devient en conséquence de plus en plus complexe et nécessite des arbitrages et une diversité de compétences et de connaissances grandissante. C’est la raison pour laquelle, la fonction achat reçoit de plus en plus d’attention au sein des pays membres de l’OCDE. En achetant judicieusement ou de manière responsable et durable, les entités publiques peuvent contribuer à la croissance économique et à la création d’emplois, mais aussi améliorer le bien-être social et assurer la protection de l’environnement tout en optimisant les ressources disponibles. Malgré un plus grand nombre de métiers, l’articulation entre les métiers demeure floue. Par exemple, le responsable achat, responsable achat marchés publics et le responsable marchés publics comportent des compétences et activités similaires. Le métier responsable achat marchés publics se distingue par un périmètre de compétences élargi car mettant en œuvre la politique achat de sa sphère publique de référence, là où le responsable achat met en œuvre la politique achat de sa propre structure. Le responsable marchés publics est quant à lui davantage tourné vers l’aspect juridique de la commande publique et est chargé de garantir le respect de la réglementation.
Prescripteurs et décideurs, acteurs clés pour la prise en compte des considérations environnementales dans les marchés publics
Au-delà de la fonction achat de l’État au sens strict, de nombreux acteurs jouent un rôle important dans la prise en compte des considérations environnementales, notamment les prescripteurs et les décideurs. Le prescripteur joue un rôle capital dans l’achat public car il définit le besoin, donc ce qui doit être acheté. Il précise notamment la durée pendant laquelle les livrables pourraient être utiles à son organisation, sur quel territoire, dans quels contextes, sur quels supports, etc. La mission du prescripteur se traduit généralement dans l’achat public par la définition du besoin, la rédaction des spécifications techniques, la participation au sourcing, ainsi que le suivi de l’exécution du contrat, deux axes visés par la loi Climat et résilience ainsi que le PNAD pour l’introduction de considérations environnementales. L’appropriation des objectifs environnementaux liés à la commande publique par les prescripteurs paraît néanmoins imparfaite. Pourtant ces prescripteurs opèrent dans des segments d’achat variés, particulièrement propices à l’intégration de considérations environnementales comme les véhicules, le bâtiment, les activités portuaires, les systèmes d’information et l’informatique, etc. Une enquête menée par l’OCDE auprès de 22 prescripteurs révèle que seulement trois d’entre eux se sont dotés d’une stratégie traitant de questions environnementales au sein de leur division, alors que 6 autres ont indiqué que cette stratégie était en cours de développement. Au-delà des objectifs stratégiques, la réalité opérationnelle démontre le potentiel d’une plus grande synergie entre les prescripteurs et les acheteurs. Les réponses au questionnaire indiquent un rôle varié des prescripteurs dans le cycle des achats publics, avec des interventions conjointes avec les acheteurs à différents stades tels que le recueil des besoins, la rédaction de spécifications techniques, le sourcing, l’établissement de critères d’attribution, l’évaluation des offres, le suivi du contrat et les paiements. Seulement 40 % des prescripteurs interrogés ont indiqué contribuer à la prise en compte des considérations environnementales dans les achats, certains par l’insertion de clauses d’exécution ou de critères environnementaux, d’autres par la rédaction de spécifications respectueuses de l’environnement. Une mobilisation plus large des prescripteurs est nécessaire pour s’assurer que l’écosystème complet des achats a en vue les objectifs des différentes politiques publiques. Si certains prescripteurs sont déjà sensibilisés aux problématiques environnementales, une formation pratique pourrait s’avérer utile afin de renforcer leurs capacités en matière d’intégration de considérations environnementales dans les marchés publics.
Un autre acteur clé du système d’achat est le décideur, représentant juridique du pouvoir adjudicateur. Son rôle inclut l’attribution et la signature des marchés sur la base de l’analyse des offres effectuée par ses services, et ainsi d’engager juridiquement le pouvoir adjudicateur sur le fondement d’une délégation. Il soutient ainsi la fonction achat. L’enquête menée par l’OCDE révèle qu’il y a peu de prise en compte environnementale au niveau des orientations stratégiques au sein des différentes organisations. Ce manque de prise en compte des décideurs, couplé avec le besoin de renforcement des capacités des prescripteurs en matière environnementale pour l’analyse des offres, ainsi que le manque d’intérêt pour le critère environnemental relativement à d’autres critères, ne facilite pas l’intégration de considérations environnementales au sein des marchés publics. Enfin, l’OCDE propose que l’expertise de la Direction des achats de l’État (DAE) soit plus sollicitée pour répondre aux défis opérationnels des acheteurs de l’État.
Dominique Niay
Source : Promouvoir les marchés publics stratégiques et écologiques en France, OCDE
