L’économie circulaire appliquée aux achats ou la nécessité d’arrêter de tourner en rond

Publié le 5 octobre 2018 à 8h08 - par

L’Institut national de l’économie circulaire (Inec), la Métropole du Grand Paris (MGP) et l’Observatoire des achats responsables (Obsar) ont présenté le 18 septembre à Paris un programme expérimental « Achats et économie circulaire » auquel 30 entités (15 publiques et 15 privées) sont invitées à participer en tant qu’acheteurs.

L'économie circulaire appliquée aux achats ou la nécessité d'arrêter de tourner en rond

La démarche ambitionne de créer et partager des connaissances, de sensibiliser les acteurs et convaincre des possibilités règlementaires et techniques, des avantages économiques, environnementaux et sociaux et du rôle stimulant des achats dans l’économie circulaire. L’occasion aussi d’interroger l’UGAP, plus importante centrale d’achat généraliste, et titulaire du label RFR, sur sa perception du sujet mais surtout sur ses actions précises en cours et à venir. Merci à Alice Piednoir, Responsable Achats responsables pour l’ensemble des illustrations concrètes partagées.

Bien définir ce qu’est l’économie circulaire

L’économie circulaire vise à changer de paradigme par rapport à l’économie dite linéaire, en limitant le gaspillage des ressources et l’impact environnemental, et en augmentant l’efficacité à tous les stades de l’économie des produits. Cette notion contient également l’idée que ces modèles de production et de consommation circulaires peuvent être générateurs d’activités et de création d’emplois durables et non délocalisables. Ainsi, les enjeux de l’économie circulaire sont à la fois environnementaux, économiques et sociaux.

Le concept d’économie circulaire a officiellement fait son entrée dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015. Elle a en effet reconnu la transition vers une économie circulaire comme un objectif national et comme l’un des piliers du développement durable. Cette loi a donné la définition suivante pour l’économie circulaire (Code de l’environnement, article L. 110-1-1) : « La transition vers une économie circulaire vise à dépasser le modèle économique linéaire consistant à extraire, fabriquer, consommer et jeter en appelant à une consommation sobre et responsable des ressources naturelles et des matières premières primaires ainsi que, par ordre de priorité, à la prévention de la production de déchets, notamment par le réemploi des produits, et, suivant la hiérarchie des modes de traitement des déchets, à une réutilisation, à un recyclage ou, à défaut, à une valorisation des déchets ».

En découle une feuille de route économie circulaire, publiée le 23 avril 2018, qui présente 50 mesures concrètes pour se lancer dans la démarche. Ce concept d’économie circulaire se divise en 3 domaines et 7 piliers dans les travaux de l’Ademe, comme figuré sur le schéma ci-dessous qui peut paraitre flou au premier abord, mais qui se décline concrètement dans chaque étape du processus achat.

L'économie circulaire appliquée aux achats ou la nécessité d'arrêter de tourner en rond

L’approvisionnement durable en ressources

Ne plus puiser dans les ressources finies est fondamental pour se lancer dans la démarche circulaire. L’acheteur peut valoriser ou même exiger que les matériaux constituant le produit qu’il achète soient recyclés ou à défaut, issus de ressources renouvelables. C’est ce que font les acheteurs de l’UGAP qui imposent une proportion de matériaux recyclés dans certains cahiers des charges lorsque l’objet le permet comme pour le papier de reprographie ou les produits d’hygiène et systématisent la valorisation de cette proportion pour les autres offres.

L’écoconception

L’écoconception vise, lors de la conception d’un bien ou d’un service, à minimiser ses impacts environnementaux sur l’ensemble du cycle de vie. Au-delà de cet objectif environnemental, l’écoconception favorise l’innovation et permet aux entreprises qui y ont recours de se démarquer. L’UGAP intègre ce point en amont de la consultation lors des échanges avec les entreprises en phase de sourcing pour connaitre les spécificités de l’amont industriel et l’intègre comme un élément de valorisation au sein du critère de performance environnementale.

