La nouvelle architecture financière du bloc communal pourrait remettre en cause le financement de la transition énergétique, selon l’AMF

Publié le 19 décembre 2023 à 9h00 - par

L’analyse des tendances financières du bloc communal pour 2023 et 2024 de l’Association des Maires de France montre un ralentissement de l’investissement. En outre, la réduction continue de leurs capacités financières et de leur marge de manœuvre risque de ne pas permettre aux communes et intercos de financer les nouveaux enjeux de politique publique.

La nouvelle architecture financière du bloc communal pourrait remettre en cause le financement de la transition énergétique, selon l'AMF
© Par Ngampol - stock.adobe.com

« En raison des restrictions successives de ressources et des marges de manœuvre budgétaires, la contraction de l’investissement du bloc communal observée depuis 2014 semble devenir structurelle », constate l’Association des Maires de France (AMF) dans son analyse financière du bloc communal, publiée à l’occasion du Congrès des maires de France fin novembre 2023. À cela, plusieurs causes : une forte augmentation des dépenses (bien qu’inférieure à celle des recettes), l’augmentation des achats et des charges externes principalement due à l’inflation, ou encore l’augmentation des charges financières de plus de 20 % en 2023. L’augmentation du point d’indice (3,5 % en juillet 2022 et 1,5 % en juillet 2023) a induit une dépense supplémentaire de plus de 2 milliards d’euros environ pour le bloc communal par rapport à 2021. L’inflation de 4 % en moyenne annuelle ne reflète pas la réalité des hausses de coûts pour les collectivités. En effet, explique le département finances et fiscalité locale de l’AMF, il convient de prendre en compte la date à laquelle la dépense est effectuée. C’est le cas pour l’énergie. Les prix de l’énergie fluctuant selon la période de l’année, pour une commune le renchérissement peut être supérieur à la moyenne annuelle. Et pour les collectivités qui ont dû renouveler les contrats d’approvisionnement en pleine période de hausse, notamment en 2022, les augmentations peuvent parfois s’élever jusqu’à 800 %. En outre, l’indice des prix des dépenses communales, qui a augmenté de + 7,7 % au premier semestre 2023 sur un an, contre + 4,9 % pour la même période en 2022, explique que la hausse des achats et charges externes ait été supérieure à 7,7 % en 2023. Cette hausse est la plus élevée jamais enregistrée sur les derniers mandats.

À ces augmentations s’ajoute une nouvelle architecture des ressources locales des collectivités. La suppression quasi totale du levier fiscal ne permet pas de prévoir et d’ajuster les recettes aux aléas de la conjoncture. La concentration du panier fiscal sur les propriétaires, avec la suppression de la taxe d’habitation, affaiblit la capacité d’agir des collectivités, et notamment leur rôle d’amortisseur des crises. S’y ajoute la non-indexation sur l’inflation de la DGF, qui se réduit en volume malgré une revalorisation de 1,7 % en 2023. Or, la hausse des prix devrait se poursuivre jusqu’en 2025. Enfin, une part croissante des ressources locales est désormais adossée à la conjoncture économique via la compensation par la TVA. « La réduction continue du levier fiscal débouche sur la multiplication des filets de sécurité, certaines collectivités n’ayant plus assez de marge de manœuvre pour faire face aux retournements de la conjoncture ».

L’AMF s’inquiète de ce que la réduction continue des capacités financières des communes et des intercos, conjuguée à la suppression continue de leur marge de manœuvre, risque de ne pas permettre de financer les nouveaux enjeux de politique publique. « La nouvelle donne fiscale à la main de l’État, la baisse de la DGF en volume à hauteur de 72 milliards d’euros depuis 2010, le fléchage des dotations sont autant de freins au financement des grandes priorités nationales », précise l’association d’élus. Ces 72 milliards d’euros prélevés sur la DGF « auraient été bienvenus pour participer au financement » de la transition énergétique, du logement, de la réindustrialisation du pays, « plutôt que d’être absorbés par un déficit qui ne se réduit pas ».

L’analyse financière se conclut sur les perspectives d’évolution pour 2024, avec des charges de fonctionnement supplémentaires attendues et une évolution des recettes qui pourrait ne pas être à la hauteur des enjeux. Au final, le niveau d’investissement du bloc communal, en baisse constante depuis le mandat 2008-2013, pourrait continuer à être insuffisant : en euros constants, il reste ainsi près de 80 milliards d’euros à réaliser d’ici 2026 pour atteindre le niveau des investissements d’avant la baisse des dotations. Les collectivités pouvaient alors augmenter leur effort d’épargne et accroître ainsi leurs investissements.

Marie Gasnier

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