L’arrêt Martin n’est pas encore tout à fait mort

Publié le 28 janvier 2015 à 0h00 - par

Certes très amputé, l’arrêt Martin s’applique aux contrats de droit privé.

Les actes détachables des contrats privés peuvent toujours être attaqués

L’onde de choc de l’arrêt du Conseil d’État, département de Tarn-et-Garonne, d’avril 2014 ne doit pas faire oublier que les recours contentieux contre les actes détachables des contrats n’ont pas été totalement éradiqués du contentieux administratif. Il est vrai que, désormais, les actes détachables des contrats administratifs ne sont plus attaquables, et que seul un recours de plein contentieux contre les contrats, d’ailleurs très encadré et soumis à des conditions très restrictives, est accessible au tiers.

Mais dans la mesure où le contentieux contractuel des contrats de droit privé n’est, évidemment, pas accessible au juge administratif, les tiers peuvent toujours, y compris après l’arrêt Tarn-et-Garonne demander devant ce juge l’annulation par la voie du recours pour excès de pouvoir des actes détachables à savoir, pour l’essentiel, la délibération qui autorise le maire à signer ainsi que l’acte de signer lui-même.

Le Conseil d’État, par un arrêt du 29 décembre 2014, n° 372477, apporte d’utiles précisions sur la mise en œuvre de ce recours.

L’arrêt Commune d’Uchaux donne le mode d’emploi du recours pour excès de pouvoir contre les actes détachables des contrats de droit privé

De fait, il s’agit de faire connaître à l’administration les obligations qui sont à sa charge lorsque le juge est conduit à annuler l’acte détachable. Selon le Conseil d’État : « l’annulation d’un acte détachable d’un contrat de droit privé n’impose pas nécessairement à la personne publique partie au contrat de saisir le juge du contrat afin qu’il tire les conséquences de cette annulation… Il appartient au juge de l’exécution de rechercher si l’illégalité commise peut être régularisée et, dans l’affirmative, d’enjoindre à la personne publique de procéder à cette régularisation… Lorsque l’illégalité commise ne peut être régularisée, il lui appartient d’apprécier si, eu égard à la nature de cette illégalité et à l’atteinte que l’annulation ou la résolution du contrat est susceptible de porter à l’intérêt général, il y a lieu d’enjoindre à la personne publique de saisir le juge du contrat afin qu’il tire les conséquences de l’annulation de l’acte détachable ».

On rappelle ici que le « juge du contrat » est ici le juge judiciaire. Il appartient donc dans cette hypothèse à l’administration de saisir ce juge pour « qu’il en tire les conséquences » sur le contrat. Bien entendu, dans la mesure où le juge régulateur n’est pas le Conseil d’État, mais la Cour de cassation, il est difficile de prévoir quelles conséquences le juge judiciaire tirera de cette saisine. D’autant plus que la décision dépendra, en partie, de la manière dont l’administration saisira le juge, et donc de sa plus ou moins forte pugnacité…

Voilà une conséquence, par forcément très heureuse, du dualisme juridictionnel. Mais, comme on dit, « c’est une autre histoire ».

Laurent Marcovici


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