Fibre optique : bientôt une loi pour assainir les raccordements anarchiques d’abonnés

Publié le 29 août 2022 à 9h00 - par

Limitation du nombre de sous-traitants, contrôle des intervenants, sanctions financières, renforcement des pouvoirs de l’Arcep, indemnisation des abonnés lésés… Le sénateur de l’Ain, Patrick Chaize, propose de légiférer sur la qualité des raccordements à la fibre optique.

Fibre optique : bientôt une loi pour assainir les raccordements anarchiques d'abonnés

Le 19 juillet 2022, le sénateur de l’Ain et président de l’Avicca, Patrick Chaize, a déposé une proposition de loi visant à garantir la qualité et la pérennité des raccordements en fibre optique. Il s’agira de contraindre les opérateurs et leurs sous-traitants à raccorder les locaux dans les règles de l’art et en toute sécurité, sous peine de sanctions. Car, alors que la France est en pointe en Europe pour les déploiements de fibre optique et que les abonnements sont massifs, le mode de raccordement transforme progressivement cette réussite en échec, selon le sénateur qui souhaite, avec ce texte, consolider la réussite du plan France THD.

Cela fait cinq ans que les élus et l’Avicca pointent des dysfonctionnements répétés : abonnés débranchés au profit d’autres locaux, coupures de réseau, dégradation des logements et des équipements (armoires de rue, points de branchement optique, etc.)… Les témoignages ne manquent pas, comme des photos d’armoires de rues éventrées non refermées ou de câbles traversant des jardins, simplement posés à terre ! Sans compter que les mauvaises soudures, la pose de câbles endommagés ou soumis aux intempéries et la documentation erronée entraîneront des problèmes à plus long terme…

Bien qu’ils se soient engagés à prendre des mesures, notamment en juin 2022 lors du colloque Trip de printemps, les opérateurs n’avaient encore pas réagi début juillet 2022. Patrick Chaize a donc décidé de frapper fort pour mettre un terme définitif à ces situations, en obligeant la filière à changer radicalement ses pratiques et en renforçant les droits des consommateurs ; en cas d’installation non conforme, ils seraient autorisés à suspendre le paiement de leur abonnement auprès du fournisseur d’accès internet (FAI), voire à le résilier.

En principe, l’opérateur qui a construit le réseau devrait effectuer lui-même le raccordement des abonnés. Mais par dérogation, il peut le sous-traiter aux opérateurs commerciaux (le « mode stoc », pour sous-traitance opérateur commercial) ; c’est donc le FAI, auprès de qui l’abonné a souscrit une offre, qui construit cette partie « importante et délicate » du réseau, qu’il soit privé ou d’initiative publique. La dérogation est devenue la règle et a conduit à des sous-traitances en cascade. Et l’intervenant en bout de chaîne perçoit une rémunération si faible qu’il a intérêt à faire le raccordement en un temps record. Alors que l’opérateur de réseau verse entre 400 et 500 euros par raccordement à l’opérateur commercial, le sous-traitant de dernier rang peut recevoir seulement 50 euros…

Pour les réseaux publics, les collectivités sont pourtant obligées de continuer à subventionner, directement ou indirectement, les opérateurs commerciaux, pour des mauvais raccordements et dégradations de biens publics, explique le sénateur. Et pour les réseaux privés, elles ont souvent dû mobiliser des moyens et prendre des mesures pour leurs administrés privés d’accès à internet, même s’il ne s’agit pas de leur projet et que le pouvoir de police spéciale des communications électroniques appartient au régulateur (l’Arcep) et à l’État, selon la jurisprudence du Conseil d’État.

Selon le texte, l’opérateur qui a construit le réseau pourra contrôler les raccordements des FAI et les sanctionner en cas de malfaçons et obtenir que les plannings d’intervention lui soient communiqués systématiquement. Les rangs de sous-traitance seront limités ; les intervenants devront prouver leur qualification et la bonne exécution des prestations et seront tenus de remettre à l’abonné un certificat de conformité.

En zone d’initiative publique, la collectivité ou son prestataire vérifieront la conformité de l’installation avant de payer l’entreprise responsable du raccordement. Dans les territoires labellisés « zone fibrée », le raccordement sera confié à l’opérateur d’infrastructure et non à l’opérateur commercial. Par ailleurs, l’Arcep disposera d’un pouvoir de contrôle et de sanction renforcé sur tous les opérateurs qui interviennent sur le réseau.

Martine Courgnaud – Del Ry


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