La collectivité peut modifier unilatéralement les clauses illicites d’un contrat

Publié le 31 mars 2023 à 10h00 - par

Justifié par un motif d’intérêt général, le Conseil d’État admet qu’une collectivité puisse modifier unilatéralement des clauses d’une convention affectées d’une irrégularité grave.

La collectivité peut modifier unilatéralement les clauses illicites d'un contrat
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Cette modification n’est pas subordonnée à une saisine préalable du juge administratif.

Une modification des clauses possibles si celles-ci sont affectées d’une irrégularité grave

En l’espèce, par trois délibérations, le comité syndical du syndicat intercommunal de la périphérie de Paris pour les énergies et les réseaux de communication (SIPPEREC) a modifié unilatéralement trois conventions concédant la distribution d’électricité à la société Enedis. Le préfet de Paris, préfet de la région d’Île-de-France a alors demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris de suspendre l’exécution de ces délibérations, sur le fondement de l’article L. 554-1 du Code de justice administrative. Le juge des référés du tribunal administratif, par une ordonnance du 21 mars 2022, a fait droit à cette demande de suspension. Par l’ordonnance attaquée du 18 mai 2022, le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Paris a rejeté l’appel formé par le SIPPEREC contre cette ordonnance.

Selon le Conseil d’État, en vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique contractante peut unilatéralement apporter des modifications à un tel contrat dans l’intérêt général, son cocontractant étant tenu de respecter les obligations qui lui incombent en vertu du contrat ainsi modifié tout en ayant droit au maintien de l’équilibre financier du contrat.

La clause doit être divisible du reste du contrat

La personne publique peut ainsi, lorsqu’une clause du contrat est affectée d’une irrégularité tenant au caractère illicite de son contenu et à condition qu’elle soit divisible du reste du contrat, y apporter de manière unilatérale les modifications permettant de remédier à cette irrégularité. Si la clause n’est pas divisible du reste du contrat et que l’irrégularité qui entache le contrat est d’une gravité telle que, s’il était saisi, le juge du contrat pourrait en prononcer l’annulation ou la résiliation, la personne publique peut, sous réserve de l’exigence de loyauté des relations contractuelles, résilier unilatéralement le contrat sans qu’il soit besoin qu’elle saisisse au préalable le juge.

En jugeant que la modification unilatérale d’un contrat concédant un service public ne saurait être mise en œuvre au seul motif de purger le contrat de stipulations illicites, alors que la personne publique peut modifier une clause illicite de manière à remédier à son irrégularité si celle-ci est divisible du reste du contrat, pour en déduire qu’il existait un doute sérieux sur la légalité de la délibération dont la suspension lui était demandée, le juge des référés de la Cour administrative d’appel de Paris a commis une erreur de droit.

Texte de référence : Conseil d’État, 7e – 2e chambres réunies, 8 mars 2023, n° 464619