Des justifications insuffisantes justifient le rejet d’une offre comme anormalement basse

Publié le 11 avril 2023 à 15h50 - par

L’acheteur public est tenu de rejeter les offres anormalement basses. Selon le Code de la commande publique, une offre anormalement basse est une offre dont le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché.

Des justifications insuffisantes justifient le rejet d'une offre comme anormalement basse
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En vertu de l’article L. 2152-6 du Code de la commande publique « L’acheteur met en œuvre tous moyens lui permettant de détecter les offres anormalement basses. Lorsqu’une offre semble anormalement basse, l’acheteur exige que l’opérateur économique fournisse des précisions et justifications sur le montant de son offre (…) ». Selon le Conseil d’État, les justifications présentées par l’opérateur économique doivent être précises alors même que la demande de l’acheteur de précisions sur l’offre financière est formulée de manière générale.

Les précisions et justifications apportées doivent être suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué

En l’espèce, une entité adjudicatrice avait lancé une procédure de passation d’un accord-cadre à bons de commande de cinq ans pour des travaux de réparation et d’extension des réseaux d’assainissement. Une société, qui estimait que l’offre qu’elle avait présentée dans le cadre de cette consultation a été écartée à tort comme anormalement basse, avait saisi le juge des référés du tribunal administratif d’une demande tendant à la suspension de l’exécution de la décision l’écartant et à ce qu’il soit enjoint à l’acheteur de reprendre la procédure au stade de la sélection des offres.

Selon le Conseil d’État, quelle que soit la procédure de passation mise en œuvre, il incombe au pouvoir adjudicateur qui constate qu’une offre paraît anormalement basse de solliciter auprès de son auteur toutes précisions et justifications de nature à expliquer le prix proposé, sans être tenu de lui poser des questions spécifiques. Si les précisions et justifications apportées ne sont pas suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché, il appartient au pouvoir adjudicateur de rejeter l’offre.

Un écart important de prix au regard des offres concurrentes et de l’estimation de l’acheteur permet de qualifier une offre anormalement basse

Le caractère anormalement bas ou non d’une offre ne saurait résulter du seul constat d’un écart de prix important entre cette offre et d’autres offres que les explications fournies par le candidat ne sont pas de nature à justifier. Il appartient notamment au juge du référé précontractuel de rechercher si le prix en cause est en lui-même manifestement sous-évalué et, ainsi, susceptible de compromettre la bonne exécution du marché.

En l’espèce, l’acheteur avait demandé à la société requérante d’apporter, d’une part, les explications générales de nature à justifier les prix proposés, lesquels étaient en deçà de l’estimation et de la moyenne des autres offres avec des écarts importants et, d’autre part, tous éléments justificatifs pour une liste non exhaustive de prestations dont les coûts et prix apparaissaient incohérents. Au vu de la réponse de la société, l’acheteur a rejeté son offre comme anormalement basse. Il a relevé, en premier lieu, que la société n’avait pas produit d’explication générale sur les tarifs appliqués, lesquels apparaissaient particulièrement bas en comparaison de l’estimation du pouvoir adjudicateur et des prix résultants des offres concurrentes. En deuxième lieu, les détails complémentaires demandés pour certaines prestations n’apparaissaient pas en adéquation avec le descriptif du chantier-exemple produit dans le mémoire technique de l’entreprise. En troisième lieu, les détails complémentaires demandés pour certaines prestations comportaient toujours des imprécisions et carences.

Enfin, les réponses apportées par la société comportaient des incohérences dans les justifications apportées, ces deux dernières considérations étant assorties d’exemples précis. Le Conseil d’État confirme la légalité de la décision écartant l’offre comme anormalement basse.

Texte de référence : Conseil d’État, 7e chambre, 14 mars 2023, n° 465456, Inédit au recueil Lebon


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