Emprunts toxiques: l’Assemblée vote un nouveau texte de protection des intérêts de l’État

Publié le 11 juillet 2014 à 0h00 - par

L’Assemblée nationale a adopté jeudi 10 juillet un nouveau projet de loi de protection des intérêts de l’État dans l’affaire des emprunts toxiques à la suite d’une censure du Conseil constitutionnel, l’opposition dénonçant une « loi d’amnistie bancaire ».

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Ce texte vise à valider les contrats de prêts structurés souscrits principalement par les collectivités dans les années 2000, afin d’écarter le « risque financier maximum pour l’État qui peut être estimé à 17 milliards d’euros », selon l’exposé des motifs du projet de loi.

Ce risque provient des multiples recours intentés par des collectivités contre les contrats de prêts dits « structurés » – c’est-à-dire obéissant à des mécanismes extrêmement sophistiqués – conclus avec des banques, dont Dexia et son « héritière » la SFIL pour un montant de 8 milliards.

En décembre dernier, jugeant sa portée trop large, le Conseil constitutionnel avait censuré une disposition de la loi de finances 2014 sécurisant ces prêts qui ne mentionnaient pas par exemple de taux effectif global (TEG). Le nouveau texte, déjà adopté par le Sénat en mai, est limité aux seuls prêts structurés souscrits par des personnes morales de droit public.

La Haute juridiction n’avait pas remis en cause l’instauration par la loi de finances d’un fonds de soutien aux collectivités territoriales les plus frappées par des emprunts toxiques, abondé pour moitié par l’État, pour l’autre par les banques, et doté chaque année de 100 millions d’euros pour une durée maximale de 15 ans.

Ces aides pourront être versées à partir de fin 2014, a précisé jeudi le secrétaire d’État au Budget Christian Eckert. Les collectivités devront conclure une transaction préalable avec la banque concernée.

C’est notamment contre ce principe de renoncement à une action en justice que se sont élevés des députés UMP, UDI, FN et du groupe du Front de gauche jeudi, en critiquant une « loi d’amnistie des banques aux frais des collectivités ».

« Il ne s’agit pas de faire de cadeaux »

« Que les banques répondent de leurs actes », a lancé la centriste Sonia Lagarde, tandis que pour le Front de gauche, Jean-Philippe Nilor s’inquiétait du « très mauvais signal politique envoyé » et de collectivités déjà « étranglées » par la baisse des dotations de l’État.

Aux yeux de Gilbert Collard (FN), ce projet de loi est un « acte d’amour du gouvernement à l’égard de la finance », de même que selon Sylvain Berrios (UMP) il manifeste « un lien consanguin avec les banques ». Le député-maire de Saint-Maur (Val-de-Marne), qui a promis que son groupe engagerait « les démarches nécessaires » pour faire invalider ce texte, a mentionné que sa commune avait souscrit pour 131 millions d’euros de tels emprunts toxiques.

En revanche, les écologistes ont majoritairement soutenu ce projet de loi de « compromis », le « moins inacceptable » selon Éric Alauzet. M. Eckert a souligné que « beaucoup de fautes ont été commises, par certaines collectivités, des banques » ainsi que l’État qui « n’a pas vu complètement le risque financier dans lequel il s’engageait » en décidant d’entrer au capital de Dexia sous la majorité précédente. « Il ne s’agit pas de faire de cadeaux », a aussi assuré le secrétaire d’État, récusant toute idée d’amnistie.

Le projet de loi, examiné en procédure accélérée et qui n’a fait l’objet que d’une modification rédactionnelle jeudi, devrait être adopté définitivement par le Sénat le 17 juillet.

L’affaire des emprunts toxiques concerne quelque 1 500 collectivités ou organismes publics, et a généré au moins 300 contentieux. Le dernier jugement remonte au 4 juillet : la ville d’Angoulême, qui avait assigné Dexia pour faire annuler un emprunt de 16 millions d’euros, a obtenu le remboursement de 3,4 millions d’euros pour une erreur de calcul des taux d’intérêt.

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