Un principe de sécurité juridique
Indépendamment des actions dont les parties au contrat disposent devant le juge du contrat et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat, tout concurrent évincé de la conclusion d’un contrat administratif est recevable à former devant ce juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses, qui en sont divisibles, assorti, le cas échéant, de demandes indemnitaires. Le recours de pleine juridiction contestant la validité d’un contrat ou de certaines de ses clauses, qui en sont divisibles doit être exercé dans un délai de deux mois. Ce délai ne peut commencer à courir que si ces mesures indiquent au moins l’objet du contrat et l’identité des parties contractantes ainsi que les coordonnées, postales ou électroniques, du service auprès duquel le contrat peut être consulté.
Cependant, selon le Conseil d’État le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que la validité d’un contrat administratif puisse être contestée indéfiniment par les tiers au contrat. Dans le cas où, faute que tout ou partie des mesures de publicité appropriées aient été accomplies, le délai de recours contentieux de deux mois n’a pas commencé à courir, le recours en contestation de la validité du contrat ne peut être présenté au-delà d’un délai raisonnable à compter de la date à laquelle il est établi que le requérant a eu connaissance, par une publicité incomplète ou par tout autre moyen, de la conclusion du contrat, c’est-à-dire de son objet et des parties contractantes. En règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable.
Une application de la jurisprudence « Czabaj »
Le Conseil d’État étend l’application de sa décision de principe « Czabaj » au recours en contestation de la validité d’un contrat administratif. Faute de mesures de publicité faisant courir le délai de recours de deux mois, celui-ci doit donc être exercé dans un « délai raisonnable » d’un an, à compter du moment où le requérant a eu connaissance de la conclusion du contrat.
En l’espèce, la société requérante, concurrente évincée d’un marché public dont l’avis d’attribution avait été publié le 9 octobre 2010, a introduit un recours en contestation de la validité du contrat le 4 juin 2012. Si le délai de deux mois n’était pas opposable à ce recours en raison en l’absence de publicité suffisante des modalités de consultation du contrat, le Conseil d’État a néanmoins jugé que ce recours était tardif, dès lors qu’il avait été introduit au-delà d’un délai d’un an à compter de la publication de l’avis d’attribution du contrat.
Texte de référence : Conseil d’État, 7e – 2e chambres réunies, 19 juillet 2023, n° 465308