Titulaire d’une maîtrise en administration économique et sociale (AES) collectivités locales et d’un diplôme universitaire collectivités locales à l’Université de Savoie, Pascal Bellemin est actuellement directeur des finances, du pilotage de gestion et des affaires juridiques au Département de la Savoie. L’une de ses priorités concerne une meilleure prise en compte des enjeux du développement durable dans les modes de comptabilité publique.
Vous êtes le nouveau président de l’AFIGESE, et ce pour trois ans. Quelles sont vos priorités ?
L’objectif est de travailler à la définition d’outils prenant en compte les enjeux du développement durable, et de bonnes pratiques en matière managériale, afin notamment d’intégrer les implications des évolutions récentes comme le télétravail. Nous aurons aussi à mieux définir une offre adaptée aux enjeux des petites collectivités et à poursuivre la régionalisation du réseau de l’association, dans le but d’organiser des événements régionaux ou départementaux. D’autres chantiers se profilent, comme le déploiement du cadre déontologique défini au cours du mandat précédent ; le renforcement des coopérations avec le monde universitaire et les autres associations professionnelles relatives à d’autres domaines d’activité des professionnels territoriaux, et enfin le développement d’une approche internationale des fonctions financières et de pilotage.
Le rôle des « financiers » est capital dans la réussite de la transition écologique…
Les budgets se généralisent. Dans le contrôle de gestion, il est nécessaire de mieux intégrer la performance environnementale. C’est un débat qui semble destiner aux spécialistes de la comptabilité publique. Et pourtant, à l’heure où la transition écologique est au cœur de l’action publique locale, la question des outils mobilisables pour mesurer la performance des politiques publiques sur ces enjeux se pose à tous avec acuité. L’évaluation climatique des budgets et les budgets carbone ont apporté une première réponse. Les comptabilités écologiques dites « multi-capitaux », dont la Comptabilité Adaptée au Renouvellement de l’Environnement, dite CARE, se proposent d’aller plus loin, en intégrant directement dans les bilans les dettes contractées à l’égard des capitaux naturels par l’activité humaine, pour « compter ce qui compte vraiment ». Nous sommes aussi concernés par l’évaluation des politiques publiques, par le besoin de citoyenneté active exprimée par nos compatriotes et que nous devons mieux prendre en compte. Comment les projets se financent à l’échelle d’un territoire, à l’heure où la fiscalité locale est à bout de souffle ? Quel est le lien fiscal que les citoyens entretiennent avec leur territoire ? Ce lien se définit-il comme une forme de citoyenneté ? Vous le voyez, les problématiques financières suscitent de nombreux débats.
Pourquoi vouloir renforcer le lien avec le monde universitaire ?
Dans l’optique d’un échange plus marqué avec les praticiens, plus particulièrement sur le volet management afin d’éclairer nos adhérents sur ces processus, validés par des sociologues du travail par exemple. Nous souhaitons aussi nous ouvrir à l’international, pour nous enrichir d’autres manières de faire, accompagner les petites collectivités, qui ne peuvent s’appuyer sur des compétences suffisamment fortes dans les domaines qui sont les nôtres. Nous avons une habilitation pour former les fonctionnaires mais aussi les élus, sans doute que certaines adjoints aux finances de petites communes éprouveront-ils le besoin de se former pour faire face aux défis que je vous ai décrits. L’AFIGESE compte à ce jour 800 adhérents. L’association, qui a fêté ses vingt ans, a connu un fort développement ces derniers mois. C’est sans doute lié au fait que les départements et les régions ont perdu le lien fiscal avec leur territoire, du fait de la disparition de la TH. Le pouvoir fiscal des collectivités n’a fait que se réduire, ce qui pose la question de la légitimité de l’action des élus.
Propos recueillis par Stéphane Menu