Propulsée d’un grand ministère (Travail, Santé, Solidarités) à un autre, la chiraquienne Catherine Vautrin, ex-ministre de Nicolas Sarkozy, hérite du portefeuille clé des transports, en sus du commerce et de l’artisanat, auparavant sous la houlette des ministères de la Transition écologique et de Bercy.
Réputée fine connaisseuse du monde feutré des collectivités, Mme Vautrin a notamment dirigé la communauté urbaine de Reims pendant dix ans.
Chargée des collectivités, elle remplace l’ex-élue toulousaine Dominique Faure qui n’était que ministre déléguée, qui plus est sous une double tutelle ministérielle (Intérieur et Transition écologique).
Depuis le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, les liens sont notoirement tendus entre les gouvernements successifs et les associations d’élus.
Dernier épisode en date : l’accusation faite par Bercy aux collectivités de dépenser sans compter et de plomber le déficit public.
Pressé d’agir face à la progression du vote RN aux dernières élections, le gouvernement entend éteindre le feu avant les municipales de 2026, et renouer pour ce faire avec les élus.
« Je sais les difficultés auxquelles sont confrontés les élus locaux (…). Je vais m’adresser à chacune et chacun de ces élus pour leur promettre des échanges toujours francs (…), bienveillants, et une attention toute particulière à leurs capacités et leurs moyens d’agir », a déclaré lundi 23 septembre 2024 Catherine Vautrin en guise de main tendue, lors de la passation de pouvoirs.
« Je pense que partir du terrain et remonter, c’est très attendu, et (…) c’est ma feuille de route », a-t-elle ajouté devant la presse, assurant « adorer le terrain ».
Sous sa tutelle, la sénatrice bretonne Françoise Gatel (UDI), à la personnalité bien affirmée, hérite du portefeuille de la ruralité, qui regroupe également le commerce et l’artisanat.
« Il y a toute une partie de notre territoire (…) où les gens se sentent, surtout les jeunes, assignés à résidence et un peu oubliés. Il faut donc qu’on renoue avec l’espérance dans les territoires », a déclaré Mme Gatel devant la presse.
« Élus de province »
Saluant la « brochette » de nombreux élus locaux qui composent ce gouvernement, parmi lesquels de nombreux maires, la centriste revendique une « culture du Comment on fait pour que ça marche ? ».
Le passé de conseiller général de Michel Barnier, qui a recruté un président de conseil départemental au portefeuille des transports, a certainement pesé.
« Il y a pas mal d’élus de province et c’est plutôt bon signe car les collectivités sont enfin reconnues dans leur rôle de gestionnaires de services publics et d’investisseurs publics », s’est réjoui Franck Leroy, président SE de la région Grand Est.
Même tonalité du côté de l’Association des Maires de France (AMF). « Je pense qu’il y a une ouverture et une sensibilité forte aux questions territoriales », a réagi Philippe Laurent, maire UDI de Sceaux et vice-président de l’association. Il espère toutefois que les ministres auront « suffisamment d’autorité sur leurs administrations » pour « créer un lien permanent avec les élus ».
Les intercommunalités, par la voix de leur président Sébastien Martin (LR), n’entendent toutefois pas « donner d’emblée un satisfecit à Catherine Vautrin », estimant qu’« un partenariat, ça se construit » et disant préférer « attendre la feuille de route ».
Seule voix discordante, le président de Départements de France François Sauvadet (UDI) rappelle que Catherine Vautrin a décidé, dans son précédent ministère, « l’extension du Ségur qui a valu 170 millions de dépenses en plus pour les départements, sans le moindre coup de fil ».
« Je suis particulièrement vigilant à cette petite musique venant de Bercy selon laquelle les collectivités vont être appelées à participer à la résorption du déficit alors que 30 % des départements sont déjà en grande difficulté », a-t-il prévenu.
Chez les maires ruraux, qui représentent « 88 % du territoire et 33 % de la population », l’apriori est en revanche « plutôt favorable ».
« Les gouvernements successifs d’Emmanuel Macron avaient un regard issu d’une concentration en Île-de-France », reconnaît leur président Michel Fournier, pour qui l’avenir passe « par les territoires ruraux », qui « concentrent l’espace, l’eau, le bois, les énergies renouvelables ».
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