Il faut rejeter la candidature d’une personne publique en cas de distorsion de concurrence

Publié le 10 septembre 2019 à 9h23 - par

Les marchés publics sont passés par des pouvoirs adjudicateurs avec des opérateurs économiques publics ou privés, rien n’interdisant à une personne publique de participer à une procédure de mise en concurrence dès lors qu’elle ne bénéficie pas alors d’un avantage concurrentiel et que sa candidature réponde à un intérêt public.

Il faut rejeter la candidature d’une personne publique en cas de distorsion de concurrence

L’intérêt public doit constituer le prolongement de la mission de service public dont la collectivité publique a la charge

En l’espèce, pour un marché public relatif à la location et à l’entretien d’articles textiles, un centre hospitalier avait attribué le marché à un autre centre hospitalier. Une société candidate contestait la décision d’attribution au motif que si son offre avait été jugée techniquement meilleure, elle avait néanmoins été classée en deuxième position en raison d’un écart de notation défavorable sur le critère du prix.

Le juge d’appel rappelle que si aucun principe ni aucun texte ne fait obstacle à ce qu’un établissement public se porte candidat à l’attribution d’un contrat de commande publique pour répondre aux besoins d’une autre personne publique, il ne peut légalement présenter une telle candidature que si elle répond à un tel intérêt public, « c’est-à-dire si elle constitue le prolongement de la mission de service public dont l’établissement public de santé a la charge, dans le but notamment d’amortir des équipements, de valoriser les moyens dont dispose le service ou d’assurer son équilibre financier, et sous réserve qu’elle ne compromette pas l’exercice de cette mission ». Une fois admise dans son principe, cette candidature ne doit pas fausser les conditions de la concurrence. En particulier, le prix proposé par l’établissement public doit être déterminé en prenant en compte l’ensemble des coûts directs et indirects concourant à sa formation, sans qu’il bénéficie, pour le déterminer, d’un avantage découlant des ressources ou des moyens qui lui sont attribués au titre de ses missions de service public et à condition qu’il puisse, si nécessaire, en justifier par ses documents comptables ou tout autre moyen d’information approprié.

En l’absence d’intérêt public, la candidature de l’opérateur public doit être rejetée et ouvre un droit à indemnisation de la société arrivée seconde

Dans l’affaire soumise à la Cour, le centre hospitalier désigné attributaire du marché avait proposé un prix annuel plus de deux fois inférieur à celui de la société requérante classée seconde. Aucun élément produit ne permettant de justifier que le prix proposé par l’établissement public attributaire a été déterminé sans distorsion de la libre concurrence, la candidature du centre hospitalier ne peut être regardée comme légale.

Compte tenu du classement de la société requérante, son éviction apparaît directement liée à l’irrégularité ayant affecté cette procédure et lui ouvre ainsi un droit à la réparation du préjudice qui en résulte pour elle. Privée d’une perte de chance sérieuse d’obtenir le marché, elle obtient l’indemnisation du manque à gagner, non seulement de l’année initiale d’exécution du marché, mais également de la première année d’exécution suivante.

Texte de référence : CAA de Bordeaux, 3e chambre, 25 juillet 2019, n° 17BX03405, Inédit au recueil Lebon