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Simplification du droit de l’urbanisme et du logement: l’essentiel de la loi Huwart

Publié aujourd'hui à 10h00 - par

Afin de simplifier les procédures en matière d’urbanisme et d’aménagement et de faciliter la construction de logements sans dégrader les garanties démocratiques environnementales et patrimoniales, la proposition de loi déposée le 1er avril 2025 par le député Harold Huwart et examinée selon la procédure accélérée a finalement été promulguée le 26 novembre et publiée au JO le 27 novembre 20251 à l’issue d’un examen du Conseil constitutionnel qui a censuré partiellement sur le fond un article de cette loi et, pour des raisons de procédure, douze autres articles2. Le point sur ces mesures.

Simplification du droit de l’urbanisme et du logement : l'essentiel de la loi Huwart
© Par Francesco Scatena - stock.adobe.com

Comportant des dispositions très techniques, cette loi vise à répondre aux difficultés que rencontre aujourd’hui le secteur du logement, avec une chute du volume des constructions neuves et de logements sociaux ou la baisse des ventes dans l’immobilier ancien.

Les mesures adoptées pour simplifier les procédures d’urbanisme et le contentieux

En premier lieu, la loi n° 2025-1129 du 26 novembre 2025 offre aux élus locaux des marges de manœuvres accrues en matière de planification.

La loi dispense d’évaluation environnementale les procédures de modification d’un plan local d’urbanisme (PLU) ayant pour objet la rectification d’une erreur matérielle ou la réduction de la surface d’une zone U ou AU3.

Elle réduit à deux procédures au lieu de quatre – la révision et la modification – l’évolution des documents d’urbanisme afin de pouvoir les adapter plus rapidement aux projets locaux ; la modification devient le principe tandis que la révision se trouve être strictement réservée aux évolutions structurantes impactant les orientations générales du plan d’aménagement et de développement durable (PADD).

Par décision motivée du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunal (EPCI) compétent, les projets d’élaboration ou de révision des documents d’urbanisme (PLU4, Schéma de cohérence territoriale (SCoT)5, carte communale6) peuvent être soumis à la participation du public par voie électronique (PPVE) plutôt qu’à enquête publique.

Ces trois dispositions entrent en vigueur le 26 mai 2026 et ne s’appliquent pas aux procédures d’évolution des SCoT – dont par ailleurs la caducité est supprimée par la loi – ou des PLU en cours à cette date.

Afin de mutualiser les coûts et de simplifier la gouvernance, la loi prévoit pour les EPCI compétents la possibilité de fusionner en un document d’urbanisme unique (DDU) le SCoT et le PLU intercommunal (PLUi) lorsque leurs périmètres sont identiques7. Le DDU est alors élaboré, révisé ou modifié selon les modalités du PLU.

En deuxième lieu, la loi renforce les pouvoirs du maire dans l’instruction des autorisations d’urbanisme en lui conférant la possibilité d’octroyer légalement de très nombreuses dérogations aux règles du PLU8 et en assouplissant les règles relatives au stationnement afin d’inciter à la construction de logements9.

Elle prévoit ainsi une mesure permettant, dans des zones d’activités économiques, à l’autorité compétente pour délivrer les autorisations d’urbanisme d’autoriser, par une décision motivée, un projet de réalisation de logements en dérogeant à certaines règles du PLU ou du document en tenant lieu (sur les destinations, l’emprise au sol, le retrait, le gabarit, la hauteur, l’aspect extérieur des bâtiments et les obligations en matière de stationnement)10.

Elle permet aux maires de déroger, dans les zones urbaines ou à urbaniser, aux règles du PLU pour permettre la réalisation d’opérations de logements destinés spécifiquement à l’usage des étudiants11.

Ces dérogations ne sont plus réservées aux seules zones dites tendues.

En troisième lieu, la loi tend à sécuriser davantage les autorisations d’urbanisme.

