La MNT donne la parole aux territoriaux du grand âge

Publié le 16 décembre 2022 à 10h30 - par

L’Observatoire MNT a récemment publié une étude consacrée aux métiers du grand âge exercés dans la fonction publique territoriale.

Intitulée « Les métiers territoriaux du grand âge, des professionnels du lien en attente de stabilité », une récente étude de l’Observatoire MNT Social & territorial (cahier n° 28, septembre 2022), réalisée en partenariat avec l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (UNCCAS), aborde le vieillissement « par le regard de ceux qui en prennent soin au quotidien », « ceux que l’on n’entend pas ». « Pour la première fois, la parole est donnée aux professionnels, aux agents territoriaux, pour décrire leur métier, son impact sur leur santé. Avec ce parti pris, cette étude se démarque des nombreux autres rapports sur ce secteur. Son ambition est de participer à nourrir le débat de façon originale et concrète, une façon qui nous est propre, celle de la Territoriale et des services publics locaux », expliquent Jean-René Moreau et Laurent Besozzi, président et vice-président de l’Observatoire MNT.

À partir d’un constat partagé sur l’existence de risques particuliers et élevés dans les métiers du grand âge au sein des collectivités territoriales, l’Observatoire MNT a fait réaliser cette enquête auprès des collectivités et de leurs agents. Des entretiens individuels ont été menés avec des experts et des professionnels de santé, des élus, des responsables de service et de ressources humaines, ainsi que des agents eux-mêmes : cadres et agents d’exécution, professionnels du grand âge, de sorte que leur parole soit étendue à l’ensemble de la chaîne hiérarchique. Cette enquête repose sur des interviews semi-directifs et confidentiels avec les professionnels pour contribuer à faire émerger leurs attentes, les innovations, les pratiques actuelles et les problématiques propres à leur métier.

Cette étude porte donc sur le volet ressources humaines de la politique du grand âge, plus spécifiquement au sein de la fonction publique territoriale. Elle s’intéresse aux métiers de l’accompagnement à la perte d’autonomie, que cela soit en établissement ou à domicile, à l’échelle communale et intercommunale.

Portrait des métiers territoriaux du grand âge

Dans la nomenclature des métiers territoriaux du CNFPT, on repère une vingtaine de métiers en lien avec le grand âge. Cela va des aides à domicile, aux directeurs de CCAS, en passant par les aides médico-psychologiques (AMP), les infirmiers et les directeurs de foyers-logements. Toutefois, le répertoire des métiers du CNFPT ne distingue que deux métiers, strictement consacrés au grand âge :

  • Les aides à domicile (AD), également appelés agents d’accompagnement à la vie quotidienne, assistants de vie, auxiliaires de vie sociale ou encore auxiliaires de gériatrie ou de gérontologie, qui relèvent du cadre d’emploi des agents sociaux territoriaux (catégorie C, filière sociale) ;
  • Les aides-soignants (AS), également appelés auxiliaires de soins, qui relevaient jusqu’alors du cadre d’emploi des auxiliaires de soins territoriaux (catégorie C, filière médico-sociale), mais qui ont, depuis le 1er janvier 2022, intégré le nouveau cadre d’emploi des « aides-soignants » de catégorie B, filière médico-sociale, dès lors qu’ils sont titulaires du diplôme d’État d’aide-soignant (DEAS).

Cette simplicité apparente masque une réalité beaucoup plus complexe sur le terrain. En effet, la pluralité d’appellations aux fiches de poste peu ou prou similaires, réunie derrière ces deux profils par nécessité statutaire, peut relever de filières, catégories, conditions d’accès, diplômes (DEAVS, DEAMP…) et de rémunérations fort différents, expliquent les auteurs de l’étude. Pour faire face aux difficultés de recrutement et/ou à l’absentéisme, il n’est pas rare que les agents engagés auprès des personnes âgées connaissent un décalage entre le grade détenu et le métier exercé. Avec ou sans diplôme, les glissements de tâches sont fréquents sans pour autant s’accompagner d’une reconnaissance réelle. Certains agents techniques (porteurs de repas, par exemple) peuvent même se voir positionnés sur des tâches normalement réservées au cadre d’emploi des agents sociaux. « Outre les conséquences au quotidien, cette pluralité de statut participe au cloisonnement et complique les passerelles possibles, non seulement entre public et privé, pour lesquels les diplômes diffèrent, mais aussi entre fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière ou encore, entre domicile et établissement », observe l’étude de la MNT.

Parmi le 1,9 million d’agents territoriaux, 56 000 exerceraient uniquement sur le strict champ d’activité du grand âge (toutes structures et tous métiers confondus, y compris les métiers supports), dont 37 900 aides à domicile et 15 100 aides-soignants, rapporte l’étude. Plus de neuf sur 10 sont des femmes. Ce taux de féminisation culmine à 97 % s’agissant des aides à domicile et des métiers statutairement assimilés, à savoir auxiliaires de vie sociale, auxiliaires de gérontologie, assistantes de vie, agentes d’accompagnement à la vie… !

Enfin, source potentielle de fatigue physique et psychique, un quart des agents exerçant auprès des seniors sont âgés de plus de 55 ans, soit deux points au-dessus de la moyenne nationale. Là encore, il s’agit d’un élément de différenciation supplémentaire entre les aides à domicile et les aides-soignantes. En effet, cette tranche d’âge concerne 26,4 % des aides à domicile, mais 15 % seulement des aides-soignants, soit sept points de moins que la moyenne, complète l’étude de la MNT.

Des métiers en crise

Sans surprise, l’étude et les agents territoriaux y ayant participé dépeignent des métiers en crise, exposant les professionnels à des risques trop longtemps ignorés. Des métiers éprouvant, qui portent la lourde charge émotionnelle de la vieillesse et de la mort. Les professionnels interrogés appellent de leurs vœux une nouvelle politique du grand âge. Ils demandent, en particulier, une meilleure définition et une consolidation de leurs métiers. Qualité de vie au travail et qualité du travail doivent se conjuguer pour « prendre soin des soignants. » « Les employeurs peinent à enrayer la crise des vocations. L’attractivité est difficile à créer avec peu de titularisations. Ce levier habituel de recrutement pour d’autres métiers territoriaux, puisqu’il promet la protection du statut, est plus difficile à mobiliser faute de moyens liés à des financements complexes. Pourtant, offrir une certaine stabilité à ces postes, c’est lutter contre la précarité. Offrir une meilleure qualité de vie au travail, c’est éviter l’épuisement, l’absentéisme et les remplacements, des problématiques quotidiennes à gérer », soutiennent Jean-René Moreau et Laurent Besozzi.

L’étude de l’Observatoire MNT se referme sur une trentaine de recommandations, qui concernent aussi bien la crise des métiers et des vocations, que les moyens de prévenir l’usure des agents, la qualité de vie au travail ou les nouvelles technologies comme média de la revalorisation des métiers.


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