Le PLF 2024 (art. 24) augmente, à périmètre courant, le montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de 213,7 M€ par rapport à 2023, « après 5 années de stabilité et une augmentation engagée en 2023… » mais aussi après une diminution de 11,2 milliards de la part forfaitaire de la DGF entre 2013 et 2017. 60 % des communes verront leur DGF augmenter en 2024. Dans le détail, la dotation de solidarité urbaine (DSU) progresse de 90 M€ et la dotation de solidarité rurale (DSR) de 100 M€. Qu’en pensez-vous ?
Le Gouvernement ne s’estime pas responsable des baisses antérieures1. La hausse se poursuit donc pour les DSU et DSR, puisqu’en 2023 celles-ci avaient augmenté respectivement de 90 à 200 M€. À vrai dire, cette progression – qui traduit un effort pour renforcer la péréquation – est constante depuis bien des années et a même eu lieu pendant la baisse historique de la DGF. Ce qui a changé depuis 2023, c’est qu’elle n’est plus financée à enveloppe fermée, mais est réellement supplémentaire. Malgré tout, les représentants des collectivités locales considèrent que ce n’est pas suffisant.
Ces 190 M€ d’augmentation des DSU et DSR sont complétés par une croissance de 90 M€ de la dotation d’intercommunalité (DI) pour 2024 dont le tiers (30 M€) est financé par un abondement (réelle augmentation) et le reste par un écrêtement de la dotation de compensation des EPCI à fiscalité propre (art. 24). Là aussi, les collectivités y gagnent ?
C’est classique. Rappelons que la dotation de compensation a pallié la disparition de la part salaire de la taxe professionnelle entre 1998 et 2003 et qu’elle a été attribuée principalement aux EPCI au moment où se mettait en place la fiscalité professionnelle unique à leur profit. Au départ, la compensation était indexée, puis il y a eu stabilisation et enfin cette dotation est devenue une variable d’ajustement intégrant la DGF. Depuis, les EPCI ont subi jusqu’en 2023 un écrêtement (prélèvement) de 2 à 2,5 % par an sur cette dotation pour financer la hausse des autres composantes. Ce qui change pour 2024, c’est que cet écrêtement est moindre (60 M€), puisqu’une partie de l’augmentation de la DI est financé par un abondement (30 M€ comme en 2023).
Le nouveau zonage pour la taxe sur les logements vacants (TLV) perçue par l’État passe de 1 140 communes à 3 693 en 20242. Les communes nouvelles dans ce zonage et qui avaient institué la taxe d’habitation sur les logements vacants (THLV) en perdront le bénéfice, tout comme les EPCI qui avaient institué cette THLV ne pourront plus la percevoir sur les communes entrant dans le zonage TLV (art. 25). Les communes concernées pourront instituer la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) et autres locaux meublés. Mais comme, cela ne permettra pas toujours de compenser la perte de THLV, le Gouvernement compensera intégralement la suppression de la THLV pour toutes les communes et EPCI concernés. Les collectivités sont-elles gagnantes ?
La TLV et la THLV ne pouvant coexister sur un même territoire, les communes ayant institué la THLV vont donc la perdre. Mais une commune peut avoir beaucoup de logements vacants et peu de résidences secondaires. Le rendement de la nouvelle THRS peut donc être inférieur à celui de l’ancienne THLV, notamment dans les communes urbaines avec logements vacants mais dépourvues de résidences secondaires. Ceci a lieu dans un contexte où la déclaration des propriétaires de l’usage de leurs biens, du fait de la suppression de la TH, pourrait modifier la donne : des résidences secondaires deviendraient principales et inversement. La THRS à percevoir est donc incertaine. Il y aurait donc des territoires qui, même s’ils augmentaient leur THRS de 60 % comme le conseillait le Gouvernement – ce qui est relativement impopulaire –, auraient néanmoins une perte par rapport à l’ancienne THLV. C’est donc pour cela qu’il y aura une compensation intégrale de l’ancienne THLV (ndlr : pour un montant total de 24,7 M€), indépendamment du fait que les communes ou EPCI choisissent ou non d’augmenter la THRS. Une compensation différentielle serait sans doute compliquée à calculer chaque année.
D’autres aspects du PLF impactent-ils les collectivités locales ?
La suppression de la CVAE, effective pour les collectivités locales depuis le 1er janvier 2023, le sera finalement pour les entreprises en 2027. Du coup, les collectivités aimeraient bien récupérer ce dynamisme. Le président d’Intercommunalités de France, Sébastien Martin, a ainsi saisi le ministre chargé des Comptes publics pour lui demander que la dynamique de la CVAE « revienne aux territoires » (ndlr : notamment « si la TVA affectée aux intercommunalités en compensation de la suppression de la CVAE s’avérait moins dynamique que la CVAE que l’État continuera de percevoir »). Mais je doute que cela aboutisse… Sinon, si beaucoup de dispositions de ce PLF 2024 affectent les collectivités locales, il n’y a rien de déterminant. Ce ne sera pas un PLF marquant pour les collectivités locales.
Propos recueillis par Frédéric Ville
(1.) La DGF avait baissé sous la présidence de François Hollande.
(2.) Voir liste des communes fixée par le décret du 25 août 2023
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