Si une entreprise en liquidation judiciaire ne peut obtenir de marchés publics, le candidat en redressement judiciaire ne peut passer la barrière des candidatures que si la période d’observation fixée par le jugement du tribunal de commerce couvre la durée prévisionnelle d’exécution du marché. Mais qu’en est-il de la situation d’un gérant condamné pour délit de banqueroute dans le cadre d’une procédure de liquidation ou de redressement judiciaire ?
Le délit de condamnation pour banqueroute n’est pas un cas d’exclusion de la commande publique
Dans l’affaire soumise en cassation au Conseil d’État, un groupement avait Ă©tĂ© Ă©cartĂ© de la passation d’un marchĂ© de maĂ®trise d’œuvre au motif de la condamnation de son gĂ©rant pour banqueroute, condamnation inscrite Ă son casier judiciaire. Selon le Code du commerce (art. L. 654-2), la banqueroute est une infraction (dĂ©lit pĂ©nal), consistant pour un commerçant, artisan, agriculteur, dirigeant de sociĂ©tĂ© commerciale, en des faits de gestion frauduleuse alors qu’il est en Ă©tat de cessation des paiements. L’auteur et l’Ă©ventuel complice d’une banqueroute s’exposent chacun Ă une peine maximale de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.
Mais la condamnation pour banqueroute ne justifie pas Ă elle seule l’exclusion de la commande publique. Selon la Haute assemblĂ©e, « ni l’article 45 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchĂ©s publics, qui dĂ©finit les interdictions de soumissionner obligatoires et gĂ©nĂ©rales, ni l’article 48 de cette ordonnance, qui énumère les interdictions de soumissionner facultatives, ni aucun autre texte ne prĂ©voient que la condamnation pour banqueroute constitue un motif d’exclusion de la procĂ©dure de passation des marchĂ©s publics ».
Une faute grave ne justifie pas automatiquement le rejet de la candidature
Les dispositions de la directive « marchĂ©s publics » du 26 fĂ©vrier 2014 « n’imposent pas de façon inconditionnelle d’exclure de la procĂ©dure de passation d’un marchĂ© public l’opĂ©rateur Ă©conomique ayant commis une faute professionnelle grave ».
En consĂ©quence, le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s du tribunal administratif n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que l’acheteur ne pouvait pas se prĂ©valoir, comme base lĂ©gale des dĂ©cisions contestĂ©es, de l’article 57 de la directive du 26 fĂ©vrier 2014 et ainsi soutenir que la condamnation pour banqueroute du gĂ©rant constituait une faute professionnelle grave remettant en cause l’intĂ©gritĂ© du candidat de nature Ă justifier l’exclusion du groupement de la procĂ©dure de passation du marchĂ©.
Dominique Niay
Texte de rĂ©fĂ©rence : Conseil d’État, 7e – 2e chambres rĂ©unies, 31 octobre 2017, n° 410496, InĂ©dit au recueil Lebon