La mission d’information sur la gestion durable de l’eau du Sénat pointe l’urgence d’agir

Publié le 16 août 2023 à 9h40 - par

La mise en œuvre des politiques de l’eau repose très largement sur les collectivités. Le rapport de la mission d’information sur la gestion durable de l’eau du Sénat du 11 juillet 2023 émet certaines propositions pour améliorer leur intervention locale.

La mission d'information sur la gestion durable de l'eau du Sénat pointe l'urgence d'agir
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Constituée en février 2023 à l’initiative du groupe socialiste, écologiste et républicain, la mission d’information sur la gestion durable de l’eau du Sénat a adopté son rapport à l’unanimité le 11 juillet. Elle estime notamment que, si la mise en œuvre des politiques de l’eau est forcément locale, étant données les différences entre territoires, une bonne gouvernance de l’eau commence par une stratégie lisible, comprise et partagée.

Pour cela, deux orientations devraient figurer dans le Code de l’environnement. Tout d’abord, la sobriété, qui s’impose compte tenu des perspectives de raréfaction de la ressource en eau et des risques de dégradation des milieux : baisse de 10 % des prélèvements et des consommations, changements de pratiques… Ensuite, la contractualisation, avec des contrats d’engagement réciproques déclinant les actions des différents intervenants du territoire : services d’eau potable, professions agricoles, gestionnaires des réserves hydroélectriques ou destinées à la navigation, collectivités territoriales, agences de l’eau. L’échelle pertinente, dans un premier temps, est celle des bassins avant de descendre à celle des sous-bassins.

Parmi les cinquante trois propositions du rapport, certaines concernent les collectivités, sur qui repose très largement la mise en œuvre des politiques de l’eau. Elles ont, en effet, la maîtrise d’ouvrage des équipements du « petit cycle de l’eau » (assainissement et distribution) et, en grande partie, de ceux destinés à agir sur le « grand cycle » : protection et restauration des écosystèmes aquatiques et des zones humides, lutte contre les pollutions, conservation des eaux superficielles et souterraines, maîtrise de la qualité des rejets…

Ainsi, les collectivités devraient prendre en compte l’eau dans les documents d’urbanisme (Sraddet et Scot). Ils seraient soumis à l’avis des comités de bassin et des commissions locales de l’eau, créées dans chaque sous-bassin. La mission propose d’affirmer un rôle d’ingénierie des départements et de créer une mission d’appui à l’ingénierie dans les Outre-mer, ainsi que de mettre à jour les schémas départementaux d’interconnexion d’eau potable.

Les maîtres d’ouvrage devraient réaliser dans les cinq ans un diagnostic stratégique de connaissance de leur patrimoine et d’analyse financière, adossée à un programme pluriannuel d’investissement. Par ailleurs, il conviendrait d’imposer un taux de rendement des réseaux et de pénaliser les fuites. La mission rappelle qu’au rythme actuel, il faudrait plus de cent cinquante ans pour renouveler tous les réseaux d’eau des villes moyennes et de leurs communautés, et cent quarante ans pour les réseaux d’assainissement collectif. Un vieillissement qui se traduit par des fuites équivalant à un taux de perte moyen de 20 %.

Afin d’améliorer la gestion locale de l’eau, la mission suggère de regrouper les petites unités d’assainissement. Une gestion intercommunale à plus vaste échelle favorise l’interconnexion des réseaux, qui accroît la résilience des systèmes de distribution d’eau potable Elle propose aussi de favoriser les stratégies d’infiltration d’eau de pluie et de désimperméabilisation, et de mutualiser l’exercice de la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi). Les lois Maptam et NOTRe ont confié la compétence Gemapi aux intercommunalités, de façon exclusive depuis la fin de la période de transition, fixée au 1er janvier 2020.

Quant au transfert des compétences eau potable et assainissement, il doit intervenir au plus tard le 1er janvier 2026, au bénéfice de l’ensemble des communautés de communes. Au 1er octobre 2022, 663 communautés de communes ne l’exerçaient toujours pas. Or, en situation de crise, les plus petits services d’eau potable (syndicats ou communes isolées n’ayant pas transféré la compétence à une structure intercommunale et n’ayant pas mis en place d’interconnexions) ne disposent pas de la taille critique financière et technique pour adopter en urgence des solutions alternatives. Au pic de la crise, elles doivent recourir à la distribution de bouteilles ou au citernage. L’été 2022, plus de 2 000 communes ont connu des ruptures ou des risques de rupture d’approvisionnement en eau potable.

Marie Gasnier


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