Elle ajoute un nouvel article L. 431-6 au Code de l’urbanisme, fixant un principe de cristallisation des règles d’urbanisme applicables dans le cadre de l’instruction d’un permis de construire modificatif, pendant une période de trois ans à compter de la date de délivrance du permis initial. Si les dispositions d’urbanisme intervenues postérieurement à la délivrance du permis initial ont trait à la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique, la demande de permis de construire modificatif pourra tout de même être refusée ou assortie de prescriptions spéciales.
Dans les mêmes conditions que le permis initial, la loi prévoit qu’un permis de construire délivré à titre précaire assorti d’un délai peut désormais faire l’objet d’une prolongation12.

En quatrième lieu, afin d’accélérer non seulement l’octroi des autorisations, mais également leur caractère définitif – conditionnant bien souvent le démarrage des travaux –, la loi modifie, pour les accélérer, les procédures contentieuses avec pour objectif sous-jacent de lutter contre les recours abusifs et dilatoires.

Le délai de recours administratif (gracieux ou hiérarchique) est réduit à un mois, sans effet de prorogation du délai de recours contentieux13. En clair, le recours contentieux n’est désormais recevable que dans les deux mois suivant la décision de construire, sans que ne soit d’aucune incidence sur ce délai l’intervention d’une décision expresse ou implicite de rejet d’un recours administratif. Cette disposition est applicable aux seuls recours formés contre les décisions d’urbanisme intervenues après l’entrée en vigueur de la loi.

La création d’un nouvel article L. 600-3-1 au Code de l’urbanisme permet à l’auteur d’un référé-suspension dirigé contre un refus d’autorisation d’urbanisme d’être dispensé d’avoir à prouver l’urgence, laquelle est désormais présumée dans ce cas.

L’article L. 600-2 du Code de l’urbanisme est modifié, portant la cristallisation des moyens « après l’expiration d’un délai de deux mois à compter de l’enregistrement du recours ou de la demande ».

Enfin, l’article L. 600-1 du Code de l’urbanisme est abrogé, privant le requérant de pouvoir invoquer, par voie d’exception, l’illégalité de certains documents d’urbanisme pour vice de forme ou de procédure, à l’appui de conclusions dirigées contre une décision individuelle ultérieure prise sur son fondement. Ces vices pourront seulement être invoqués dans le cadre d’un recours dirigé contre l’acte réglementaire lui-même et donc, avant l’expiration du délai de recours contentieux.

En cinquième et dernier lieu, les maires voient leur pouvoir de sanction en matière d’urbanisme renforcé.

Outre la possibilité de mettre en demeure l’intéressé de régulariser la construction, le maire a désormais la possibilité d’infliger une amende d’un montant maximal de 30 000 € et d’instituer une astreinte journalière dans la limite de 1 000 € par jour et d’un montant total de 100 000 € (au lieu de 25 000 € jusqu’alors). En cas de carence, il est prévu que le préfet pourra se substituer au maire.

Favoriser la construction de logements

La loi contient des mesures visant à faciliter la construction de logements.

Tout d’abord, elle crée le permis d’aménager « multi-site » en autorisant que ce permis concernant un lotissement puisse porter sur des unités foncières non contigües (I) si la demande de permis d’aménager est présentée par un demandeur unique, (II) si le projet constitue un ensemble unique et cohérent et (III) si le projet garantit l’unité architectural et paysagère des sites concernés.

Ce permis peut intégrer une ou plusieurs parcelles destinées à être renaturées ou réaffectées à des fonctions écologiques ou paysagères même en l’absence de travaux d’aménagement, si ces parcelles participent à la cohérence globale du projet14.

Ensuite, elle assouplit les règles sur le changement de destination dans les zones naturelles, agricoles ou forestières15.
L’autorisation d’urbanisme portant sur la surélévation ou la transformation limitée d’une construction existante régulièrement édifiée ne peut plus être refusée au motif que celle-ci n’est plus conforme aux règles en vigueur et relatives à l’implantation, à l’emprise au sol et à l’aspect extérieur des constructions16.

Enfin, elle pose de nouvelles règles pour les résidences à vocation sociale.

