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Loi Alur : modernisation des documents de planification et d’urbanisme

Publié le 26 février 2014 à 21h03 - par

Le Parlement a adopté, le 20 février, le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové. Les sénateurs et députés, réunis en commission mixte paritaire, sont parvenus à un accord sur une version du projet de loi permettant ainsi sa promulgation avant les élections municipales.

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Le texte adopté prévoit une modernisation des documents de planification à l’échelle communale et intercommunale, et renforce la couverture du territoire par les schémas de cohérence territoriale.

Jean-Baptiste Dubrulle avocat du cabinet Bignon LebrayJean-Baptiste DUBRULLE

L’avènement du PLU intercommunal (PLUi)

Cette disposition avait suscité une vive opposition des sénateurs et est à l’origine de la réunion de la commission mixte paritaire. Les parlementaires sont finalement tombés d’accord sur une version commune du projet de loi Alur, marquant ainsi l’avènement du PLU intercommunal.

Ainsi, les communautés de communes, les communautés d’agglomération exerceront de plein droit les compétences en matière de schémas de cohérence territoriale et schémas de secteur, et de plan local d’urbanisme. Le transfert de compétence au profit de ces EPCI interviendra dans un délai de 3 ans à compter de la publication de la loi. Celle-ci prévoit toutefois la possibilité de s’opposer à ce transfert de compétence si 25 % des communes représentant au moins 20 % de la population s’y oppose. Ainsi, si le transfert de compétence est automatique, la loi a prévu une minorité de blocage à un niveau très faible permettant aux communes de s’opposer au transfert et de garder la main sur l’élaboration de leur document d’urbanisme.

La loi opère également un changement des modalités d’élaboration du PLU intercommunal. Le PLU intercommunal n’est certes pas une nouveauté, mais jusqu’alors, l’EPCI élaborait le document d’urbanisme en concertation avec les communes membres. La loi instaure un mécanisme de « collaboration », par le biais d’une conférence intercommunale rassemblant l’ensemble des maires des communes concernées et en charge d’arrêter les modalités de cette collaboration. Pour faciliter l’élaboration des futurs plans locaux d’urbanisme intercommunaux, le texte rend aussi facultative l’intégration des plans locaux de l’habitat et des plans de déplacement urbain dans le PLUi. De même, lorsque le PLUi tiendra lieu de programme local de l’habitat ou de plan de déplacement urbain, il comprendra un programme « d’orientations et d’actions », contenant toutes les informations nécessaires à la mise en œuvre de la politique de l’habitat ou des transports et de déplacement définis par le PLU.

Renforcement du rôle du SCOT

La loi Alur clarifie nettement la hiérarchie des normes dans les documents d’urbanisme.

D’abord, le rôle du SCOT, comme document de référence de l’aménagement commercial, est renforcé. Les SCOT doivent comprendre un document d’orientation et d’objectifs précisant les orientations relatives à l’équipement commercial et artisanal, et définissant la localisation préférentielle des commerces en tenant compte des objectifs de revitalisation des centres villes, et de maintien d’une offre commerciale diversifiée de proximité. Le SCOT doit définir les conditions d’implantation des commerces en privilégiant la consommation économe de l’espace, notamment en entrée de ville et l’utilisation prioritaire des surfaces commerciales vacantes, ainsi que l’optimisation des surfaces dédiées au stationnement.

De nouvelles obligations sont également assignées au SCOT.

Celui-ci devra comporter une analyse du potentiel de densification et de mutation de l’ensemble des espaces bâtis pour limiter la consommation des espaces naturels, agricoles, ou forestiers. En outre, le SCOT devra comporter un diagnostic agricole du territoire en complément du diagnostic économique, l’objectif étant de prendre en compte la spécificité de l’activité agricole sur l’ensemble de l’économie du territoire, et de préserver le foncier agricole, et les exploitations qui s’y exercent.

Une modification du contenu des PLU

Le PLU, intercommunal ou communal, devient un instrument de lutte contre l’étalement urbain. Le rapport de présentation du PLU doit, désormais, analyser la capacité de densification et de mutation de l’ensemble de l’espace bâti, et exposer les modalités permettant de densifier ces espaces, tout en limitant la consommation des espaces agricoles, naturels ou forestiers. En outre, le PLU devra établir un inventaire des capacités de stationnement et des possibilités de mutualisation des espaces de stationnement.

En outre, le projet d’aménagement et de développement durable (PADD) devra chiffrer les objectifs de modération et de consommation de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain.

Enfin, la loi Alur supprime définitivement la possibilité pour le PLU d’imposer une taille minimale des terrains, ainsi que le coefficient d’occupation des sols. L’objectif, ainsi affirmé, est de faciliter la densification des quartiers pavillonnaires pour pouvoir construire davantage là où les besoins sont les plus importants.

La loi facilite également la subdivision des lots en lotissement en substituant à la règle de la majorité qualifiée, celle de la moitié des propriétaires détenant ensemble les deux tiers au moins de la superficie du lotissement, ou les deux tiers des propriétaires détenant au moins la moitié de cette superficie.

L’objectif de densification en zone urbaine ne se réalise pas, cependant, au détriment des espaces verts et naturels. Le texte introduit, en effet, un « coefficient de biotope » établissant un ratio entre la surface des espaces « naturels » et la surface d’une parcelle constructible. Le PLU pourra, à cette fin, favoriser le maintien ou le renforcement de la biodiversité et de la nature en ville, en réservant lors d’opérations de constructions neuves, rénovées ou habilitées, une part de surfaces non imperméabilisées ou éco-aménageables (sols, surfaces en pleine terre végétalisée, toitures et terrasses ou murs et façades végétalisés, etc).

La loi Alur, définitivement adoptée le 20 février, doit permettre d’assurer la densification en zone urbaine, tout en luttant contre l’artificialisation des sols. Le dispositif n’est pas exempt de critiques, mais la loi constitue un levier important pour une réforme ambitieuse de la planification urbaine locale.

Jean-Baptiste Dubrulle, Avocat spécialiste en Droit Public du cabinet Bignon Lebray


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