L’association des DRH des grandes collectivités se penche sur les « nouveaux visages du dialogue social »

Publié le 21 juillet 2017 à 10h19 - par

Manque de formation des managers et des représentants du personnel, multiplication inutile des instances sociales… : le dialogue social doit progresser dans la Fonction publique comme c’est déjà le cas dans le privé.

L'association des DRH des grandes collectivités se penche sur les "nouveaux visages du dialogue social"

Pour tout comprendre

Bien que convaincus de la nécessité d’un dialogue constructif, syndicats et employeurs publics ont la plupart du temps des relations conflictuelles, renforcées par de nombreux écueils : cadre trop rigide, absence de formation des managers et des représentants du personnel, multiplication des instances et des réunions, méconnaissance du terrain social par les DRH et l’encadrement… Il est temps de faire progresser le dialogue social dans la Fonction publique, comme le prévoit pour l’entreprise privée la loi Rebsamen du 17 août 2015 qui vise à améliorer l’efficacité et la qualité du dialogue social.

Lourde et procédurière, la Fonction publique induit le comportement des organisations syndicales. Mais si les conflits augmentent, on assiste également à une hausse du désengagement, a constaté Hubert Landier, expert en relations du travail et enseignant à Paris V (master d’ingénierie des ressources humaines), lors d’une journée d’études des DRH des grandes collectivités qui se déroulait à l’hôtel de ville de Paris, le 7 juillet. Aujourd’hui, le climat social s’exprime autrement : absentéisme de courte durée, perte d’efficacité au travail, passivité face au changement… « Le risque vient de l’enfermement dans des textes plus complexes que dans le privé ainsi que des attitudes corporatistes », estime Hubert Landier. Passer d’une culture de l’affrontement à une culture du compromis sera long, et le changement sera obligatoirement bilatéral.

Les réunions des différentes Commissions syndicales (CHSCT, comité technique…) sont souvent peu utiles et tendent à rendre le dialogue plus complexe, selon Emmanuel Grégoire, adjoint à la mairie de Paris en charge des RH, des services publics et de la modernisation. En outre, les compétences de ces instances se chevauchent. Pourquoi ne pas simplifier en conservant le CHSCT comme lieu unique de dialogue ? Les moyens des organisations syndicales pourraient être renforcés, dès lors qu’ils sont inclus dans une démarche constructive. Emmanuel Grégoire prône aussi l’adoption de mécanismes permettant de valoriser l’engagement syndical des agents, pour qu’il ne nuise pas au déroulement de leur carrière.

Le DRH doit soutenir les managers

Les DRH doivent aussi bien connaître le terrain social de leur collectivité (historique, humain…) et avoir une « intention sociale », en affirmant une stratégie face aux syndicats. Car le dialogue social n’existe que parce qu’on le décide, affirme Gérard Taponat, ancien DRH de Manpower. Or, la plupart des DRH subissent des réunions dont ils n’ont pas impulsé la dynamique. La stratégie sociale doit être intégrée dès le début des projets, afin que la collectivité et les institutions syndicales recherchent des solutions ensemble. Face à une salle de réunion à l’affût, qui ressent tout, le DRH-négociateur doit « croire au dialogue social » et « être prêt à mettre en jeu son poste et sa carrière ».

Le DRH doit aussi soutenir les managers, qui sont pris dans une situation inconfortable à laquelle ils ne sont pas préparés. Il convient de les rassurer et de leur apprendre à ne pas craindre les organisations syndicales, dont ils ne se font souvent une image que par la presse… S’ils savent pouvoir compter sur la DRH en cas de problème, ils prendront davantage leurs responsabilités. Créer un climat de confiance passe aussi par des détails informels : aller saluer le chef de service, se rendre à la machine à café à la même heure que le délégué du personnel… Les managers, qui doivent gérer les « irritants sociaux » – les dysfonctionnements internes sources de conflits – ont un rôle de conciliation continue. Pour Gérard Taponat, il convient d’être attentif à ces micro-conflits et de signer un « désaccord d’entreprise » reprenant la vision du DRH et celle des représentants du personnel. Base d’une future négociation, ce constat permet de fixer les idées et de voir l’évolution de la situation à une date ultérieure. Car « on ne peut pas tout résoudre en une journée de négociation, ni tout négocier à chaud ».

Le Code du travail doit être considéré comme un outil, non comme une contrainte. Et, comme l’a rappelé Gérard Taponat, si le dialogue social est éminemment collectif, il ne faut pas oublier que 82 % de la motivation de devenir délégué syndical est personnelle, pour obtenir un mandat protégé…

Martine Courgnaud – Del Ry