Comment distinguer une Vefa d’un marché public de travaux ?

Publié le 6 mai 2024 à 9h50 - par

La vente en l’état futur d’achèvement (Vefa) se définit comme le contrat par lequel le vendeur transfère immédiatement à l’acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l’acquéreur au fur et à mesure de leur exécution, l’acquéreur étant tenu d’en payer le prix à mesure de l’avancement des travaux.

Comment distinguer une Vefa d'un marché public de travaux ?
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La requalification de la Vefa en marché public de travaux constitue, cependant, un risque majeur. Si tel est le cas, comme le confirme le Conseil d’État dans une décision du 3 avril 2024, le contrat est entaché d’irrégularité au regard de l’interdiction par le Code de la commande publique des paiements différés.

La notion d’« influence déterminante exercée » sur l’ouvrage permet de requalifier le contrat de marchés publics de travaux

Un centre hospitalier avait conclu avec une société civile immobilière un « bail en l’état futur d’achèvement », qui prévoyait la location au centre hospitalier de deux bâtiments existants après l’aménagement de l’un d’eux ainsi que d’un nouveau bâtiment à construire, pour une durée de quinze ans, avec une option d’achat après la douzième année. Après l’achèvement des travaux, le centre hospitalier s’est toutefois abstenu de prendre possession des locaux, a suspendu le paiement des loyers, puis a saisi le tribunal administratif d’une action en contestation de la validité de ce contrat dont il a demandé l’annulation ou, à titre subsidiaire, la résiliation. Selon le Conseil d’État, le contrat par lequel un pouvoir adjudicateur prend à bail ou acquiert des biens immobiliers qui doivent faire l’objet de travaux à la charge de son cocontractant constitue un marché de travaux au sens des articles L. 1111-1 et L. 1111-2 du Code de la commande publique (CCP), lorsqu’il résulte des stipulations du contrat qu’il exerce une influence déterminante sur la conception des ouvrages. Tel est le cas lorsqu’il est établi que cette influence est exercée sur la structure architecturale de ce bâtiment, telle que sa dimension, ses murs extérieurs et ses murs porteurs. Les demandes de l’acheteur concernant les aménagements intérieurs ne peuvent être considérées comme démontrant une influence déterminante que si elles se distinguent du fait de leur spécificité ou de leur ampleur. En l’espèce, le contrat, dénommé par les parties « bail en l’état futur d’achèvement », constitue un marché public de travaux dès lors que l’ouvrage répondait aux besoins exprimés par le centre hospitalier qui avait exercé une influence déterminante sur la conception de cet ouvrage,

L’interdiction du paiement différé entache d’irrégularité le marché conclu

Selon l’article L. 2191-5 du Code de la commande publique, « l’insertion de toute clause de paiement différé est interdite dans les marchés publics passés par l’État, ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs établissements publics ». Dans le contrat en litige, les travaux d’aménagement de construction étaient rémunérés par le centre hospitalier, non par le versement immédiat d’un prix, mais par le versement de loyers ainsi que de « surloyers » pendant une durée de dix ans à compter de la livraison du bâtiment. Par suite, en jugeant, après avoir requalifié le contrat en litige de marché public de travaux et au motif que la clause de paiement différé interdite par le Code de la commande publique était indivisible du reste du contrat, la Cour d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en estimant que le contenu du contrat présentait un caractère illicite. Un tel vice est de nature à justifier son annulation.

Texte de référence : Conseil d’État, 7e – 2e chambres réunies, 3 avril 2024, n° 472476, Publié au recueil Lebon


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