Une remise en ordre inachevée du respect de la durée annuelle de travail
Par dérogation aux règles de droit commun, les employeurs publics locaux et certaines administrations avaient maintenu des régimes de travail plus favorables aux agents, c’est-à-dire inférieurs à la durée légale de 1 607 heures. L’abrogation de ces régimes dérogatoires par la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique (LTFP) leur a imposé la redéfinition de nouveaux cycles de travail tout en maintenant le droit pour les agents faisant l’objet de sujétions particulières de continuer à bénéficier légalement de cycles de travail inférieurs.
Les régimes dérogatoires au sein de la fonction publique de l’État, dont le rapport de l’Inspection générale des finances de 2019 avait souligné l’ampleur, n’ont pas été revus. En conséquence, la proportion d’agents de l’État travaillant moins de 1 607 heures demeure identique. Elle a même augmenté notamment pour tenir compte de nouvelles situations, comme pour l’administration des douanes afin de faire face au Brexit.
Le statu quo sur les régimes dérogatoires au sein de la fonction publique de l’État est très préjudiciable à l’exercice du contrôle de légalité exercé par les préfectures pour la fonction publique territoriale, les collectivités locales justifiant le maintien de leur propre régime au regard du principe de parité. Des instructions nombreuses ont été données aux préfets pour exercer avec diligence ce contrôle sur les délibérations des collectivités locales. Bon nombre d’entre elles ont effectivement délibéré sur le temps de travail. Mais, l’exercice demeure inachevé.
Les collectivités ont maintenu un nombre élevé de régimes dérogatoires
Plusieurs collectivités ont maintenu un nombre élevé de régimes dérogatoires, quand d’autres ont contourné les obligations par des délibérations de régularisation « de façade ». Le contrôle de légalité préfectoral peine à les sanctionner, ne disposant pas, à la différence des chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC), des moyens d’investigation leur permettant d’apprécier leur réalité pratique.
De plus, la DGAFP a adopté une position en retrait sur ce sujet pourtant majeur. Outre l’absence déjà mentionnée du rapport à présenter au Parlement sur les actions mises en œuvre pour assurer le respect de la durée effective du temps de travail dans la fonction publique de l’État, font aussi défaut les décrets relatifs aux mesures d’adaptation tenant compte des sujétions auxquelles sont soumis certains agents de l’État et aux autorisations spéciales d’absence.
Par ailleurs, le retard pris dans la publication de certains textes d’application altère la portée de la loi de transformation de la fonction publique. Il en est ainsi pour l’encadrement du dispositif très sensible des autorisations spéciales d’absence (ASA). Ce bilan d’application très mitigé de la loi de 2019 portant transformation de la fonction publique est publié au moment même où le Gouvernement annonce une seconde loi d’importance pour changer à nouveau les pratiques dans la fonction publique.
Source : La loi de transformation de la fonction publique : bilan d’étape, Rapport de la Cour des comptes, novembre 2023