Analyse des spécialistes / Énergie

Le dispositif « Éco-énergie tertiaire » ou DEET : rappel des obligations pesant sur les personnes publiques

Publié le 1 septembre 2022 à 9h00 - par

Au 30 septembre prochain, les personnes publiques, propriétaires ou occupants de bâtiments à usage tertiaire de plus de 1 000 m2, devront avoir procédé à l’enregistrement de leur première déclaration de consommation annuelle prévue par le dispositif « Éco-énergie tertiaire » qui résulte principalement du décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans les bâtiments à usage tertiaire.

Le dispositif « Éco-énergie tertiaire » ou DEET : rappel des obligations pesant sur les personnes publiques

La proximité de cette échéance est l’occasion de rappeler, dans leurs grandes lignes, les obligations auxquelles les personnes publiques concernées sont assujetties.

Les fondements textuels du dispositif « DEET »

L’article 175 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi « Élan »1, a imposé la mise en œuvre d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale afin de réduire cette consommation d’au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050, pour les bâtiments à usage tertiaire situés en France métropolitaine ainsi qu’en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte.

Le décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019, dénommé « décret tertiaire » et entré en vigueur le 1er octobre 20192, a précisé le cadre juridique applicable à ces actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans les bâtiments à usage tertiaire.

Ce décret a été précisé par l’arrêté « Méthode » du 10 avril 2020, lui-même modifié et complété par les arrêtés « Valeur absolue I » et « Valeur absolue II » des 24 novembre 2020 et 13 avril 2022, lesquels ont défini les objectifs en valeur absolue pour certaines activités tertiaires.

Un troisième arrêté « Valeur absolue III » est attendu prochainement pour les objectifs en valeur absolue des activités tertiaires restantes.

Le champ d’application du dispositif « DEET »

Le dispositif « DEET » concerne toute personne publique qui est propriétaire ou locataire de tout bâtiment, de toute partie de bâtiment ou de tout ensemble de bâtiments qui héberge des activités tertiaires sur une surface de plancher cumulée supérieure ou égale à 1 000 m2.

Alors que seuls les bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m2 et existant à la date de publication de la loi « Élan » – c’est-à-dire au 23 novembre 2018 -, relevaient initialement de ce dispositif, la loi Climat et Résilience du 22 août 20213 a modifié le périmètre d’assujettissement pour l’étendre à tous les bâtiments tertiaires, neufs ou existants, dont la superficie est égale ou supérieure au seuil précité.

L’activité tertiaire correspond à une activité économique, marchande ou non marchande, qui ne relève pas :

  • du secteur primaire qui regroupe les activités dont la finalité consiste en une exploitation des ressources naturelles (l’agriculture et l’élevage, la pêche, l’exploitation forestière ainsi que les exploitations minières et gisements) ;
  • ou du secteur secondaire qui vise l’ensemble des activités consistant en une transformation plus ou moins élaborée des matières premières qui sont issues du secteur primaire et qui comprend des activités aussi variées que l’industrie du bois, l’industrie agro-alimentaire, le raffinage du pétrole, la production industrielle (métallurgie, automobile, aéronautique, navale, chimie, pharmaceutique, électronique, meubles, etc.), la construction4.

Parmi les activités tertiaires, l’on trouvera par exemple celles de la culture et du spectacle (cinéma, bibliothèque, musée…), de l’enseignement (école primaire, collège, lycée), des sports (gymnase, piscine, patinoire…), de la santé (établissements hospitaliers, médico-sociaux…)5.

Les obligations résultant du dispositif « DEET »

Deux types d’obligations s’imposent aux personnes qui relèvent du décret « tertiaire ».

La première obligation porte sur la diminution progressive de la consommation d’énergie dans les bâtiments à usage tertiaire concernés, en atteignant :

  • soit un objectif de réduction des consommations, fixé en valeur relative :

Le niveau de consommation en énergie finale doit alors être réduit de 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050 par rapport à une consommation de référence qui ne peut être antérieure à l’année 2010.

La consommation énergétique de référence correspond à la consommation en énergie finale du bâtiment, de la partie de bâtiment ou de l’ensemble de bâtiments à usage tertiaire, constatée pour une année pleine d’exploitation et ajustée en fonction des variations climatiques selon une méthode définie par l’arrêté du 10 avril 20206.

  • soit un objectif de consommation cible, fixé en valeur absolue :

Ce niveau de consommation d’énergie finale du bâtiment, fixé en valeur absolue en fonction de la consommation énergétique des bâtiments nouveaux de la même catégorie, est déterminé par arrêté ministériel, pour chaque échéance de 2030, 2040 et 2050, sur la base d’indicateurs d’intensité d’usage de référence spécifiques pour chaque catégorie d’activités ajustés en fonction des conditions climatiques de référence7.

La seconde obligation concerne la déclaration des données de consommation énergétique qui doit être faite sur une plateforme de recueil et de suivi des consommations d’énergie du secteur tertiaire, dénommée « Observatoire de la Performance Énergétique, de la Rénovation et des Actions du Tertiaire » (OPERAT) et gérée par l’Ademe.

