La retraite des fonctionnaires territoriaux : enjeux et perspectives

Publié le 9 octobre 2025 à 10h20 - par

Selon l’étude publiée par Fipeco le 16 septembre 2025, le système de retraite des fonctionnaires, en particulier dans la fonction publique territoriale (FPT), est au cœur des préoccupations des responsables des ressources humaines. Sa complexité, ses réformes récentes et ses différences avec le secteur privé exigent une maîtrise fine pour accompagner les agents dans leur parcours professionnel et préparer leur transition vers la retraite.

La retraite des fonctionnaires territoriaux : enjeux et perspectives
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Depuis la réforme de 2023, qui a progressivement relevé l’âge légal de départ à 64 ans, les enjeux oscillent entre soutenabilité budgétaire, équité avec le secteur privé et reconnaissance des contraintes propres aux métiers publics.

Caractéristiques et fonctionnement du régime de retraite des fonctionnaires territoriaux

Le régime des retraites de la fonction publique territoriale est placé sous la responsabilité de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). Établissement public doté d’un conseil d’administration où siègent à la fois des représentants des employeurs et des agents, il garantit une gouvernance partagée. La gestion technique est confiée à la Caisse des dépôts et consignations, qui applique les règles de la sécurité sociale en matière de pensions. La pension des fonctionnaires territoriaux est calculée à partir du traitement indiciaire brut perçu au cours des six derniers mois de carrière. Pour une carrière complète, elle correspond à 75 % de cette base de référence. Toutefois, les primes, qui représentent en moyenne près de 30 % de la rémunération, ne sont pas intégrées dans ce calcul, sauf à travers le dispositif de retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP). Cette exclusion a pour conséquence de réduire sensiblement le montant de la pension par rapport au revenu d’activité réel, en particulier pour les catégories d’agents dont la rémunération repose fortement sur les primes. Certaines catégories dites « actives » ou « super-actives », telles que les sapeurs-pompiers ou les policiers municipaux, bénéficient de règles dérogatoires permettant un départ anticipé, en reconnaissance de la pénibilité ou du caractère particulier de leurs missions.

Le financement du régime repose essentiellement sur les cotisations sociales. Les agents territoriaux versent une retenue salariale, prélevée directement sur leur traitement indiciaire brut, qui s’élève à un peu plus de 11 % en 2025. Cette contribution constitue la part directement assumée par les fonctionnaires dans le financement de leurs droits. Elle est complétée par une contribution employeur qui atteindra 43,65 % du traitement brut en 2028. L’augmentation de cette charge représente un défi budgétaire majeur pour les collectivités locales, contraintes d’intégrer cet effort dans leurs équilibres financiers. Contrairement au régime de l’État, où les taux employeurs sont ajustés pour garantir en permanence l’équilibre, la CNRACL enregistre un déficit structurel qui tend à s’accentuer au fil des années.

Enjeux financiers, perspectives et comparaison avec le secteur privé

En 2024, la CNRACL a accusé un déficit de 3 milliards d’euros. Les projections à l’horizon 2045 font apparaître un solde négatif durable, estimé à 0,3 % du PIB. Cette évolution témoigne d’une fragilité de long terme, accentuée par le vieillissement démographique et la stagnation des effectifs territoriaux. La charge de financement pèsera donc davantage sur les employeurs publics, dans un contexte de ressources budgétaires contraintes.

Les écarts entre secteur public et privé s’illustrent également à travers la prise en compte des primes. Avec la mise en œuvre du RIFSEEP, la situation indemnitaire s’est complexifiée et la diversité des dispositifs rend les effets variables selon les postes occupés. Les primes ne sont toutefois intégrées que partiellement dans la retraite, par le biais de la Retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP), dont l’assiette reste plafonnée. Cela limite leur prise en compte par rapport au régime général, où elles sont incluses dans le calcul de la pension. Malgré une convergence progressive des règles, des écarts notables subsistent. Le calcul des pensions repose sur les six derniers mois de traitement dans la fonction publique, contre les vingt-cinq meilleures années dans le secteur privé.

Enfin, l’existence de catégories actives permet à certains fonctionnaires de partir plus tôt à la retraite, avantage qui n’existe pas dans les mêmes proportions pour les salariés du privé. Ces différences engendrent des effets contrastés : les cadres supérieurs du public bénéficient souvent de pensions plus élevées, tandis que certains agents intermédiaires auraient été avantagés par les règles du secteur privé. Ces particularités obligent les responsables RH territoriaux à adopter une approche individualisée dans l’accompagnement des agents. Les simulations de droits deviennent un outil indispensable pour anticiper les conséquences des réformes et éclairer les choix de fin de carrière. Par ailleurs, l’augmentation progressive de la contribution employeur doit être intégrée dans la gestion prévisionnelle des effectifs et des masses salariales, sous peine de fragiliser l’équilibre budgétaire des collectivités.

La retraite des fonctionnaires territoriaux illustre un équilibre délicat entre soutenabilité financière et reconnaissance des spécificités du service public. Pour les responsables des ressources humaines de la fonction publique territoriale, la connaissance précise des mécanismes, des perspectives financières et des particularités statutaires constitue un levier essentiel pour accompagner les agents dans leurs parcours et anticiper les impacts organisationnels et budgétaires des réformes à venir.

Source : Les retraites des fonctionnaires, Fipeco, 16 septembre 2025


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