TLPE : un outil fiscal plus que paysager

Publié le 28 novembre 2023 à 9h45 - par

La taxe locale sur la publicité extérieure (TLPE) est un outil fiscal à manier avec précaution. Mode d’emploi.

TLPE : un outil fiscal plus que paysager
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En 2022, la TLPE a rapporté 154 M€ dans 1 930 communes, selon le cabinet Leyton(1). Peu d’EPCI l’ont instituée(2), même si ceux compétents en voirie, zones d’aménagement concerté ou d’activités économiques le peuvent. Il faut en effet l’accord, difficile à obtenir, des deux tiers au moins des conseils municipaux de l’EPCI pour plus de la moitié de la population ou inversement. Vichy Communauté l’a adoptée en 2016, « avec attributions de compensation aux cinq communes la pratiquant auparavant et harmonisation des tarifs sur la moyenne », selon Maxime Sanvoisin, chargé de la TLPE.

Exonérations multiples

L’institution de la TLPE, possible depuis 2009, se fait par délibération avant le 1er juillet de l’année précédant l’imposition, sur tout le territoire de la commune ou de l’EPCI et tous les supports publicitaires fixes et visibles des voies de circulation publique : (pré)enseignes et dispositifs publicitaires. La collectivité fournit les justificatifs de liquidation et la Trésorerie recouvre.

Adopter la TLPE est toujours délicat vis-à-vis des entreprises. Le plus souvent, les élus, soucieux de ne pas fragiliser les petits commerces, adoptent certaines exonérations (art. L. 2333-7 du Code général des collectivités territoriales – CGCT) et vont même au-delà de l’exonération de droit commun en dessous de 7 m2 cumulés d’enseignes, certaines (Vichy Communauté, Limoges…) exonérant totalement entre 7 et 12 m2 et à 50 % entre 12 et 20 m2. Ainsi ne sont taxées que les grosses activités. Une exonération totale ou partielle peut concerner les dispositifs publicitaires sur mobiliers urbains (art. L. 2333-8 du CGCT), ces derniers étant financés par des afficheurs, rémunérés par les recettes publicitaires.

On notera que le décret d’application du 11 mars 2013, la note d’information de la Direction générale des collectivités locales du 13 juillet 2016 et la jurisprudence ont clarifié la façon de compter, ce qui évite de surtaxer…

Contrôle nécessaire

N’oublions pas l’objectif paysager premier de la taxe. Les collectivités informeront donc la première année les entreprises (par internet, courrier, réunion publique, via le manager de centre-ville) ou lors d’une demande d’autorisation. « Opérer une taxation à blanc en année n-1, permet aux entreprises d’enlever ou réduire des panneaux au préalable, conseille Antoine Cote-Colisson, expert TLPE à Leyton. Depuis le 1er janvier 2022, seules les entreprises qui ajoutent, suppriment ou modifient des supports doivent faire une déclaration avant le 30 juin et dans les deux mois de la modification, ce qui doit s’accompagner d’un recensement annuel. En réalité, elles ne le font pas… ». Dans ces conditions, un contrôle est nécessaire, soit en interne (avec un télémètre et le SIG à Vichy par exemple), soit en faisant appel à un cabinet d’expert : recensement de terrain, relance des entreprises pour les déclarations, vérifications de celles-ci, réponses aux contestations, émission des titres de recettes, taxation d’office en l’absence de déclaration.

In fine, la TLPE améliore-t-elle le paysage ? À Vichy Communauté… les recettes ont augmenté, pareil à Limoges de 250 000 euros en 2009 à 800 000 euros aujourd’hui, avec une partie due au recrutement d’un contrôleur des taxes en 2020. La TLPE n’aurait aucun impact sur les grands groupes, mais certaines TPE et PME passent elles sous les 20 ou 12 ou 7 m2 comme le signalent Vichy Communauté ou Limoges, si bien qu’« entre la première et la deuxième année d’institution de la taxe, on observe souvent une baisse de 15 à 20 % des recettes », selon Antoine Cote-Colisson. Le durcissement du Code de l’environnement (art. L. 580-1 à 45, surtout la réglementation nationale et les règlements locaux de publicité – RLP – facultatifs) sont plus efficaces selon nos interlocuteurs(3). À Limoges par exemple, c’est plus le RLP révisé en 2020 qui a fait reculer de 30 % les dispositifs publicitaires, limités désormais à 8 m2 (contre 12 auparavant) ou interdits dans le centre.

Frédéric Ville


(1) D’après les balances comptables des communes ayant collecté plus de 2 000 €. À Marseille, la taxe a rapporté 3,8 M€ et à Paris, 12 M€.

(2) Vichy Communauté (Allier), Niort Agglomération (Deux-Sèvres) et la CA de Saintes (Charente-Maritime).

(3) Interdiction de la publicité hors agglomération, zones d’interdiction, conditions d’autorisation, réduction de 12 à 10,50 m2 des dispositifs publicitaires d’ici 2027 (décret du 30 octobre 2023).

Les tarifs de la TLPE

Le tarif annuel est fixé dans la limite de montants maximaux nationaux (art. L. 2333-9 du CGCT) qui sont pour 2024 : 17,70 €/m2 (collectivités < 50 000 hab.), 23,30 €/m2 (de 50 et 199 999 hab.) et 35,30 €/m2 (200 000 hab. et plus) pour les dispositifs et pré-enseignes inférieurs à 50 m2, avec doublement si plus de 50 m2. Idem pour les enseignes inférieures à 12 m2, avec doublement entre 12 et 50 m2 et quadruplement pour plus de 50 m2, les coefficients multiplicateurs étant obligatoires. Ces tarifs maximaux sont réactualisés chaque année, l’indexation devant se faire en l’absence de délibération contraire (art. L. 2333-12 du CGCT), même si des collectivités maintiennent des tarifs non indexés sans délibération. Ainsi à Vichy Communauté, les tarifs seront, pour la première fois depuis 2016, revus en 2024 avec + 3 €/m2, mais restent inférieurs de – 21,5 % aux maxima. Limoges applique elle « 10,80 €/m2 en tarif de base pour les enseignes pour ne pas impacter trop les commerçants, mais le maximum pour les dispositifs publicitaires et le numérique », selon Catherine Lorthois, directrice du domaine public à la ville. Les dispositifs numériques sont taxés trois fois plus que leurs homologues non numériques..


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