La fermeture brutale d’une trentaine de piscines publiques gérées par l’entreprise Vert Marine a fait l’effet d’un coup de massue lundi 5 septembre 2022, au lendemain des vacances, la société exploitante n’étant plus en mesure de faire face à l’augmentation des prix de l’énergie.
« Nos budgets sont en train d’exploser. L’inflation touche massivement l’ensemble des bâtiments des collectivités territoriales, qu’ils soient sportifs, culturels ou de toute autre nature », constate amèrement André Laignel, vice-président de l’Association des Maires de France (AMF). Selon l’élu, également président du comité des finances locales, cette cascade de fermetures a « déjà commencé depuis plusieurs mois, y compris dans les piscines gérées par les collectivités, et l’État n’est pas en capacité de nous répondre ». À la veille de l’automne, le problème risque de se reproduire sur d’autres équipements : patinoires, gymnases voire les écoles, collèges et lycées.
Un rapport sénatorial paru en juillet 2022 faisait état d’un bond « de 50 % des dépenses énergétiques », selon l’Association des petites villes de France (APVF), tandis qu’Intercommunalités de France considère que la facture énergétique « des trois quarts des intercommunalités a doublé, voire triplé ou quadruplé ». Face à cette flambée, un « bouclier tarifaire » a été déployé à l’automne 2021 pour les particuliers et les entreprises, mais la plupart des collectivités n’en bénéficient pas, à l’exception de certaines petites communes.
Plusieurs élus interrogés par l’AFP jugent également insuffisantes les mesures votées en août 2022 dans le cadre de la loi de finances rectificative. « Il va falloir passer l’hiver et il y a un risque de black-out communal, c’est-à-dire que les collectivités vont petit à petit fermer leurs équipements, réduire les amplitudes d’ouverture des musées, des médiathèques, éteindre encore plus l’éclairage public ou supprimer les décorations de Noël », redoute Christophe Bouillon, président de l’Association des petites villes de France.
Pas tenable
Si le poste énergie arrive derrière les dépenses de personnel dans les comptes des collectivités, l’essentiel des coûts concerne le chauffage des bâtiments, avec des contrats signés pour un, deux ou trois ans. Les situations varient donc selon la date de signature du contrat et de son éventuel renouvellement. À cela s’ajoutent aussi des finances déjà fragilisées par la crise du Covid-19.
« J’ai conclu mon contrat d’achat d’énergie en octobre 2021 et je m’attends à une hausse de 25 % de la facture mais pour ceux qui ont signé après la guerre en Ukraine, les coûts seront doublés voire triplés », témoigne Sébastien Martin, président de la communauté d’agglomération du Grand Chalon (Saône-et-Loire). Parmi tous les équipements, les piscines sont souvent considérées comme un poste de dépenses important, « plus de 60 % ayant plus de 30 ans », relève France urbaine, qui représente les grandes villes. « Dans mon agglo, la piscine représente plus de la moitié de ma facture d’énergie », poursuit Sébastien Martin, pour qui la situation n’est « pas tenable dans la durée ».
Côté ministère, on se veut rassurant. « Le filet de sécurité mis en place cet été représente 430 millions d’euros pour soutenir les communes et les intercommunalités fragilisées par la hausse du point d’indice des fonctionnaires, des coûts de l’énergie et des denrées alimentaires, 120 millions pour les départements et 18 millions pour les régions », rappelle le cabinet de Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales. « L’objectif du Gouvernement pour 2023 est de donner le plus de visibilité possible aux collectivités et de construire des budgets qui prennent en compte toutes les contraintes qui n’étaient pas connues lorsque le budget 2022 a été voté », poursuit-on au cabinet.
Pour beaucoup d’élus, l’incertitude sur l’ampleur et la durée de la crise empêche d’ailleurs tout pronostic certain. « On est inquiets, car tout est encore devant nous, même si ce ne sont pas toutes les piscines qui ferment, mais je fais confiance aux élus pour que les décisions soient les moins pénalisantes possible pour les enfants », relève Guy Geoffroy, maire de Combs-la-Ville (Seine-et-Marne), pour qui la crise va surtout se traduire par une « baisse de la capacité d’autofinancement » des investissements.
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