L’écologie industrielle et territoriale

En réfléchissant à l’échelle locale, la démarche circulaire mutualise les besoins et facilite les flux entre acteurs d’un territoire. Les grands principes de l’achat public rendent difficile l’application littérale de ce pilier. Cependant, en favorisant les clauses d’insertion socio-professionnelle et en réservant des marchés aux secteurs du handicap et l’IAE ou de l’ESS, l’acheteur public fait le lien entre différents acteurs économiques, au bénéfice des citoyens. L’UGAP s’est lancé depuis plusieurs années dans le développement de ces aspects sociaux au sein de son offre, et plus particulièrement sur les secteurs des services et des prestations intellectuelles.

L’économie de la fonctionnalité

Ce modèle économique favorise l’usage et les prestations de service à l’acquisition et la possession de produits. À l’UGAP, mais plus largement dans la commande publique, les expressions de besoins évoluent et de plus en plus de solutions liées à l’usage remplacent ou complètent les offres en acquisition (location de véhicules, logiciels en mode Saas, gestion de parc d’échographes…).

La consommation responsable

L’acheteur est le pivot central de la consommation responsable. Il influence le donneur d’ordres et l’utilisateur à prendre des décisions et changer leur comportement en prenant en compte les impacts environnementaux et sociaux à toutes les étapes du cycle de vie du produit ou du service. Au travers de sa stratégie d’achats responsables, l’UGAP prend en compte ces aspects et toute dérogation doit être motivée. En imposant ou en valorisant les aspects responsables, la centrale d’achat constitue une offre globale pour permettre à ses clients de trouver une réponse pertinente.

Allongement de la durée de vie des produits

L’allongement de la durée d’usage des produits peut se faire par le recours à la réparation, à la vente ou à l’achat d’occasion, dans le cadre du réemploi et de la réutilisation.

Les éléments valorisés dans les appels d’offres de l’UGAP sont par exemple :

  • Durée de vie des produits objets du marché (en tenant compte de la résistance, des conditions d’utilisation, de l’entretien et des évolutions technologiques…)
  • Durée de disponibilité des pièces détachées après la fin de commercialisation du produit.

Une grande majorité des marchés intègre également des prestations associées de maintenance des produits en veillant à valoriser des éléments tels que les modalités de mises en œuvre afin de réduire les impacts environnementaux dans le cadre de la maintenance des produits objets du marché.

La fin de vie des produits

L’amélioration de la prévention, de la gestion et du recyclage des déchets sont des éléments à prendre en compte lors de la passation d’un marché pour une gestion optimale de la fin de vie des produits. L’UGAP joue par exemple son rôle de relais des politiques publiques sur cet aspect également en conseillant ses clients et bénéficiaires sur la bonne gestion réglementaire lors de la fin de vie des produits. Par exemple, les règlementations DEEE et REP DEA.

En conclusion

La diversité des possibilités offertes par la prise en compte de l’économie circulaire dans l’acte d’achat est désormais évidente. En revanche, il n’existe pas encore de chemin tout tracé. L’acheteur doit réinventer ses pratiques en changement de paradigme, ce qui peut nécessiter un accompagnement d’expert. Les initiatives de mises en commun de bonnes pratiques en France et au niveau européen soulignent cette volonté d’avancer vers l’achat responsable au sens le plus large possible.

Toutefois la diversité des thématiques évoquées au sein de cet article témoigne des difficultés à entraîner sur ce sujet et bien d’autres (achats innovants, dématérialisation…) près de 135 000 acheteurs publics.

Un achat responsable est par nature un achat beaucoup plus complexe qui ne pourra probablement et réellement se développer que par l’accélération de la professionnalisation et surtout de la mutualisation.

Au-delà et au regard des enjeux économiques et sociétaux associés, les pouvoirs publics devront plus que jamais via la labellisation et la référence à des normes internationales s’assurer in fine que la boucle est tout à fait bouclée !

L’UGAP demeure encore un des rares acteurs de la mutualisation, labellisé Relations Fournisseur Responsables (RFAR).

Sébastien Taupiac,
Directeur Santé à l’UGAP