Des résultats insuffisants en matière d’approvisionnement de proximité
La proposition de loi n° 2105* part du constat, en dépit des objectifs fixés par la loi Egalim, que les résultats attendus en matière de relocalisation de l’approvisionnement, de soutien aux productions nationales et de juste rémunération des agriculteurs ne sont pas au rendez vous. Pourtant, le secteur représente au total environ 20 milliards d’euros d’achats alimentaires annuels. L’obligation légale d’introduire au moins 50 % de produits « de qualité et durables », dont 20 % issus de l’agriculture biologique, a montré ses limites. Si elle permet l’introduction de produits certifiés, elle autorise également des denrées importées dès lors qu’elles sont labellisées, tandis que des productions françaises de proximité, non labellisées mais conformes aux normes sanitaires, sociales et environnementales nationales, en sont injustement exclues. Cette situation provoque une distorsion de concurrence préjudiciable à nos agriculteurs. Les projets de texte proposent une nouvelle structuration des obligations d’approvisionnement de la restauration collective publique, autour d’un dispositif dit « équilibré et juridiquement opérationnel ». Il s’agirait d’introduire une part minimale de 80 % de produits issus de circuits d’approvisionnement à ancrage territorial fort. Cette nouvelle architecture permettrait de reconnaître et de valoriser les productions locales non labellisées, d’objectiver juridiquement la notion de proximité, de sécuriser les acheteurs publics dans la passation de leur marchés, et de favoriser un ancrage territorial cohérent des politiques alimentaires publiques.
Privilégier l’achat local par un critère de préférence géographique
Le droit en vigueur interdit aux acheteurs d’introduire une préférence géographique explicite, au nom de la non discrimination entre opérateurs économiques. ll en résulte une contradiction profonde entre les objectifs politiques affichés par l’État en matière de souveraineté alimentaire et les moyens juridiques offerts aux acteurs de terrain. Ainsi, « les collectivités veulent acheter local mais n’ont pas le droit de le dire ni de l’écrire. Le droit empêche la volonté générale de s’incarner dans la commande publique ». Pour pallier à ce constat, une autre proposition de loi n° 2088* incite au favoritisme local par l’introduction d’un critère géographique introduit dans le Code de la commande publique. Elle autorise les acheteurs publics intervenant dans le domaine de la restauration collective à « conclure des marchés à bons de commande pluriannuels directement avec des producteurs agricoles, des groupements de producteurs ou des coopératives situés dans un rayon maximal de deux cent cinquante kilomètres de l’établissement concerné, afin d’adapter l’approvisionnement aux besoins et aux saisons. Ces marchés sont dispensés de publicité et de mise en concurrence jusqu’à un montant maximal de 100 000 euros hors taxes par an et par fournisseur ». Il s’agirait de favoriser les circuits courts en permettant la possibilité de privilégier la zone de culture ou de première transformation au plus proche du lieu de consommation final par des critères environnementaux. Écologiquement, en réduisant le nombre d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur, « nous diminuons mécaniquement les émissions de gaz à effet de serre liées au transport. Ce modèle vertueux contribue également à limiter les emballages excessifs et à encourager des pratiques agricoles » respectueuses des sols et des saisons. En matière de contrôle, la proposition prévoit prévoit que « chaque collectivité ou établissement concerné publie annuellement un rapport, rendu accessible au public par voie électronique et transmis au représentant de l’État dans le département, précisant la part des approvisionnements réalisée auprès de producteurs locaux et de circuits courts et l’empreinte carbone estimée des approvisionnements ».
Dominique Niay
* Textes de référence :
- Assemblée nationale, Proposition de loi n° 2105 du 18 novembre 2025 visant à renforcer la part de produits agricoles locaux dans la restauration collective publique,
- Assemblée nationale, Proposition de loi visant à renforcer la souveraineté alimentaire par le développement des circuits de proximité dans la restauration collective publique, n° 2088, déposée le mardi 18 novembre 2025.
