Analyse des spécialistes / Urbanisme

Quelle prise en compte de la spécificité des territoires dans la loi ZAN ?

Publié le 28 août 2023 à 16h00 - par

La loi n° 2023-630 du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux comprend un chapitre, avec deux articles, consacré à « mieux prendre en compte la spécificité des territoires ».

Quelle prise en compte de la spécificité des territoires dans la loi ZAN ?
© Par Francesco Scatena - stock.adobe.com

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L'objectif Zéro artificialisation nette (ZAN)
L'objectif Zéro artificialisation nette (ZAN)
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L’article 191 de la loi « Climat et résilience » fixe l’obligation pour les territoires de réduire de moitié, par rapport à la période entre 2011 et 2021, le rythme de consommation d’espaces naturels agricoles et forestiers d’ici à 2031. L’enjeu étant, d’ici 2050, d’arriver à une absence d’artificialisation nette1. La loi « Climat et résilience » a posé un principe fort, sans définir les outils financiers permettant sa mise en œuvre. C’est pour atteindre ces objectifs qu’intervient cette loi du 20 juillet 2023 avec notamment une prise en compte de la spécificité des territoires.

1. La surface minimale de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers

L’article 4 de la loi pose d’abord le principe qu’une commune, qui est couverte par un plan local d’urbanisme, par un document en tenant lieu ou par une carte communale prescrit, arrêté ou approuvé avant le 22 août 2026, ne peut être privée, par l’effet de la déclinaison territoriale des objectifs mentionnés au présent article, d’une surface minimale de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers. Entre 2021 et 2031, cette surface minimale est fixée à un hectare. L’article 4 de la loi ajoute qu’à la demande du maire, une commune disposant de cette surface minimale peut choisir de la mutualiser à l’échelle intercommunale, après avis de la conférence des maires ou, à défaut, du bureau de l’établissement public de coopération intercommunale concerné si l’ensemble des maires des communes membres en fait partie.

Ensuite, l’article 4 de la loi dispose que pour les communes nouvelles dont l’arrêté de création a été pris après le 1er janvier 2011, une majoration de la surface minimale de 0,5 hectare est appliquée pour chaque commune déléguée. Cette majoration est plafonnée à deux hectares.

De plus, l’article 4 de la loi indique que le bénéfice de cette surface minimale n’exonère pas les communes non couvertes par un plan local d’urbanisme, par un document en tenant lieu ou par une carte communale, du respect des dispositions du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du Code de l’urbanisme régissant les constructions, les aménagements, les installations et les travaux ainsi que les changements de destination réalisés sur ces constructions en dehors des parties urbanisées de ces communes.

Enfin, au plus tard le 1er janvier 2031, la conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols présentera un bilan de l’application de la surface minimale de consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers dans le cadre de la fixation d’objectifs communaux, intercommunaux et régionaux de réduction de l’artificialisation des sols applicables à la première période décennale, de son adéquation avec les besoins fonciers constatés durant la période et de l’artificialisation constatée durant cette même période. Elle formulera des pistes de réduction de cette surface minimale pour les périodes décennales ultérieures, en vue d’atteindre l’objectif d’absence d’artificialisation nette à l’horizon 2050.

2. La fixation des objectifs chiffrés de lutte contre l’artificialisation des sols dans les documents de planification régionale et d’urbanisme

L’article 5 de ladite la loi modifie le Code de l’environnement et le Code général des collectivités territoriales (CGCT).

D’une part, il crée un article L. 321-15-1 au Code de l’environnement, lequel dispose que pour la fixation des objectifs chiffrés de lutte contre l’artificialisation des sols dans les documents de planification régionale et d’urbanisme, il est tenu compte des enjeux d’adaptation et de recomposition spatiale du territoire des communes figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 321-15 dudit Code. Pour l’atteinte de ces objectifs, les surfaces artificialisées situées dans une zone exposée au recul du trait de côte délimitée en application du 1° de l’article L. 121-22-2 du Code de l’urbanisme peuvent être considérées comme désartificialisées, au sens de l’article L. 101-2-1 du même Code, dès lors que ces surfaces ont vocation à être renaturées dans le cadre d’un projet de recomposition spatiale du territoire littoral. Au terme de chaque tranche de dix années, les surfaces n’ayant pas fait l’objet d’une renaturation sont de nouveau considérées comme artificialisées.

D’autre part, l’article 5 de ladite loi modifie le troisième alinéa de l’article L. 4433-7 du Code général des collectivités territoriales en ajoutant que la trajectoire tient compte des contraintes propres aux communes littorales, au sens de l’article L. 121-1 du Code de l’urbanisme, soumises aux prescriptions particulières d’un schéma de mise en valeur de la mer, notamment en termes d’aménagement du territoire, de renouvellement urbain et d’insularité, de leurs besoins en terme de développement économique et de revitalisation des centres et des efforts déjà réalisés par ces communes.

L’enjeu est de trouver un équilibre entre le besoin de logement et la sauvegarde de l’environnement. Cela passe non seulement par des outils juridiques et financiers, mais aussi par une acculturation pour lutter l’artificialisation des sols. Le changement de droit est indissociablement lié à un changement des mentalités. La pédagogie est nécessaire.

Dominique Volut, Avocat-Médiateur au barreau de Paris, Docteur en droit public


1. Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, NOR : TREX2100379L, JORF n° 0196 du 24 août 2021, Texte n° 1.

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