Elles peuvent remettre en cause l’émission d’actes unilatéraux habituellement pris par les acheteurs. Il en est ainsi de la possibilité de résiliation d’un marché pour un marché de commissaire aux comptes qui ne peut s’effectuer sans intervention préalable d’une décision du tribunal de commerce.
Une saisine juridictionnelle préalable à la décision de résiliation
Clause exorbitante de droit commun, un pouvoir adjudicateur peut toujours procéder à la résiliation d’un marché sans faute du cocontractant, ou, après mise en demeure, pour faute du titulaire. En l’espèce, un établissement public de santé avait, en application de l’article L. 6141-1 du Code de la santé publique, attribué à un cabinet une mission de certification de ses comptes. Après mise en demeure de respecter les obligations contractuelles lui incombant, l’hôpital avait résilié pour faute ce marché public. Après avoir adressé une demande préalable tendant à l’indemnisation des préjudices subis en raison de la résiliation du marché, le titulaire a également saisi le juge du contrat afin qu’il ordonne la reprise des relations contractuelles. La Cour se prononce d’abord sur le caractère régulier ou irrégulier de la décision de résiliation.
En application des dispositions législatives prévues par le Code de la santé publique et du Code du commerce, un marché ayant pour objet de confier une mission de certification des comptes à un commissaire aux comptes ne peut pas être résilié pour faute, quelles qu’en soient les clauses, sans une intervention préalable d’une décision du tribunal de commerce prononçant le relèvement de ce commissaire aux comptes. Par suite, l’établissement de santé ne pouvait résilier la mission de certification des comptes sans saisir, au préalable, le tribunal de commerce pour obtenir le relèvement du commissaire aux comptes.
Un manquement particulièrement grave
La procédure de relèvement prévue par le Code de commerce a pour objet de garantir l’indépendance du commissaire aux comptes en réservant le relèvement du commissaire aux comptes au seul juge et non à l’organisme dont il certifie les comptes. La méconnaissance de cette procédure constitue, par suite, un manquement particulièrement grave. Cependant, le juge n’ordonne pas la reprise des relations contractuelles au motif que celle-ci porterait une atteinte excessive à l’intérêt général et aux droits du titulaire d’un nouveau contrat. Par contre, l’entreprise est fondée à demander à être indemnisée sur la base de la marge nette qu’elle aurait réalisée à l’occasion de l’exécution du marché jusqu’à son terme.
Cette indemnité ne constituant pas la contrepartie d’une prestation, mais la réparation d’un préjudice qui est dissociable de la prestation fournie, elle n’a pas à être majorée de la taxe sur la valeur ajoutée. Enfin, la résiliation du marché litigieux étant nécessairement connue par les acteurs locaux, la société obtient également l’indemnisation du préjudice tenant à l’atteinte à sa réputation.
Texte de référence : CAA de Nancy, 4e chambre, 23 juillet 2020, n° 19NC00367, Inédit au recueil Lebon