Une modification d’un groupement d’entreprises peut-elle s’effectuer par avenant ?

Publié le 22 juin 2022 à 8h30 - par

En cours d’exécution, la question peut se poser de la légalité de la modification de la composition d’un groupement d’opérateurs économiques titulaire d’un marché.

Une modification d'un groupement d'entreprises peut-elle s'effectuer par avenant ?

Dans une affaire soumise au Conseil d’État, ce dernier devait se prononcer sur la légalité d’un avenant modifiant un groupement d’entreprises ou, au contraire, sur la nécessité de conclure un nouveau marché soumis à de nouvelles obligations de publicité et de mise en concurrence.

Un changement de la composition d’un groupement ne peut être conclu sans nouvelle mise en concurrence

À l’issue d’un appel d’offres ouvert, le groupe hospitalier du sud de l’Île-de-France a conclu un marché d’assurance responsabilité civile avec un groupement conjoint d’assureurs lequel n’est pas doté de la personnalité juridique. Pendant l’exécution du contrat, l’un des membres du groupement a fait part de son intention de résilier le marché. Le groupe hospitalier a alors signé un avenant substituant ce membre par un nouvel opérateur pour la durée restant à courir du marché.

La société hospitalière d’assurances mutuelles (SHAM), concurrent évincé lors de l’attribution du marché initial, a formé un référé contractuel devant le juge des référés du tribunal administratif de Melun qui a rejeté sa demande d’annulation de l’avenant par une ordonnance rendue le 29 novembre 2021. Saisi en cassation, le Conseil d’État a d’abord admis la compétence du juge du référé contractuel pour « statuer sur un avenant à un contrat », mais uniquement lorsque « la conclusion d’un tel accord est soumise aux règles de publicité et de concurrence qui s’appliquent » aux contrats de la commande publique, étendant ainsi la faculté de recours au fond d’un tiers contre des modifications conventionnelles au référé contractuel.

Sur le fond, le Conseil d’État précise que « la substitution, au cours de l’exécution d’un marché passé avec un groupement d’opérateurs économiques, lequel n’est pas doté de la personnalité juridique, d’un ou de plusieurs des membres de ce groupement par un ou plusieurs autres opérateurs économiques constitue une modification du titulaire du marché qui ne peut valablement avoir lieu sans mise en concurrence que dans les cas prévus par l’article L. 2194-1 du Code de la commande publique (CCP) et précisés par les articles R. 2194-5, R. 2194-6 et R. 2194-7 du même Code ».

En l’espèce, les conditions alternatives de l’article R. 2194-6 n’étaient pas remplies dès lors, d’une part, que la modification de la composition du groupement titulaire n’a pas eu lieu en application d’une clause de réexamen ou d’une option et, d’autre part, qu’elle n’est pas davantage intervenue à la suite d’une opération de restructuration dans le cas d’une cession du marché. La modification sans nouvelle procédure de mise en concurrence n’était donc pas possible.

La modification du prix du marché est possible si elle est d’un faible montant

Le Conseil d’État juge que cette modification est, en l’espèce, autorisée sans mise en concurrence par les dispositions de l’article R. 2194-8 dès lors que l’avenant litigieux procède à une augmentation des prix du marché de 74 610,60 euros hors taxes, ce qui représente « une augmentation de 5,01 % du montant total du marché sur les trois années d’exécution », soit un montant inférieur au seuil européen applicable aux marchés de services et de fournitures de 215 000 euros hors taxes et inférieur à 10 % du montant total du marché. La Haute assemblé ne semble conditionner une telle modification du prix du marché à aucune autre condition que celle prévue à l’article R. 2194-8 pour les modifications de faible montant, lequel dispose au demeurant qu’une modification sur ce fondement peut être autorisée « sans qu’il soit nécessaire de vérifier si les conditions prévues à l’article R. 2194-7 (sur les modifications substantielles prohibées) sont remplies ».

Texte de référence : Conseil d’État, 7e – 2e chambres réunies, 16 mai 2022, n° 459408