Renforcer le rôle des maires pour adapter les maisons au retrait-gonflement des sols argileux

Publié le 31 octobre 2023 à 11h00 - par

Instance de pilotage nationale, renforcement du rôle des maires, expériences pilotes… Le député Vincent Ledoux suggère de lancer un « chantier massif » d’adaptation des maisons individuelles, sur les territoires impactés par le retrait-gonflement des argiles. Le phénomène touche près de 5 000 communes et devrait s’aggraver avec le réchauffement climatique.

Renforcer le rôle des maires pour adapter les maisons au retrait-gonflement des sols argileux
© Par bildlove - stock.adobe.com

Façades fissurées, affaissement des sols, portes et fenêtres condamnées… Le retrait-gonflement des argiles (RGA) impacte plus de 10 millions de maisons individuelles sur près de la moitié du territoire (48 %), dont 3,3 millions sont plus fortement exposées. Sous le bâtiment, le sol argileux absorbe l’eau, gonfle et s’assouplit ; en séchant, il se contracte comme une éponge et perd en élasticité : si la construction n’est pas assez rigide, elle se contracte. Les désordres, pris en compte dans les arrêtés de catastrophe naturelle (Cat-Nat), sont à l’origine de procédures longues et incertaines auprès des assureurs. Ces cinq dernières années, 70 % de la sinistralité Cat-Nat est due à la sécheresse pour un coût de 1,5 milliard d’euros. Or, à un certain seuil, le montant des travaux et le bilan carbone sont tels qu’indemniser une réparation à l’identique devient aberrant. Mieux vaudrait alors envisager la rénovation dans une approche globale.

« Il n’y a pas eu la même détermination publique et politique à l’amorçage que pour d’autres catastrophes telles que les inondations ou les séismes », déplore le député du Nord Vincent Ledoux dans un rapport remis début octobre à la Première ministre. Convaincu qu’il faut « un électrochoc », il demande au Gouvernement de lancer un plan massif qui renforcerait notamment le rôle du maire, afin d’adapter « le stock de maisons anciennes et vulnérables » dans les territoires les plus à risque, en créant un « réflexe RGA » sur le territoire. Une instance de pilotage nationale « légère mais de haut niveau » (commission interministérielle ou haut commissariat) pourrait animer un réseau territorial et coordonner les actions.

Tout en conservant au propriétaire sinistré sa liberté, il faudrait selon le député que le maire puisse lui proposer, soit de coordonner les aides pour adapter l’ensemble du logement, soit d’envisager de transformer sa maison en projet d’intérêt collectif. La collectivité achèterait alors le bien ou l’échangerait contre un à-valoir sur un des futurs appartements réalisés et un relogement pendant la durée de l’opération. Le bien pourrait ensuite être cédé à un bailleur social qui aurait pris le temps de monter l’opération ou d’y développer un projet d’intérêt général. Outre l’intérêt d’adapter le bâti aux risques liés aux événements naturels (fondations plus profondes, conception et équipements adaptés…), cette mutation foncière permettrait aussi de densifier, lorsque le foncier sera plus rare avec le zéro artificialisation nette (ZAN). Sans compter que cela fournirait parfois une solution aux sinistrés de communes non reconnues CatNat.

Les maires doivent aussi pouvoir intégrer le RGA dans les documents d’urbanisme. Dans les zones où le risque est le plus important, une orientation d’aménagement et de programmation (OAP) RGA thématique favoriserait un bâti résilient, en subordonnant les autorisations d’urbanisme à la réalisation d’un diagnostic de vulnérabilité au RGA approfondi, y compris en cas de réhabilitation. Par ailleurs, il conviendrait dès maintenant de tendre vers une mise en cohérence des documents d’urbanisme avec le RGA.

Vincent Ledoux préconise d’expérimenter, auprès de collectivités volontaires, des opérations de prévention accompagnées par les services déconcentrés de l’État, en lien avec les professionnels (assureurs, experts…) et les institutions compétentes (Cerema, BRGM, CSTB, AQC*…). L’idée : évaluer plus finement les risques sur le territoire, reporter les conséquences dans des documents d’urbanisme ou de gestion des risques et sensibiliser les habitants. Le rapport recommande aussi d’améliorer le processus de reconnaissance de l’état Cat-Nat. En particulier, en aidant les communes les plus à risque à se doter de stations de mesure météo labellisées (coût : entre 3 500 et 5 000 euros HT) ; les données recueillies permettraient d’affiner la décision de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle de la commune.

Marie Gasnier

* Bureau de recherche géologique et minière, Centre scientifique et technique du bâtiment, Agence qualité construction


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