Comment fixer le montant de l’indemnisation d’un candidat privé d’une chance sérieuse d’obtenir le marché ?

Publié le 12 novembre 2024 à 14h30, mis à jour le 12 novembre 2024 à 14h30 - par

Un soumissionnaire évincé à l’issue d’une procédure irrégulière dispose d’un droit à indemnisation si celui-ci a été privé d’une chance sérieuse d’obtenir le marché.

Comment fixer le montant de l'indemnisation d'un candidat privé d'une chance sérieuse d'obtenir le marché ?
© Par Laurence Soulez - stock.adobe.com

Selon le Conseil d’État, le manque à gagner d’une entreprise candidate à l’attribution d’un contrat public est évalué par la soustraction du total du chiffre d’affaires non réalisé de l’ensemble des charges variables et de la quote-part des coûts fixes qui aurait été affectée à l’exécution du marché si elle en avait été titulaire.

Une indemnisation de la chance sérieuse qui prend en compte le manque à gagner

Lorsqu’un candidat à l’attribution d’un contrat public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de la procédure d’attribution, il appartient au juge de vérifier d’abord si l’entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le contrat. Dans l’affirmative, l’entreprise n’a droit à aucune indemnité. Dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu’elle a engagés pour présenter son offre. Il convient ensuite de rechercher si l’entreprise avait des chances sérieuses d’emporter le contrat. Dans un tel cas, l’entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu’ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l’offre qui n’ont donc pas à faire l’objet, sauf stipulation contraire du contrat, d’une indemnisation spécifique. D’autre part, lorsqu’un candidat à l’attribution d’un contrat public demande la réparation du préjudice qu’il estime avoir subi du fait de l’irrégularité ayant, selon lui, affecté la procédure ayant conduit à son éviction, il appartient au juge, si cette irrégularité et si les chances sérieuses de l’entreprise d’emporter le contrat sont établies, de vérifier qu’il existe un lien direct de causalité entre la faute en résultant et le préjudice dont le candidat demande l’indemnisation. Il lui incombe aussi d’apprécier dans quelle mesure ce préjudice présente un caractère certain, en tenant compte notamment, s’agissant des contrats dans lesquels le titulaire supporte les risques de l’exploitation, de l’aléa qui affecte les résultats de cette exploitation et de la durée de celle-ci.

Enfin, dans le cas où le contrat a été résilié par la personne publique, il y a lieu, pour apprécier l’existence d’un préjudice directement causé par l’irrégularité et en évaluer le montant, de tenir compte des motifs et des effets de cette résiliation, afin de déterminer quels auraient été les droits à indemnisation du concurrent évincé si le contrat avait été conclu avec lui et si sa résiliation avait été prononcée pour les mêmes motifs que celle du contrat irrégulièrement conclu.

Une indemnisation qui prend en compte en partie les coûts fixes

Le manque à gagner de l’entreprise est évalué par la soustraction du total du chiffre d’affaires non réalisé de l’ensemble des charges variables et de la quote-part des coûts fixes affectée à l’exécution du marché. La Cour administrative d’appel de Marseille a jugé qu’il n’y avait pas lieu, pour évaluer le manque à gagner, de tenir compte des coûts fixes, sauf à démontrer l’existence de coûts fixes supplémentaires induits par l’obtention du marché. En subordonnant ainsi la prise en compte des coûts fixes dans le calcul du manque à gagner à l’existence de frais supplémentaires induits par l’obtention du marché, alors qu’il lui appartenait de soustraire la part des coûts fixes de la société requérante qui aurait été affectée à l’exécution du marché si elle en avait été titulaire, la Cour administrative d’appel a commis une erreur de droit. Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que la métropole Aix-Marseille Provence est fondée à demander l’annulation de l’arrêt du 16 octobre 2023 qu’elle attaque.

Texte de référence : Conseil d’État, 7e – 2e chambres réunies, 31 octobre 2024, n° 490242


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