Pour l’attractivité d’une collectivité, les questions d’inclusion, de diversité et d’égalité sont de plus en plus importantes. Est-ce, selon vous, un phénomène purement conjoncturel ou vraiment structurel ?
On ferait une vraie erreur en considérant qu’il s’agit juste d’un sujet conjoncturel et d’un phénomène de mode conditionnant les politiques managériales. Nous sommes sur un mouvement de fond qui correspond à des attentes de la société vis-à-vis du travail en général, et de la fonction publique en particulier qui se doit d’être exemplaire.
De plus, c’est une chance pour les DRH de faire d’une politique RH un enjeu de politique publique. Cela n’a pas toujours été le cas avec des contextes, dans le passé, ayant moins d’intérêt et d’attrait pour les politiques RH et le rôle joué par l’employeur. Lorsque le marché du travail était moins dynamique qu’aujourd’hui, la fonction publique pouvait être une valeur refuge et l’on se posait moins de questions pour savoir comment attirer des candidats. Moins de questions aussi sur qui nous sommes comme employeur et sur notre apport à une société plus inclusive acceptant davantage la diversité. Ces questions ne vont pas repartir de sitôt et nous sommes vraiment attendus dessus. Les DRH peuvent parfois être un peu démunis car cela remet en cause certaines de leurs habitudes et les amène à porter l’attention sur des sujets qu’on regardait moins.
Comment aider les DRH à changer de modèle ?
La première des choses serait de s’instrumenter. Comment mesurer concrètement qu’on est plus ou moins attractif à des profils plus divers et inclusifs ? Comment savoir si des personnes se sentent mieux inclus dans nos collectifs de travail ? Mesurer, cela constitue une certaine difficulté pour les DRH voire même un tabou. Il faudrait créer un baromètre de l’inclusion et de la diversité dans nos collectifs de travail, ce qui n’est pas simple avec une culture française très égalitariste. En tant qu’association professionnelle, nous avons des clés de lecture à donner à nos collègues pour qu’ils s’emparent de ces sujets.
Par ailleurs, nous devons échanger avec le monde de la recherche et de la sociologie pour mieux comprendre les attentes de nouvelles générations ayant un autre point de vue sur le travail et la société. Par exemple, à Bordeaux, récemment nous avons posé la question de l’égalité sous l’angle d’égalité hommes-femmes et nous avons été interpellé par certains de nos jeunes collègues nous disant que la vraie question portait sur l’égalité de genre. C’est une autre logique avec une autre terminologie. Il est donc nécessaire déjà de bien nommer les choses et de trouver le bon vocabulaire pour les aborder, cela est décisif. Avant de lancer une instrumentation, il nous faut traiter au préalable ces questions.
Vous plaidez pour des politiques d’expérimentation. Pourquoi ?
Sur ces sujets, je trouve en effet intéressantes les politiques RH d’expérimentation lancées ces dernières années pour défricher des champs nouveaux et s’interroger sur ce que peuvent être les bonnes solutions. Dans un cadre concerté du dialogue social qui constitue une condition de réussite, de telles démarches permettent de limiter les risques et de s’autoriser à tester quelque chose avec la possibilité de revenir en arrière en cas d’effets indésirables pas forcément perçus au départ. Je pense que ce type de politique se prête particulièrement à des logiques d’expérimentation. C’est a priori la bonne façon d’avancer et de partager les résultats avec la communauté professionnelle.
Propos recueillis par Philippe Pottiée-Sperry