Le rejet injustifié d’une offre anormalement basse ouvre un droit à indemnité du candidat évincé

Publié le 20 novembre 2020 à 9h43 - par

Le droit de la commande publique impose aux acheteurs qu’ils vérifient que les offres qui leur sont remises ne sont pas anormalement basses. Le rejet d’une offre anormalement basse n’est possible que si une procédure contradictoire avec le candidat concerné a été déclenchée au préalable.

Le rejet injustifié d’une offre anormalement basse ouvre un droit à indemnité du candidat évincé

Quelle que soit la procédure de passation mise en œuvre, il appartient à l’acheteur qui se voit remettre une offre paraissant anormalement basse, dans un premier temps, de solliciter de son auteur la communication de tous les éléments permettant d’en vérifier la viabilité économique, et, dans un second temps, d’éliminer cette offre si les justifications fournies par le candidat ne permettent pas d’établir cette viabilité.

Dans une décision du 13 novembre 2020, le Conseil d’État réaffirme le droit à indemnité d’un soumissionnaire au cas où son offre a été irrégulièrement écartée comme étant anormalement basse.

Le juge contrôle que les justifications apportées par l’entreprise sont suffisantes

Le fait, pour un pouvoir adjudicateur, de retenir une offre anormalement basse porte atteinte à l’égalité entre les candidats à l’attribution d’un marché public. En l’espèce, pour un marché de nettoyage, un pouvoir adjudicateur a demandé à un candidat d’apporter des précisions sur ses prix unitaires. Selon le Conseil d’État, ce n’est que « si les précisions et justifications apportées ne sont pas suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature, ainsi, à compromettre la bonne exécution du marché, il appartient au pouvoir adjudicateur de rejeter l’offre ».

La Haute juridiction confirme la décision de la Cour administrative d’appel sanctionnant l’éviction irrégulière de la société requérante compte tenu du caractère suffisant des justifications du prix de son offre en réponse à la demande de l’acheteur. Le juge d’appel n’a pas commis d’erreur de droit « au regard tant de la précision de cette demande que du prix proposé par la société candidate ». Cette position confirme que le dispositif de traitement des offres présumées anormalement basses n’a pas pour objet d’écarter une offre au seul motif que son prix, ou coût, est bas. C’est seulement si le soumissionnaire est dans l’incapacité de fournir des preuves expliquant de manière satisfaisante la cohérence du bas niveau de prix ou de coût que le caractère anormalement bas de l’offre est établi et qu’elle doit être écartée.

Une éviction irrégulière ouvrant un droit à indemnité

Les justifications étant suffisantes pour permettre au pouvoir adjudicateur de vérifier que son offre n’était pas manifestement sous-évaluée, la société requérante a droit à être indemnisée du préjudice subi. L’acheteur est condamné à verser une indemnité de 33 000 euros au titre du manque à gagner de l’entreprise résultant de son éviction du marché. Peu importe que l’accord-cadre à bons de commande ne comportait pas de clause fixant un montant minimum en valeur ou en quantité.

Dominique Niay

Texte de référence : Conseil d’État, 13 novembre 2020, n° 432791, Inédit au recueil Lebon


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