Cette plateforme numérique permet d’assurer un suivi du respect, par les personnes concernées, de leur obligation de réduction de la consommation d’énergie finale.

Pour chaque bâtiment, partie de bâtiments ou ensemble de bâtiments concerné par l’obligation de réduction de la consommation d’énergie finale, le propriétaire et, le cas échéant, le locataire doivent déclarer sur cette plateforme un certain nombre d’informations, dont les suivantes :

  • la ou les activités tertiaires qui y sont exercées ;
  • la surface ;
  • les consommations annuelles d’énergie par type d’énergie ;
  • le cas échéant, l’année de référence et les consommations de référence associées, par type d’énergie, avec les justificatifs correspondants, si l’objectif a été fixé en valeur relative8.

À cet égard, l’arrêté du 10 avril 2020 modifié prévoit :

  • que les données relatives à l’année 2020 devront être transmises au plus tard le 30 septembre 2022 ;
  • et que, chaque année à partir de 2022, seront transmises, au plus tard le 30 septembre, les données relatives à l’année précédente.

Le 30 septembre 2022 constitue donc la date limite pour effectuer les déclarations concernant les données de référence et les consommations annuelles de 2020 et de 2021.

Cette déclaration annuelle donnera lieu à l’émission, par la plateforme OPERAT, d’une attestation numérique annuelle de renseignement des éléments et consommations, laquelle est complétée par un système de notation « Éco-énergie tertiaire » qui qualifie l’avancée dans la démarche de réduction des consommations d’énergie finale, au regard des résultats obtenus par rapport aux objectifs attendus.

Le contrôle du respect de ces obligations et les éventuelles sanctions administratives

La plateforme OPERAT permettra à l’Ademe de vérifier, au plus tard les 31 décembre 2031, 2041 et 2051, que les objectifs fixés ont été atteints par la personne assujettie à l’obligation de réduction des consommations d’énergie9.

L’article R. 185-2 du Code de la construction et de l’habitation instaure plusieurs mécanismes de sanctions :

  • en l’absence de déclaration annuelle sur la plateforme OPERAT, la personne assujettie peut être mise en demeure de le faire dans un délai de trois mois par le préfet compétent au regard de la localisation du bâtiment.

En cas de mise en demeure infructueuse, le préfet procède alors à la publication, sur un site internet des services de l’État, d’un document retraçant les mises en demeure restées sans effet ;

  • en cas de non-respect non justifié de l’objectif de réduction de la consommation d’énergie, le préfet peut mettre la personne assujettie en demeure d’établir un programme d’actions respectant ses obligations et de s’engager à le respecter.

Ce programme d’actions, qui comprend un échéancier prévisionnel de réalisation et un plan de financement, est soumis au préfet pour approbation.

À défaut de transmission du programme d’actions dans un délai de six mois après la première mise en demeure, le préfet peut mettre en demeure individuellement le propriétaire et, le cas échéant, le locataire d’établir chacun leur programme d’actions, en conformité avec leurs obligations respectives, dans un délai de trois mois.

En l’absence, non justifiée, de dépôt de ce programme d’actions auprès du préfet à la suite de cette seconde mise en demeure, est publié, sur un site internet des services de l’État, un document retraçant les mises en demeure restées sans effet et le préfet peut prononcer une amende administrative au plus égale à 1 500 euros pour les personnes physiques et à 7 500 euros pour les personnes morales.

Si la personne assujettie ne se conforme pas au programme d’actions approuvé par le préfet, un constat de carence est établi, après une procédure contradictoire, par arrêté préfectoral motivé et publié sur le même site internet des services de l’État.

Sur le fondement de cet arrêté, le préfet peut prononcer une amende administrative au plus égale à 1 500 euros pour les personnes physiques et 7 500 euros pour les personnes morales, proportionnée à la gravité des manquements constatés.

Donatien de Bailliencourt, Avocat Associé, HMS Avocats


1. Dispositions désormais codifiées à l’article L. 174-1 du Code de la construction et de l’habitation.

2. Le décret tertiaire a été publié au JORF du 25 juillet 2019. Ses dispositions sont désormais codifiées aux articles R. 174-22 et suivants du Code de la construction et de l’habitation.

3. Article 176 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

4. Article 2 de l’arrêté du 10 avril 2020.

5. Les catégories d’activités tertiaires sont définies à l’annexe II de l’arrêté du 10 avril 2020.

6. Article R. 174-23 du Code de la construction et de l’habitation.

7. V. les arrêtés « Valeur absolue I » et « Valeur absolue II » des 24 novembre 2020 et 13 avril 2022.

8. Article R. 174-27 du Code de la construction et de l’habitation.

9. Article R. 174-31 du Code de la construction et de l’habitation.

Auteur :

Donatien de Bailliencourt

Donatien de Bailliencourt

Avocat Associé, HMS Avocats


On vous accompagne

Retrouvez les dernières fiches sur la thématique « Aménagement des territoires »

Voir toutes les ressources numériques Aménagement des territoires