« Les jeunes générations veulent trouver du sens à leur travail » Patrick Coroyer, président de l’ANDRHDT

Publié le 24 septembre 2019 à 6h28 - par

Les 19 et 20 septembre 2019, le conseil départemental du Gers à Auch accueillait le colloque annuel de l’Association nationale des DRH des territoires (ANDRHDT), sur le thème « Nouveaux agents, nouvelles générations, nouvelles demandes ». Avec, cette année, deux spécificités : des experts spécialistes apportaient un éclairage scientifique ou théorique aux débats et les participants pouvaient interagir depuis la salle, en numérique, avec les intervenants. Patrick Coroyer, président de l’ANDRHDT et directeur du département ressources humaines de la ville de Nantes et de Nantes Métropole, a accepté de répondre à nos questions.

"Les jeunes générations veulent trouver du sens à leur travail" Patrick Coroyer, président de l'ANDRHDT
Colloque annuel 2019 de l'ANDRHDTau Conseil départemental du Gers-Auch

Quelles sont les attentes professionnelles des nouvelles générations d’agents ?

Le rapport au temps de travail et l’articulation entre vie privée et vie publique ont évolué, en particulier à cause du numérique, et la question se pose désormais de l’aménagement du temps et de la façon dont s’organise le travail dans la vie. L’activité salariée, subie, les nouvelles générations n’ont plus envie de la subir. Se posent également de nouveaux enjeux, en dehors du temps de travail, comme le déplacement ou la souplesse d’organisation. Et ces générations, habituées à se faire leur propre opinion sur tout dans la société, cherchent à trouver encore davantage de sens à leur travail. D’où une demande de mobilité beaucoup plus forte, car l’agent qui ressent un manque de sens et qui ne comprend pas peut aller jusqu’au refus d’accomplir son travail ; et il ira alors chercher un poste ailleurs. C’est pareil vis-à-vis de l’employeur : la logique qui consiste à rester quarante ans dans le même métier, c’est fini. J’arrive dans une collectivité et je regarde ce qu’il s’y passe. Si je m’y trouve bien, je reste, sinon… je pars ailleurs. Un autre changement pour les plus jeunes concerne le lieu de travail. Ils veulent bouger, respecter le développement durable et souhaitent aménager des temps de pause, pour faire du sport ou aller chercher les enfants à l’école, par exemple. Ce, y compris dans la journée et ce quel que soit leur niveau d’activité. On constate aussi la demande de besoins immatériels, au-delà de la rémunération : considération, reconnaissance…

Quelles sont les conséquences de cette évolution au sein des collectivités ?

Il y a deux réactions. Spontanément, cela peut être un choc des cultures. Mais cela peut aussi être une émulation pour l’équipe. Avec les SMS et les téléphones portables, notre vie privée est rentrée sur le lieu de travail qu’on le veuille ou non, mais il faut refixer quelques règles… Organiser les pratiques par des chartes, par exemple, en autorisant les agents à répondre à un ou deux SMS personnels pendant une réunion mais pas à consulter Google n’importe quand. Cette évolution oblige aussi les collectivités à être plus en adéquation avec les usagers, qui sont du même modèle que les nouvelles générations. Ils souhaitent pouvoir faire leurs démarches en ligne 24h sur 24h. Et ce n’est pas seulement une question de générations. On ne peut plus proposer des files d’attente, des accueils avec des boxes fermés, des documents papier… Cette évolution ne s’est pas faite d’un seul coup. Quant à savoir si c’est mieux ou pas…

En quoi cela bouleverse-t-il le rôle du management ?

Le manager doit obligatoirement s’adapter car l’évolution est irréversible. Son rôle est plus pédagogique et moins directif. Il convient d’expliquer aux agents le sens de leur travail – pourquoi telle commande, pourquoi telle activité…- , beaucoup plus qu’avant, afin de les motiver. Le manager qui entraîne ses équipes en leur expliquant de façon pédagogique a plus de chances qu’ils restent. Il y a aussi une demande d’autonomie beaucoup plus forte des agents, ce qui est nouveau aussi, et du coup, ils sont également une source de proposition. Or, le fonctionnement territorial n’est pas très souple. La posture « je sais faire, mais il faudrait faire différemment » amène à des échanges qui ne sont pas acquis pour tout le monde. Quand le manager gère des équipes importantes et qu’il doit sans cesse tout expliquer, il a un peu l’impression de perdre son temps. Ce sujet est parfois tabou, car les chefs de service ne peuvent pas avouer qu’ils ne savent pas comment travaillent les jeunes générations et ils ne sont pas toujours capables de modifier leur mode managérial. Quant aux jeunes, ils n’ont pas forcément conscience qu’ils provoquent un tel bouleversement puisque pour eux, c’est naturel.

Propos recueillis par Martine Courgnaud – Del Ry

 

Pour en savoir plus : Colloque « Nouveaux agents, nouvelle génération, nouvelles demandes ! Quels modèles managériaux pour garantir une dynamique collective ? », ANDRHDT, 19 et 20 septembre 2019


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