Le recours dirigé contre une sentence arbitrale dans un litige, né de l’exécution ou de la rupture d’un contrat administratif, ressortit à la compétence de la juridiction administrative. Au sein de la juridiction administrative, le Conseil d’État est compétent pour connaître des recours dirigés contre une telle sentence arbitrale.
Il appartient au seul juge administratif d’apprécier la régularité d’une convention d’arbitrage
Le recours dirigé contre une sentence arbitrale rendue en France dans un litige né de l’exécution ou de la rupture d’un contrat administratif relève de la compétence de la juridiction administrative. Au sein de la juridiction administrative, le Conseil d’État est compétent pour connaître des recours dirigés contre une telle sentence arbitrale, en application de l’article L. 321-2 du Code de justice administrative (CJA). Lorsqu’il est saisi d’un tel recours, il appartient au Conseil d’État de s’assurer, le cas échéant d’office, de la licéité de la convention d’arbitrage, qu’il s’agisse d’une clause compromissoire ou d’un compromis. Ne peuvent en outre être utilement soulevés devant lui que des moyens tirés, d’une part, de ce que la sentence a été rendue dans des conditions irrégulières et, d’autre part, de ce qu’elle est contraire à l’ordre public. S’agissant de la régularité de la procédure, en l’absence de règles procédurales applicables aux instances arbitrales relevant de la compétence de la juridiction administrative, une sentence arbitrale ne peut être regardée comme rendue dans des conditions irrégulières que si le tribunal arbitral s’est déclaré à tort compétent ou incompétent, s’il a été irrégulièrement composé, notamment au regard des principes d’indépendance et d’impartialité, s’il n’a pas statué conformément à la mission qui lui avait été confiée, s’il a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure ou s’il n’a pas motivé sa sentence.
Un contrôle sur le fond par le Conseil d’État pour s’assurer que la sentence arbitrale n’est pas contraire à l’ordre public
S’agissant du contrôle sur le fond, une sentence arbitrale est contraire à l’ordre public lorsqu’elle fait application d’un contrat dont l’objet est illicite ou entaché d’un vice d’une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, lorsqu’elle méconnaît des règles auxquelles les personnes publiques ne peuvent déroger, telles que notamment l’interdiction de consentir des libéralités, d’aliéner le domaine public ou de renoncer aux prérogatives dont ces personnes disposent dans l’intérêt général au cours de l’exécution du contrat, ou lorsqu’elle méconnaît les règles d’ordre public du droit de l’Union européenne. À l’issue de ce contrôle, le Conseil d’État, s’il constate l’illégalité du recours à l’arbitrage, notamment du fait de la méconnaissance du principe de l’interdiction pour les personnes publiques de recourir à l’arbitrage sauf dérogation prévue par des dispositions législatives expresses ou, le cas échéant, des stipulations de conventions internationales régulièrement incorporées dans l’ordre juridique interne, prononce l’annulation de la sentence arbitrale et décide soit de renvoyer le litige au tribunal administratif compétent pour en connaître, soit d’évoquer l’affaire et de statuer lui-même sur les réclamations présentées devant le collège arbitral. S’il constate que le litige est arbitrable, il peut rejeter le recours dirigé contre la sentence arbitrale ou annuler, totalement ou partiellement, celle-ci. Il ne peut ensuite régler lui-même l’affaire au fond que si la convention d’arbitrage l’a prévu ou s’il est invité à le faire par les deux parties. À défaut de stipulation en ce sens ou d’accord des parties sur ce point, il revient à celles-ci de déterminer si elles entendent de nouveau porter leur litige contractuel devant un tribunal arbitral, à moins qu’elles ne décident conjointement de saisir le tribunal administratif compétent.
Texte de référence : Conseil d’État, 7e – 2e chambres réunies, 30 juillet 2024, n° 485583, Publié au recueil Lebon