Quelle est l’étendue du droit à indemnisation en cas de résiliation pour motif d’intérêt général ?

Publié le 24 septembre 2018 à 8h55 - par

L’acheteur peut mettre fin, à tout moment, à l’exécution des prestations pour un motif d’intérêt général. Ce pouvoir de résiliation unilatérale est expressément prévu par tous les cahiers des clauses administratives générales qui ouvrent un droit à indemnisation du titulaire.

Quelle est l'étendue du droit à indemnisation en cas de résiliation pour motif d'intérêt général ?

L’indemnité couvre les pertes subies et le manque à gagner liés à l’absence d’exécution du marché dans sa totalité. Toutefois, les documents contractuels particuliers peuvent comporter une clause limitant l’indemnisation du cocontractant en cas de résiliation unilatérale.

En principe, une résiliation pour motif d’intérêt général ouvre un droit à indemnité

Dans l’affaire soumise à la Cour administrative d’appel, un pouvoir adjudicateur avait résilié unilatéralement, sans faute du titulaire, un marché de transport sanitaire. Le juge commence par rappeler que les principes généraux applicables aux contrats administratifs permettent aux personnes publiques, sans qu’aucune disposition législative ou réglementaire, non plus qu’aucune stipulation contractuelle ne le prévoient, de résilier un contrat pour un motif d’intérêt général. Dans ce cas, le cocontractant de la personne publique a droit, en principe, à une indemnité couvrant les dépenses engagées pendant l’exécution du contrat et réparant le manque à gagner subi jusqu’à la fin des prestations initialement prévues au marché. Les cahiers des clause administratives générales fixent un montant de 5 % des prestations restant à réaliser auquel s’ajoute la part des frais et investissement éventuellement engagés.

Rien n’interdit de prévoir une indemnisation inférieure au montant du préjudice subi par le titulaire

Toutefois, les principes généraux du droit des contrats publics ne s’opposent pas à ce que les stipulations contractuelles limitent ou même écartent le droit à indemnisation du cocontractant en cas de résiliation du contrat par la personne publique. En l’espèce, le cahier des clauses administratives particulières du marché stipulait que le pouvoir adjudicateur pouvait résilier unilatéralement le marché « sans que le titulaire ne puisse prétendre à une indemnisation proportionnelle au montant du contrat restant à exécuter ». Selon la Cour, par cette clause, les parties au contrat n’ont pas entendu remettre en cause le droit du titulaire au paiement de ses dépenses qui ont été nécessaires aux prestations qu’il a déjà exécutées.

Par contre, cette stipulation a entendu écarter le droit à indemnisation de la société au titre du manque à gagner et des autres dépenses (frais généraux, loyers des avions) afférente à la période de vingt-deux mois allant de la résiliation du contrat jusqu’à la date initialement convenue de cessation des prestations. En conséquence, la Cour annule le jugement du tribunal administratif qui avait mis à la charge de l’acheteur une somme de plus d’un million d’euros au titre des préjudices subis par le titulaire pour la période allant de la résiliation du marché jusqu’à la fin normale de celui-ci.

Dominique Niay

Texte de référence : CAA de Bordeaux, 5e chambre – formation à 3, 28 août 2018, n° 16BX00716, Inédit au recueil Lebon