Élection présidentielle : les propositions de l’AATF

Publié le 5 avril 2022 à 10h00 - par

L’Association des administrateurs territoriaux de France vient de publier ses propositions pour l’élection présidentielle, adossées à une nouvelle édition de son baromètre annuel.

Élection présidentielle : les propositions de l'AATF

Réseau professionnel et laboratoire d’idées des hauts fonctionnaires territoriaux, l’Association des administrateurs territoriaux de France (AATF) a publié fin mars ses propositions aux candidats à l’élection présidentielle, accompagnées de la 5e édition de son baromètre réalisé avec IPSOS sur « les Français et le service public local ». En croisant le regard des Français et des fonctionnaires territoriaux, l’association entend apporter « une contribution singulière au débat public ». « Dans une période où se succèdent les chocs et les crises traumatiques, il y a besoin de pouvoir s’appuyer sur des points d’ancrage, des pôles de stabilité, comme le sont les collectivités locales, et de pouvoir capitaliser sur la confiance qu’elles inspirent », estime son président Fabien Tastet.

De fait, le baromètre IPSOS/AATF témoigne du crédit du secteur public local auprès de nos concitoyens. Ainsi, près de quatre Français sur cinq (79 %) font davantage confiance aux collectivités locales qu’à l’État pour organiser les services publics là où ils habitent. Et plus des deux tiers (68 %) ont une bonne opinion des fonctionnaires territoriaux. D’un point de vue plus général, 80 % des Français considèrent que les collectivités locales fournissent des prestations et des services de qualité à leurs administrés. Par ailleurs, parmi les acteurs publics considérés comme les plus efficaces pour répondre à la crise, les collectivités locales arrivent en deuxième position pour les Français (70 %), juste derrière l’hôpital (82 %), mais largement devant les préfectures (22 %) et les ministères (19 %).

Cet attachement des Français à l’action publique locale doit conduire à renforcer les pouvoirs de proximité sous le prochain mandat, en conclut l’AATF. Selon l’association, les collectivités locales doivent être plus libre d’agir, notamment par la reconnaissance d’un pouvoir réglementaire (88 % des Français y sont favorables) et d’un droit de subsidiarité, « sorte de clause générale de compétence du 21e siècle » En outre, elles doivent être davantage responsabilisées sur des sujets de préoccupations actuelles, comme les Ehpad, l’éducation ou le soutien à l’économie. Dans cet esprit, deux tiers des Français soutiennent la proposition de l’AATF de faciliter l’entrée des collectivités locales au capital des entreprises. Elles doivent disposer d’outils et de moyens élargis, comme la possibilité de collecter directement l’épargne des Français à travers un livret dédié (78 % des Français approuvent cette proposition) ou un rôle plus important dans la gestion de la fonction publique territoriale (FPT), poursuit l’association.

Après l’étape réussie de la réforme de la Haute fonction publique, il faut poursuivre la réforme de l’État, encourage l’AATF. « Si l’État pourra désormais compter sur une Haute fonction publique plus représentative de la société, plus opérationnelle, plus ouverte à des profils de terrain, il a aussi besoin de voir évoluer son organisation locale, explique l’association. Nous appelons de nos vœux un État territorial qui en finit avec l’émiettement, qui soit mieux coordonné par le préfet, moins censeur et plus coopératif vis-à-vis des collectivités locales auxquelles il a d’ailleurs vocation à transférer ses agents non régaliens pour supprimer les doublons administratifs ». Selon le baromètre IPSOS/AATF, plus de quatre Français sur cinq (83 %) y sont favorables.

Bouleverser les règles du temps de travail

Les hauts fonctionnaires territoriaux proposent de bouleverser les règles du temps de travail. « La façon de compter le temps de travail n’est plus adaptée à nos parcours de vie, explique le président de l’AATF. Les carrières sont de moins en moins linéaires et séquencées par des étapes importantes : le début de carrière, la parentalité, la formation ou la reconversion professionnelle, l’aide aux proches en perte d’autonomie… Chaque actif devrait ainsi pouvoir moduler son temps de travail et l’adapter à sa situation, pour travailler moins à certaines étapes de la vie et plus à d’autres » Aussi, le temps de travail pris en compte pour faire valoir ses droits à la retraite devrait être calculé à l’échelle de la vie professionnelle et figurer dans un compte que le salarié ou l’agent public transmettrait à ses employeurs respectifs, plaide l’association. Là encore, 80 % des Français approuvent la proposition.

