Patrick Coroyer, président de l’ANDRHDT : « Il faut croire au fonctionnaire heureux »

Publié le 4 octobre 2018 à 9h20 - par

L’ANDRHDT (Association nationale des DRH des Territoires) a réuni ses adhérents les 20 et 21 septembre à Nantes dans le cadre de son congrès. Sous l’impulsion de son nouveau président, Patrick Coroyer, quatre ateliers ont permis aux DRH de se projeter sur l’avenir de  la fonction publique territoriale en se colletant à des thèmes jugés jusqu’ici tabous.

Patrick Coroyer, président de l’ANDRHDT : « Il faut croire au fonctionnaire heureux »
Patrick Coroyer. Crédit photo : Droits réservés

Pour tout comprendre

Une double journée vivifiante et révélatrice d’une volonté de l’association d’essaimer le ressenti des DRH auprès des instances représentatives de la FPT. Entretien avec Patrick Coroyer.

Avec quel sentiment sortez-vous du congrès de Nantes ?

Notre objectif était de formuler un certain nombre de propositions pour permettre à l’association d’aller les défendre auprès des instances représentatives de la fonction publique, mais aussi des parlementaires ou de toutes les personnes qui souhaitent disposer d’une vision juste du travail que nous menons. J’ai, par exemple, rencontré la députée Émilie Chalas (Ndlr, rapporteure pour avis sur la fonction publique dans le cadre du budget 2018) ou encore Jean-Robert Massimi (Ndlr, directeur du Conseil supérieur de la FPT). Nous formulons huit propositions sur des thèmes différents (cf. encadré). Avec des prises de position iconoclastes, comme sur la rentabilité de la FPT. Oui, c’est une réalité économique, environnementale et sociale ; elle entre donc dans la ogique du service public.

Un fonctionnaire est-il rentable ? Rien ne permet vraiment de l’évaluer aujourd’hui. Beaucoup de rapports ont été écrits sur le temps de travail. Dans certains secteurs, sa quantification est possible (restauration collective, ramassage des ordures, etc.) : ailleurs, c’est plus difficile. Au-delà du temps de travail, cette rentabilité doit se mesurer à l’apport du service public : la mise en place du bio dans les cantines, la diminution de l’empreinte écologique via les transports en commun, etc. Il faut donc comparer le comparable.

En fait, il est grand temps d’affirmer ce qu’est la FPT, ne plus se laisser enfermer dans une image construite par des personnes qui ne la connaissent pas…

C’est exactement ça… Je reviens sur la notion de rentabilité. La rentabilité d’un agent doit être établie à partir de critères impactant sur le service public. Face au privé, nous n’avons plus à rougir. Que nos coûts soient supérieurs ou inférieurs, le service public dépasse la simple notion économique, même s’il faut toujours garder à l’esprit la question économique.

L’employabilité des agents a aussi entraîné de beaux débats…

Les fonctionnaires territoriaux doivent savoir qu’ils resteront peut être plus de 40 ans dans la FPT mais pas sur le même métier. L’emploi à vie ne fait d’ailleurs plus rêver ; il faut donc aider les agents à passer d’un métier à un autre, il faut les aider à changer quand les premiers signes de l’usure apparaissent. Cette manière de faire est attractive et c’est un plus dont nous disposons dans nos collectivités : permettre aux agents de réfléchir aux modalités de leurs changements.

Sur la mobilité, c’est la même chose, il faut faire bouger les lignes. Si l’on n’explique pas à un agent qu’il faudra qu’il change de territoire pour faire valider son concours, il se confrontera à quelques désillusions. Si vous passez un concours Atsem et que vous décidez de rester dans votre commune, il est possible que les offres n’affluent pas autant que vous l’espérez.

Vous souhaitez enfin renforcer les liens avec les organisations professionnelles (CNFPT, CSFPT, etc.). Dans quel but ?

Je crois que les DRH ont une vision juste de ce que vivent les agents. On parle beaucoup d’égalité femme-homme, par exemple. Or, savez-vous que, dans le cadre d’un concours, lorsqu’une femme enceinte a réussi l’écrit mais ne peut passer l’oral parce qu’elle a accouché, sa réussite à l’écrit est annulée. On a souvent remonté cette anomalie, sans succès. Il est temps qu’on en finisse. Si les examens sont inadaptés à la fonction publique, il faut les changer. Il faut croire au fonctionnaire heureux. Dans le privé, il gagnera peut-être mieux sa vie. Mais dans le public, on pourra travailler sur l’offre sociale, la prévoyance, la mutuelle, les tickets restaurants. Arrêtons de rougir !

Stéphane Menu

 

Des propositions décalées

Huit ateliers et plusieurs sillons à creuser tout au long des prochains mois… l’ANDRHDT connaît désormais sa feuille de route. Elle propose par exemple de créer un Medef local de la FPT pour favoriser recrutement, reclassement ou encore mobilité. Elle dit banco sur les départs volontaires et les accompagnements à la reconversion. Enfin, elle veut multiplier les passerelles entre les autres versants de la FP et le privé. À suivre.