Avec celle des départements de France, les trois principales associations d’élus ont décidé de boycotter le rendez-vous de lundi 19 juin 2023 organisé à Bercy, sous l’égide du ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire et de son collègue chargé des Comptes publics Gabriel Attal, en présence de la Première ministre Élisabeth Borne. Ces assises font suite aux revues des dépenses annuelles lancées début 2023.
Il s’agit de réduire à 108,3 % du PIB en 2027 le lourd endettement du pays (contre 111,6 % fin 2022), qui le range du côté des mauvais élèves européens, et de ramener sous l’objectif européen de 3 % le déficit public (4,7 % fin 2022). Des pistes d’économies de « plusieurs milliards d’euros » y seront dévoilées, qui alimenteront notamment le projet de budget de 2024 présenté à l’automne.
Pour revenir dans les clous, le Gouvernement entend réduire la dépense publique à 53,5 % du PIB en 2027, contre 57,5 % en 2022.
Il table sur la fin du bouclier énergétique, les gains des réformes comme celles des retraites ou de l’assurance-chômage, le plein-emploi ou encore une croissance de l’économie qu’il anticipe plus dynamique, après un coup de frein en 2023.
Suspendues durant le Covid, les règles budgétaires européennes s’appliqueront à nouveau l’an prochain et la forte remontée des taux d’intérêt alourdit significativement la charge de la dette, qui pourrait devenir le premier poste de dépenses de l’État, dans un contexte de ralentissement de la croissance.
« Ce contexte économique (…) vient contraindre notre équation de finances publiques et augmente d’autant l’exigence (…) de réduction de dépenses », tout en préservant les secteurs jugés prioritaires de la transition énergétique, la santé et la défense, indique-t-on au cabinet de Bruno Le Maire.
Les trois principales associations d’élus locaux ont décidé de bouder l’événement, en désaccord avec l’analyse de la situation financière. Bercy assure que la porte du dialogue reste « ouverte ».
« Notre participation aurait été incohérente vis-à-vis des communes et des habitants, voire insincère. (…) On ne peut pas être les figurants d’une séquence de communication », explique au JDD.fr M. Lisnard, maire (LR) de Cannes.
« Je ne voulais pas me prêter à ce jeu de dupes où chacun a trois minutes de temps de parole, avec des passages en revue inefficaces », abonde dans un même entretien Mme Delga, présidente (PS) de la Région Occitanie.
Mme Delga déplore notamment que « l’exécutif demande aux collectivités locales de faire des efforts alors qu’elles ne participent en rien au déficit public, au contraire : nous votons un budget à l’équilibre ».
« Bercy nous demande de diminuer d’un tiers la dette locale. Comment ? », s’interroge M. Lisnard, observant qu’« en quinze ans, on nous a supprimé trois fiscalités locales (la taxe professionnelle, la taxe d’habitation et la CVAE) ».
« L’exécutif a nationalisé nos fiscalités, nous n’avons aucune dynamique de recette dans les communes mais subissons une hausse des charges », plaide-t-il.
M. Lisnard comme Mme Delga affirment être victime d’une forme d’effet ciseau, avec des dépenses en hausse, et des recettes qui « ne progressent même pas au rythme de l’inflation ».
« Il n’y a pas une journée sans une séquence de com’ du pouvoir avec une dépense qui doit être assumée par les autres. Le plan eau ? Le plan vélo ? C’est à nous d’assumer », critique ainsi M. Lisnard. « Cette incohérence de l’exécutif alimente la crise civique. Nous n’y comprenons plus rien et les habitants non plus », appuie-t-il.
Les deux exhortent donc l’exécutif à « restaurer les libertés locales », « avec un nouvel élan de décentralisation qui ne soit pas du vent », selon les mots de M. Lisnard.
« Donner plus de pouvoir localement, ce n’est pas une question politicienne. Ce n’est ni de droite, ni de gauche. C’est de la vitalité de notre République qu’il s’agit, alors que nous voyons les populismes monter », insiste Mme Delga, qui appelle à « sortir d’un système vertical et descendant pour un système transversal, qui part du terrain ».
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