Bousculer les règles du jeu en matière de santé publique

L’association représentant les hauts fonctionnaires territoriaux veut aussi bousculer les règles du jeu en matière de santé publique. Selon l’AATF, des mesures timorées ne suffisent plus à endiguer les inégalités croissantes d’accès aux soins sur le territoire. Les Français partagent cette analyse : neuf sur dix (91 %) soutiennent la proposition d’imposer, pour quelques années, l’installation des nouveaux médecins dans les zones à faible densité médicale et plus de quatre sur cinq (82 %) la possibilité, pour les collectivités locales, de salarier directement des médecins dans ces zones.

Halte au tout numérique

L’AATF veut sortir « d’une approbation béate du tout numérique, qui a pour effet néfaste d’éloigner un grand nombre de personnes de l’accès aux services publics ». Les Français adhèrent à 84 % à sa proposition d’interdire les services publics totalement dématérialisés. Une mesure qu’il convient de compléter par l’obligation, pour tout acteur public, de déployer un service public à domicile pour nos concitoyens les plus isolés ou les plus en difficulté, ajoute l’association.

Inverser la vapeur en matière de fiscalité

« Nous plaidons également pour inverser la vapeur en matière de fiscalité », insiste Fabien Tastet. L’AATF combat l’idée que la seule façon de réformer un impôt est de le supprimer. Par ailleurs, les impôts proportionnels, « donc injustes », sont majoritaires. Or, les Français se montrent plus nuancés sur les sujets fiscaux. Près des deux tiers (63 %) d’entre eux considèrent que l’impôt est un bon outil pour financer les services publics locaux. L’AATF propose ainsi d’adapter la fiscalité des entreprises aux mutations de l’économie, en transformant l’actuelle taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) en impôt sur les entrepôts et surfaces de stockage de l’e-commerce. Plus des trois quarts (77 %) des Français approuvent ce qui s’apparenterait à un impôt local « Amazon », se félicite l’association. Les hauts fonctionnaires territoriaux souhaitent également la création d’un impôt universel local pour que tous les habitants contribuent au financement des services publics, alors que la suppression de la taxe d’habitation a limité aux seuls propriétaires l’assujettissement à l’impôt local des ménages.

Associer davantage les citoyens à la vie démocratique

Enfin, l’AATF est convaincue qu’il faut franchir une nouvelle étape dans l’association de nos concitoyens à la vie démocratique, sous peine de voir croître le désintérêt vis-à-vis des échéances électorales. L’association milite pour une mise en œuvre du vote par correspondance et une expérimentation du vote électronique (71 % des Français approuvent). Elle souhaite également la création d’un référendum d’initiative citoyenne (soutenue par 78 % des Français) et l’élection au suffrage universel direct des représentants des intercommunalités (84 % des Français y sont favorables). Enfin, l’AATF réitère son souhait de voir désormais pratiquer en France des audits citoyens, afin que nos concitoyens aient un droit de regard direct sur la conduite de l’action publique. 86 % des Français sont favorables à cette mesure, qui pourrait, par exemple, trouver une application d’actualité avec les Ehpad.

Au final, l’AATF soumet 40 propositions aux 12 candidats à l’élection présidentielle et au débat public. Celles-ci s’articulent autour de deux grands axes et de dix objectifs.

L’action publique au service du monde de demain

  • Renouer, sous de nouvelles formes, avec l’ambition d’universalisme du service public
  • Mettre en place un nouveau casting de l’action publique : la déconcentralisation ou la promotion du couple État local collectivités locales
  • Redonner le goût de la chose publique en stoppant la désaffection pour les métiers du service public et la crise de vocation des élus
  • Faire des fonctionnaires les ambassadeurs des enjeux du 21e siècle
  • Inventer les nouvelles formes de vie au travail

La résorption des fractures d’aujourd’hui

  • Résorber les inégalités de santé publique
  • Renforcer la solidarité et les liens générationnels
  • Faire contribuer les gagnants de la nouvelle économie
  • Lutter contre la fracture éducative en décrétant la mobilisation de tous les acteurs
  • Recréer le lien citoyen

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