Analyse des spécialistes / Statut

Reprise d’une activité en régie directe et devenir des salariés

Publié le 27 octobre 2015 à 11h30 - par

Dans le but de limiter les conséquences du changement d’employeur sur les contrats de travail en cas de vente d’entreprise, fusion de sociétés, mise en location gérance ou encore cession d’une branche d’activité, le Code du travail organise le transfert des personnels. Quelles sont les obligations de la personne publique repreneur ?

Reprise d'une activité en régie directe et devenir des salariés

Mathilde Peraldi Avocat

Mathilde Peraldi, Avocat

La notion de transfert de personnel issue du Code du travail intéresse également les collectivités locales et leurs établissements publics. C’est en particulier l’hypothèse dans laquelle une collectivité publique reprend en régie directe une activité auparavant gérée par une structure de droit privé.

L’article L. 1224-3 du Code du travail organise, dans cette hypothèse, le transfert de personnel et met à la charge de l’employeur public repreneur le soin de proposer aux salariés un contrat de droit public :

« Lorsque l’activité d’une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d’un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires.

Sauf disposition légale ou conditions générales de rémunération et d’emploi des agents non titulaires de la personne publique contraires, le contrat qu’elle propose reprend les clauses substantielles du contrat dont les salariés sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération.

En cas de refus des salariés d’accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit. La personne publique applique les dispositions relatives aux agents licenciés prévues par le droit du travail et par leur contrat ».

Le contenu du contrat de droit public proposé

– Reprise des clauses substantielles du contrat de travail : l’exemple de la durée et de la rémunération

La circulaire en date du 19 novembre 2009 précise que constituent les clauses substantielles du contrat de travail : la durée, l’objet, la quotité de temps de travail, la qualification, l’ancienneté et la rémunération.

Le Code du travail semble toutefois opérer une distinction entre les clauses substantielles elles-mêmes.

En effet, le premier alinéa de l’article L. 1224-3 du Code du travail s’intéresse spécifiquement à la durée du contrat de travail CDI ou CDD. La durée proposée par le contrat de droit public doit être strictement identique à celle prévue au sein du contrat de travail.

Les autres clauses substantielles et en particulier celle concernant la rémunération sont régies par le deuxième alinéa de l’article L. 1224-3 du Code du travail et peuvent subir quelques modifications au sein du nouveau contrat de droit public au regard des règles de la fonction publique.

– La rémunération du nouveau contrat de droit public

S’agissant de la rémunération, la haute juridiction  (CE, Avis n° 299307 du 21 mai 2007) pose le principe selon lequel l’exception prévue à l’article L. 1224-3 du Code du travail n’a pas pour effet automatique de faire obstacle au maintien de la rémunération. La rémunération proposée peut néanmoins être inférieure (Principe rappelé par CJUE, 6 septembre 2011, aff. C-108/10).

Si la collectivité n’a pas mis en place de grille de rémunération pour ses agents contractuels, la rémunération de l’agent transféré ne doit pas excéder manifestement la rémunération qui serait allouée à un agent public. Pour ce faire, la rémunération peut être fixée au regard de la qualification et de la rémunération d’un agent déjà en poste de qualification équivalente exerçant des fonctions analogues.

– La durée du nouveau contrat de droit public

Selon la circulaire et au regard du Code du travail, la durée du contrat – contrat à durée indéterminée ou contrat à durée déterminée –  est une clause substantielle.

Mais contrairement à la rémunération, il semble que la durée du travail ne puisse subir aucune modification au sein du nouveau contrat de droit public.

En effet, le premier alinéa de l’article L. 1224-3 est très clair sur ce point, le salarié auparavant en contrat à durée indéterminée ne peut se voir proposer qu’un contrat lui-même à durée indéterminée :

« Lorsque l’activité d’une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d’un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires ».

Il ressort de cet article que, contrairement à la rémunération, la durée du contrat de travail ne peut souffrir d’aucune exception. Or, certaines dispositions de droit public pourraient se trouver en contradiction.

C’est en particulier le cas des directeurs d’offices de tourisme. Un office de tourisme sous la forme associative emploie son directeur en CDI. L’activité de l’office est reprise en régie directe par la collectivité. À la lecture de cet article, la nouvelle collectivité doit proposer un contrat de droit public en CDI et ce quand bien même l’article R. 133-11 du Code du tourisme prévoit que les directeurs sont recrutés en CDD pour une durée de trois ans.

Transformer un CDI en CDD à l’occasion d’un transfert serait particulièrement inéquitable pour le salarié, c’est sans doute ce qui a motivé le législateur a privilégié les intérêts du futur agent public en lui permettant de conserver un CDI.

Il en résulte que le second alinéa de l’article L. 1224-3 du Code du travail qui permettrait de déroger à la reprise in extenso du contrat concerne toutes les clauses substantielles du contrat de travail à l’exception de celle relative à la durée.

Mathilde Peraldi, Avocat

 
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La présente étude a pour objet de déterminer les obligations à la charge du nouvel employeur public dans l’hypothèse où l’activité d’une structure de droit privé est reprise en régie par une collectivité territoriale ou un établissement ...

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