La loi fait évoluer le cadre de la résidence hôtelière à vocation sociale qui est réservée aux personnes les plus précaires, pour faire face à la pénurie de logements dans des zones de réindustrialisation ou de développement d’activités économiques.

Pendant une période de dix ans à compter du 28 novembre 2025, dans les territoires présentant des besoins particuliers en matière de logement liés à des enjeux de développement de nouvelles activités économiques, d’industrialisation ou d’accueil de travailleurs saisonniers ou en mobilier professionnelle, l’immeuble soumis pour la première fois au statut de résidence hôtelière à vocation sociale pourra, dans le cadre d’un protocole signé entre le préfet du département, l’exploitant, le conseil départemental et l’EPCI d’implantation de la structure, être transformé en logements, notamment en logements sociaux17.

Un cadre juridique spécifique, qui devra être précisé par décret, est également créé pour la résidence à vocation d’emploi qui se définit comme un ensemble d’habitations constitué de logements autonomes meublés, loués pour une durée d’une semaine à dix-huit mois à des locataires justifiant, à la date de la prise d’effet du bail, suivre des études supérieures ou être en formation professionnelle, en contrat d’apprentissage, en stage, en engagement volontaire « service civique », en cours de mutation professionnelle ou en mission professionnelle temporaire.

La finalité est de soutenir, par le biais du bail mobilité, le développement de solutions de logement transitoires et abordables pour répondre aux besoins des territoires en tension18.

Moyennant des procédures plus souples et plus rapides, la loi du 26 novembre 2025 offre donc aux collectivités locales de nouveaux outils pour planifier et accompagner les projets de construction, tout en s’adaptant aux réalités territoriales.

Toutefois, sa mise en œuvre effective, qui reste subordonnée à l’édiction de plusieurs décrets d’application, nécessitera une appropriation par les élus locaux afin que les objectifs de simplification se traduisent concrètement dans l’action publique locale.

Julie Gueutier et Donatien de Bailliencourt, Avocats Associés, HMS Avocats


1. Cette proposition de loi a été adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 15 mai 2025, puis par le Sénat le 17 juin 2025. Après un accord trouvé en commission mixte paritaire le 3 juillet 2025, le Sénat a adopté la version finale de la proposition de loi le 9 juillet et l’Assemblée nationale l’a adoptée le 15 octobre 2025.

2. Décision n° 2025-896 DC du 20 novembre 2025 : inconstitutionnalité des articles 5, 6, 10, 11, 12, 13, 14, 16, du 4° du paragraphe I et du paragraphe II de l’article 26, des articles 27, 28, 30 et 31.

3. Nouvel article L. 104-3 du Code de l’urbanisme.

4. Nouvel article L. 143-22 du Code de l’urbanisme.

5. Nouvel article L. 143-22 du Code de l’urbanisme.

6. Nouvel article L. 163-5 du Code de l’urbanisme.

7. Nouvel article L. 146-1 du Code de l’urbanisme.

8. Nouveaux articles L. 152-6-7 à L. 152-6-10 du Code de l’urbanisme.

9. Nouvel article L. 152-6 du Code de l’urbanisme.

10. Nouvel article L. 152-6-7 du Code de l’urbanisme.

11. Nouvel article L. 152-6-8 du Code de l’urbanisme.

12. Nouvel article L. 433-2 du Code de l’urbanisme.

13. Nouvel article L. 600-12-2 du Code de l’urbanisme.

14. Nouvel article L. 442-1-3 du Code de l’urbanisme.

15. Nouveaux articles L. 121-12-2 et L. 152-6-9 du Code de l’urbanisme.

16. Nouvel article L. 111-35 du Code de l’urbanisme.

17. I. de l’article 9 de la loi.

18. Article L. 631-16-1 du Code de la construction et de l’habitation.

Auteurs :

Julie Gueutier

Julie Gueutier

Avocat, HMS Avocats

Donatien de Bailliencourt

Donatien de Bailliencourt

Avocat Associé, HMS Avocats


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