Pour atténuer cette perte, les pouvoirs publics ont mis en œuvre plusieurs mesures : hausse du point d’indice de 1,5 % au 1er juillet 2023, revalorisation du minimum de traitement, prime de pouvoir d’achat exceptionnelle (de 300 à 800 €) et rééchelonnement des grilles indiciaires pour les agents de catégories C et B. Ces dispositifs ont permis de freiner la dégradation du pouvoir d’achat, sans toutefois l’enrayer complètement. Leur impact varie fortement selon les versants, les statuts et les catégories hiérarchiques.
Des dynamiques salariales inégales entre les trois versants de la fonction publique
Dans la fonction publique de l’État (FPE), le salaire net moyen a progressé de 4,4 % en euros courants, grâce aux revalorisations issues du Pacte enseignant, du Grenelle de l’Éducation et de la réforme de la haute fonction publique. Ces dispositifs ont permis d’améliorer les rémunérations des enseignants, des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) et des cadres supérieurs. En euros constants, la perte de pouvoir d’achat y est limitée à – 0,4 %, et la rémunération moyenne des agents en place (RMPP) reste positive à + 0,9 %.
La fonction publique territoriale (FPT) enregistre une hausse du salaire net moyen de 3,9 %, mais un recul de 0,9 % en euros constants. Ce résultat s’explique par l’absence de mesures catégorielles spécifiques, malgré les revalorisations du point d’indice et du minimum de traitement qui ont surtout profité aux agents de catégorie C, avec peu d’impact pour les catégories B et A.
Dans la fonction publique hospitalière (FPH), la dynamique salariale s’essouffle. Après plusieurs années de fortes revalorisations liées au Ségur de la santé, la hausse du salaire net moyen n’est plus que de 3,9 % en euros courants, soit – 0,9 % en euros constants. Les gains se concentrent sur les agents de catégorie C et les contractuels, tandis que la RMPP nette reste quasi stable (+ 0,1 %). Le pouvoir d’achat stagne, signe d’un essoufflement des effets du Ségur et d’un ralentissement des mesures catégorielles.
Les ressorts structurels et statutaires de l’évolution des rémunérations
La revalorisation du point d’indice et la prime de pouvoir d’achat exceptionnelle ont constitué les principaux leviers de soutien au revenu des agents. L’ajustement de la correspondance entre indice brut et indice majoré, avec jusqu’à neuf points supplémentaires pour les plus bas échelons, a permis d’améliorer les situations les plus modestes. Toutefois, ces dispositifs demeurent essentiellement des mesures de rattrapage conjoncturel, sans effet durable sur la structure des rémunérations.
Les contractuels bénéficient de la progression salariale la plus dynamique (+ 5,5 %), car ils sont plus nombreux dans les emplois à faible rémunération et donc davantage touchés par les revalorisations ciblées. Les fonctionnaires enregistrent une hausse moyenne de + 4,0 %, plus forte pour les catégories A et C que pour les B. Le GVT positif (glissement vieillesse-technicité), qui traduit les gains liés à l’ancienneté et aux promotions, contribue à hauteur de 1,3 point à la progression des salaires dans la FPE, mais reste insuffisant pour compenser l’inflation.
Malgré des hausses nominales significatives, l’inflation neutralise en grande partie les effets des revalorisations. En moyenne, le salaire net en euros constants baisse de 0,7 %. Si les agents restés en poste enregistrent une RMPP positive (+0,4 %), près de la moitié d’entre eux subissent une évolution inférieure à celle des prix. Cette situation met en lumière la fragilité du modèle actuel de rémunération publique, dans un contexte où les salaires du secteur privé progressent plus rapidement.
Le rapport 2025 met en évidence un effort budgétaire réel mais inégalement réparti. Les revalorisations du point d’indice, les primes exceptionnelles et les mesures sectorielles ont limité la perte de pouvoir d’achat, mais n’ont pas permis d’enrayer la baisse du salaire réel. Les contractuels et les agents de catégorie C demeurent les principaux bénéficiaires, tandis que les catégories B et les agents hospitaliers peinent à voir leur situation s’améliorer. Pour les responsables RH territoriaux, ces constats soulignent l’urgence d’une gestion stratégique des politiques indemnitaires et de carrière, intégrant la question du pouvoir d’achat, de l’attractivité et de la fidélisation des agents.
Source : Rapport annuel sur l’état de la fonction publique – Faits et chiffres, 23 octobre 2025
