Une mauvaise appréciation du besoin justifie-t-elle une déclaration sans suite ?

Publié le 2 décembre 2021 à 9h01 - par

Le Code de la commande publique autorise l’acheteur, à tout moment de la procédure, à abandonner la passation d’un marché public en la déclarant sans suite.

Une mauvaise appréciation du besoin justifie-t-elle une déclaration sans suite ?

La déclaration sans suite peut être motivée par l’infructuosité de la procédure ou par toute autre raison d’intérêt général. Le motif justifiant la déclaration sans suite revêt une grande importance. En effet, selon le juge d’appel, à la demande d’un candidat, la renonciation à l’attribution du marché ouvre la possibilité de rechercher la responsabilité pour faute de l’acheteur.

Une mauvaise appréhension du besoin justifie l’abandon de la procédure

En l’espèce, un pouvoir adjudicateur avait lancé une procédure de dialogue compétitif en vue de conclure un marché ayant pour objet des prestations de conception, développement et maintenance de sites internet. Cependant, l’objet de la consultation avait un périmètre proche avec un accord-cadre à bons de commande en cours d’exécution qui laissait une liberté d’action à son titulaire quant aux moyens à mettre en œuvre. Le marché en cours « était ainsi à même de répondre au besoin qui a motivé le lancement d’une nouvelle procédure d’appel d’offres à laquelle la région PACA a finalement renoncé ». Et c’est ce motif qui avait conduit l’acheteur a déclarer sans suite le marché pour motif d’intérêt général.

Selon le juge administratif, le pouvoir adjudicateur n’a pas entaché ses décisions d’une erreur de fait en considérant que le marché en cours présentait une identité d’objet avec celui qu’elle devait conclure avec la société requérante. En effet, il résulte du principe de loyauté dans l’exécution des conventions qu’aucun nouveau marché ne soit passé par un pouvoir adjudicateur, quand un précédent marché encore en cours, ayant le même objet, permet de répondre à ses besoins actuels. Dès lors, le pouvoir adjudicateur était fondé à déclarer sans suite la seconde procédure d’appel d’offres pour ce motif d’intérêt général.

Une déclaration sans suite peut engager la responsabilité pour faute de la collectivité

La circonstance que l’acheteur abandonne la procédure et ne conclut aucun contrat n’est pas de nature à priver un candidat de la possibilité de rechercher la responsabilité de la collectivité par suite d’une faute commise par elle lors de la procédure ayant conduit à son éviction. Ainsi, en lançant un appel d’offres auquel il a finalement renoncé, le pouvoir adjudicateur doit être regardé comme ayant fait, avant cette renonciation, une mauvaise appréciation de ses besoins. La société requérante est fondée en conséquence à rechercher à ce titre la responsabilité de la collectivité.

Le juge rejette cependant la demande indemnitaire de la société. En effet, un candidat ne peut prétendre à une indemnisation du manque à gagner lorsque le pouvoir adjudicateur a renoncé à conclure le contrat pour un motif d’intérêt général. En l’espèce, la Région ayant déclaré la procédure d’appel d’offres sans suite pour un motif d’intérêt général, la société n’est pas fondée à demander à être indemnisée de son manque à gagner, lequel préjudice, à le supposer établi, ne saurait être regardé comme causé par la faute commise par l’acheteur procédant d’une mauvaise appréciation de ses besoins.
 
Texte de référence : CAA de Marseille, 6e chambre, 25 octobre 2021, n° 19MA02455, Inédit au recueil Lebon


On vous accompagne

Retrouvez les dernières fiches sur la thématique « Marchés publics »

Voir toutes les ressources numériques Marchés publics