Quelle est l’étendue du droit à réparation de l’acheteur en cas de pratiques anticoncurrentielles ?

Publié le 18 août 2020 à 8h15 - par

Les ententes anticoncurrentielles conduisent à une augmentation significative des marchés conclus. En tant qu’acheteurs, les administrations publiques sont donc victimes de ces pratiques. Cette infraction économique peut donner lieu à réparation dans le cadre d’un contentieux mené auprès de la jurisprudence administrative.

Quelle est l’étendue du droit à réparation de l’acheteur en cas de pratiques anticoncurrentielles ?

Dans une décision du 10 juillet 2020, le Conseil d’État a précisé, dans les suites de l’affaire d’entente illégale entre plusieurs entreprises du secteur des panneaux de signalisation routière, les conséquences contractuelles et indemnitaires qui pouvaient être tirées de telles situations.

Un comportement dolosif justifiant la saisine du juge administratif

En l’espèce, l’Autorité de la concurrence a condamné huit entreprises pour s’être entendues sur plusieurs années sur la répartition et le prix des marchés portant sur le secteur des panneaux de signalisation. Suite à la confirmation de la pratique illégale par la Cour de cassation, l’acheteur a demandé une indemnité pour réparer le surcoût lié aux pratiques anticoncurrentielles.

Selon la Haute assemblée, lorsqu’une personne publique est victime, de la part de son cocontractant, de pratiques anticoncurrentielles constitutives d’un dol ayant vicié son consentement, elle peut saisir le juge administratif, alternativement ou cumulativement, de conclusions tendant à ce que celui-ci prononce l’annulation du marché litigieux et tire les conséquences financières de sa disparition rétroactive. Ensuite, l’acheteur peut saisir le juge de conclusions tendant à la condamnation du cocontractant, au titre de sa responsabilité quasi-délictuelle, à réparer les préjudices subis en raison de son comportement fautif.

Une indemnisation du préjudice lié au surcoût d’une pratique dolosive

En cas d’annulation du contrat en raison d’une pratique anticoncurrentielle imputable au cocontractant, ce dernier doit restituer les sommes que lui a versées la personne publique, mais peut prétendre en contrepartie, sur un terrain quasi-contractuel, au remboursement des dépenses qu’il a engagées et qui ont été utiles à celle-ci, à l’exclusion, par suite, de toute marge bénéficiaire.

En outre, si, en cas d’annulation du contrat, la personne publique ne saurait obtenir, sur le terrain quasi-délictuel, la réparation du préjudice lié au surcoût qu’ont impliqué les pratiques anticoncurrentielles dont elle a été victime, dès lors que cette annulation entraîne par elle-même l’obligation pour le cocontractant de restituer à la personne publique toutes les dépenses qui ne lui ont pas été utiles.

En outre, elle peut demander la réparation des autres préjudices que lui aurait causés le comportement du cocontractant. En l’espèce, le pouvoir adjudicateur est fondé à demander l’annulation de l’arrêt de la Cour administrative d’appel en tant qu’il rejette ses conclusions principales tendant à la restitution des sommes versées à la société Lacroix Signalisation.

Dominique Niay

Texte de référence : Conseil d’État, 7e – 2e chambres réunies, 10 juillet 2020, n° 420045, Publié au recueil Lebon


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